lundi 30 septembre 2024

Toponymie : rue De Bernières ou rue Bernières ? (2024)

2024-09-01. Le Soleil rappelle (1er sept.) aux citoyens de Québec que les parcomètres de la «rue De Bernières » demeureront payants le 2 septembre, jour de la Fête du travail. Le «de» est de trop si l’on veut s’en tenir au patronyme. La Ville indique la voie à suivre depuis quelques années. Elle affiche correctement «rue Champlain» et «rue Maisonneuve». On aurait pu honorer les deux personnalités de la particule en allongeant les appellations: rue Samuel de Champlain ou rue du Sieur de Maisonneuve. De manière plus générale, on ne parle pas des écrivains Lamartine ou Musset en les affublant de la particule lorsqu’on n’emploie pas leurs prénoms. Aussi la Commission des Champs de bataille, organisme qui administre le parc, devrait compléter l’appellation et adopter «rue François-Henri de Bernières» si elle tient à conserver la particule. Ou s'en tenir à «rue Bernières». Les modifications iraient dans le sens des pratiques officielles québécoises.

 

 

Slush, sloche, barbotine, granité (2024)

 2024-09-02. Le Soleil, grâce à la plume de Jean-Philippe Thibault, fait part à ses lecteurs de problèmes rencontrés par la Société secrète de Percé, spécialisée en boissons aromatisées à l’alcool (2 septembre). On peine à nommer ces dernières… en français. On les présente surtout sous le nom de «slush». L’auteur utilise le mot à cinq reprises et laisse de côté la forme francisée «sloche». Le mot a un concurrent : «barbotine», lequel est recommandé par l’Office de la langue depuis 1984. On l’utilise à deux reprises. C’est dire que le court mot anglais l’emporte sur le «barbotine» québécois. Mais y a plus grave : on ignore totalement l’existence de l'équivalent français : «granité». «Sorbet granuleux» selon le Petit Robert. On pardonnera aux propriétaires de l’entreprise leur ignorance du mot. Au demeurant, l’OQLF ne leur fera pas de remontrance, comme le fait la Régie des alcools. Pour sa part, le journaliste devrait inscrire dans son dictionnaire personnel : «Slush, voir aussi : granité, barbotine, sloche».

Une chaleur historique ! (2024)

2024-09-03. Bientôt, on nous annoncera des chaleurs ou des températures historiques! On y est presque. On écrit dans le Courrier de la planète du Devoir (3 septembre) « Pour une deuxième année consécutive, la température moyenne dans le monde en août a atteint des niveaux de chaleur historiques… » et « … les températures moyennes du globe ont atteint une chaleur historique ». On peut supposer que ce ne sont pas les historiens qui sont à la source de l’inflation linguistique ni les amoureux de la langue. Les 40 de l’Académie notent sur le sujet : « Une fâcheuse tendance se répand actuellement qui consiste à […] faire d’«historique» un synonyme de «sans précédent» ou d’«inégalé», ce qu’il convient d’éviter…». La remarque conduit aux solutions de rechange : «niveaux de chaleur inégalés» et «chaleur exceptionnelle» par exemple. Mais la remarque n’est pas historique! pour autant.

Pris dans le trafic ! (2024)

2024-09-04. Les rédacteurs du bulletin Vos informations à la source (Québecormédia) écrivent «Pris dans le trafic: Montréal …» et « on peut se demander si les Montréalais sont condamnés à être pris dans le trafic….» (Vos infos à la source, 4 septembre). Le «trafic» est l’ensemble des mouvements de véhicules sur un axe de circulation, selon le Multi dictionnaire, lequel précise aussi : «impropriété au sens de ‘congestion routière’, ‘embouteillage’». Lionel Meney (Dict. qcois-français) cite l’exemple «… Le cortège [….] a immobilisé le trafic» et il suggère qu'on dise à la place «…a immobilisé la circulation». Un commentaire de l’Académie française va dans un sens identique : «… ‘traffic’ en anglais désigne aussi une circulation intense d’automobiles : le recours à cet anglicisme dans ce cas précis est à proscrire» (Dire, ne pas dire / Académie française, 2020). Un exemple suit : «On dit : Être bloqué dans les embouteillages; on ne dit pas : Être bloqué dans le trafic». L’erreur est courante à ce que l’on peut constater. Il reste à l’éviter à l’avenir.

Reset ? (2024)

2024-09-05. Il n’est pas toujours possible de repérer illico le mot français à employer. Les mots de l’anglais arrivent parfois plus facilement à l’esprit. Les écrivants doivent parfois faire un deuxième effort. Émilise Lessard-Therrien, dans sa première chronique au Journal de Québec (4 septembre, p. 24), écrit : «Parfois, un ‘reset’ est nécessaire». Sous-entendu : dans le cours de sa vie ou de sa carrière. Normalement, une autrice ou un auteur se relit une fois ou deux avant de diffuser un texte. Souvent l’équivalent français revient à l’esprit. Parfois il faut consulter un dictionnaire de difficultés. Par exemple, le Multi dictionnaire de la langue française que tout rédacteur devrait avoir à portée de main ou de clavier. Un grand nombre de mots anglais utilisés sans raison au Québec, peut-être un millier, y sont consignés, accompagnés de solutions de rechange. Ainsi y verrait-on pour «reset»: réamorçage, redémarrage, réinitialisation, relance, remise à zéro… Les mots sont plus longs, mais ils sont français.

Préposé aux bénéficiaires ? (2024)

2024.09-06. Le bulletin Vos informations à la source (Québecor) aligne une double faute en trois mots. La manchette est: «Agression sexuelle… : un préposé aux bénéficiaires…» (5 septembre). D’abord, un préposé est toujours rattaché à un domaine (vestiaire, renseignements, nettoyage…) et jamais à des personnes (abonnés ou aînés…). Par ailleurs, le mot «bénéficiaire», appliqué à des personnes est un pis-aller. Le juge Robert Auclair écrit : «On peut être bénéficiaire d’un droit, d’un avantage ou d’un privilège. Ainsi, on parlera du bénéficiaire d’une créance, d’un héritage, d’une succession, d’un chèque, […]. On est loin du citoyen qui bénéficie d’un régime public de sécurité sociale, un usager, un patient, un prestataire de services… (https://asulf.org/.../upl.../2020/09/Aide-soignant-texte.pdf). En somme, le préposé aux bénéficiaires est un aide-soignant ou un préposé aux soins.

 

Venezuela ou Vénézuéla ? (2024)

2024-09-07. On lit dans le Devoir la manchette « Le Venezuela rétablit l’électricité…» (3 septembre, p. A3, 2e col.). On économise les accents aigus! Le journal suit la pratique des dictionnaires qui enregistrent l’usage et des correcteurs automatiques orientés vers les règles suivies aux États-Unis. Pourtant, on met des accents aux politonymes de pays voisins (Pérou, Équateur, Brésil) et même d’États américains (Névada, Nébraska). Les éditeurs de l’Actualité, à la suite d’une remarque proposant l’ajout des accents à Vénézuéla donnent une réponse alambiquée : «…la logique est qu'il y a un accent seulement quand d'autres lettres que le « e » changent en français par rapport à la langue originale » (5 septembre). Cela expliquerait la graphie «Équateur» mais non «Pérou» ou «Brésil». Le Devoir et l’Actualité ignorent donc que le nom d’un pays varie en fonction de la langue dans laquelle on s’exprime. Deux beaux exemples : United States c. États-Unis et Belarus c. Biélorussie.

 


Dès, depuis, à partir de... (2024)

2024-09-08. Bernard Cerquiglini écrit, au sujet de la préposition «dès» : « Pour désigner le moment […] où une action a commencé, on peut utiliser ‘à partir de’ ou ‘depuis’» […] On emploie également la préposition ‘dès’. Celle-ci toutefois apporte une nuance […] elle indique la précocité…» (Merci professeur! Paris, 2008). On peut lire dans le Journal de Québec «Ouvert 7 jours dès 11 h» et «Mario en semaine dès 6 h» (4 sept., p. 1 et p. 19). Dans le premier cas, « à compter de 11 h » serait plus juste. Trois jours plus tard, on publie deux autres messages : «Danse! […] Dès le 19 septembre » et «Qub en semaine dès 6 h» (Ibid., 7-8 sept., p. 24 et 67). La préposition s’explique bien devant «6 h » et est fort discutable devant «19 septembre », à moins que l’activité soit anticipée. Ce sont là des nuances. Mais Cerquiglini conclut que l’indistinction marque un affaiblissement sémantique.

Pour un autre 24 mois ? (2024)

2024-10-01. Madame Josée Legault devrait écrire «… pour 24 autres mois» plutôt que «.. pour un autre 24 mois» comme elle le fait (Journal ...