vendredi 26 février 2021

Soi-disant ou prétendu ? (2021)

2021-01-29. Monsieur Mulcair écrit dans sa chronique du 29 janvier (J. de Qc, p. 19), parlant du chef du Bloc : «Ses soi-disant questions …». L’adjectif ou adverbe «soi-disant» se dit des personnes et non des objets. Le Multi dictionnaire contient une note sur la faute, mais elle n’est pas que québécoise. Elle est également française. Dans un volume récent, Muriel Gilbert, correctrice au Monde écrit à son propos : «’Soi-disant’ signifie ‘qui se prétend’ ou ‘qui se dit’. N’évoquons donc pas un ‘soi-disant château’… On peut en revanche parler d’un ‘soi-disant érudit’, d’une soi-disant actrice, puisqu’ils sont doués de parole. Pour les objets, on dira : un ‘prétendu château’, une ‘prétendue bonne affaire’» (Un bonbon sur la langue, p. 61). Les locuteurs québécois ne font pas toujours la distinction. Mais les membres de l’Asulf (www.asulf.org) pensent que les journalistes et les chroniqueurs doivent la connaître.

mercredi 24 février 2021

Avoir oeuvré au... (2020)

2020-03-02. Le Soleil annonce la nomination de Philippe Saint-Pierre au poste de directeur du marketing et des relations avec la communauté (le journal, 2 mars, p. 11). On y note : …il a œuvré… chez CAA-Québec… Il a également occupé… des fonctions… au Protecteur du citoyen». Il a œuvré? Peut-être. On lit dans la Banque de dépannage linguistique : « on œuvre pour une bonne cause et on travaille pour gagner sa vie» . Le commun des mortels travaille pour une entreprise d’abord afin d’ assurer son ordinaire. Il est vrai qu’on peut aussi aller au-delà des préoccupations du primo vivere. Mais pourquoi écrit-on «chez CAA-Québec» et «au Protecteur…»? CAA-Québec serait-il un individu? Et pourquoi utilise-t-on la préposition «au» devant «Protecteur du citoyen» qui, lui, en est un en principe. En somme, on peut donner le bénéfice du doute à monsieur Saint-Pierre : il aurait œuvré… «au» CAA-Québec et par la suite «chez» le Protecteur du citoyen.

Restaurants opérés par la famille (2020)

 2020-03-04.  Chaque journaliste doit avoir son petit lexique correctif personnel. Aussi je vous propose d’ajouter au vôtre le verbe «opérer», lequel est constitue un guet-apens pour les Québécois. Sous l’influence de l’anglais, on lui donne le sens d’administrer, de diriger, de gérer. Il y a quelques jours, vous avez écrit dans le Quotidien : «….l’acquisition des restaurants Coq Rôti… opérés par la famille Abraham». L’article est reproduit dans le journal de Québec, Le Soleil (4 mars, p. 22). L’anglicisme ou le franglicisme, c’est selon, mérite une attention particulière. Il est l’un des plus répandus ici. De nombreux auteurs de guide de rédaction le critiquent (Marie-Éva de Villers, la Banque de dépannage linguistique, Antidote…). De plus, le verbe est une des «têtes de Turc» de l’Asulf (www.asulf.org). Par ailleurs, la conjoncture est à noter : la Semaine du français s’en vient.

Formes passives (2020)

 2020-03-06. Les occasions sont nombreuses d’épingler les formes passives de nos gazettes. Aujourd’hui (encore!) dans le Soleil (6 mars, p. 7) : «Il sera rencontré par les enquêteurs…». Normalement, la phrase française devrait se lire : « Les enquêteurs le rencontreront ». Jean-Marc Léger, lui-même éditorialiste au Devoir, a relevé la manie d'une telle tournure : «L’anglicisation s’exprime principalement sous deux formes. C’est d’abord le recours grandissant au mode passif, qui de plus en plus supplante l’actif, régime habituel du français…Ainsi, on ne compte plus les tournures du genre : les mesures à être envisagées, la maladie en voie d’être circonscrite, les élections partielles à être tenues le jour X, … et des dizaines, des centaines de formules de même encre chaque jour, dans la presse écrite mais bien plus encore à la radio et à la télévision… » (2004).

En inventaire ou en stock? (2020)

2020-03-07. (À VR Saint-Nicolas).Si on comprend bien le rez-de chaussée publicitaire publié dans le Journal de Québec (7 mars, p. 7), vous seriez en train de dresser l’inventaire de plus de 400 VR. Vous écrivez «Plus de 400 VR en inventaire». Si l’on décode le message en supposant qu’il vient de l’anglais, on devine que l’expression signifie plutôt «… 400 VR en stock», c’est-à-dire en entrepôt, en magasin ou disponible. Il est facile de comprendre le raisonnement de vos chargés de la publicité : le mot «stock» vient de l’anglais. Le mot «inventaire» de son côté se marie mieux à la graphie française. Pour éviter l’emprunt de «stock» intégré au français depuis la fin des années 1800, vos publicitaires achètent chat en poche et emploient un anglicisme sémantique. Il serait moins dommageable pour la qualité de la langue française d’employer le mot «stock» pour désigner la quantité d’un produit en magasin.

On a-tu oublié ? (joual) (2020)

2020-03-13. Le premier ministre du Québec parle-t-il aussi mal? Le caricaturiste Côté du Soleil dessine le P.M. se dirigeant vers le Salon rouge en compagnie du ministre des Finances et il lui pose une question : «On a-tu oublié quelque chose dans le budget?» (12 mars, p. 18). On peut apprécier la caricature elle-même, mais fallait-il mettre une telle phrase dans la bouche du chef de gouvernement? Est-elle plus drôle parce qu’elle frôle le joual? On répondra sans doute «non». Si c’est «oui», il faudrait conseiller à l’auteur de pousser le bouchon un peu plus loin et d’écrire : «On a-tu oublié quèqu’chose…?» Les Québécois sont mithridatisés, ils ont assimilé ces expressions du langage populaire et certains en vivent. Il ne faudrait pas qu’un caricaturiste aille jusqu’à reproduire dans une bulle une expression soignée telle « A-t-on oublié …? » en cette veille de la semaine de la francophonie. Ce serait réveiller un vieux virus


Régulier (tarif, prix, menu... (2020)

 2020-03-15. Rien n’y fait! L’Association québécoise des retraités des secteurs public et parapublic tient mordicus à l’anglicisme sémantique «régulier». Le concepteur de vingt-et-une cartes publicitaires en qualifie tour à tour les mots tarif, prix, menu, programmation, saison et abonnement (Reflet, mars 2020, p. 55-58). Pourtant, les répertoires correctifs sont unanimes. La Banque de dépannage linguistique (OQLF), le Multi dictionnaire, le VocabulAide (P. Cardinal), le Petit dictionnaires des québécismes (F. D’Apollonia) et le Colpron critiquent l’anglicisme. Il en va de même des remarqueurs (C. Chouinard, G. Dagenais, N. Guilloton, P. Roux…). Et de Michel Rondeau, lequel écrit : «C’est sous l’influence de l’anglais «’regular’ que nous donnons souvent à cet adjectif le sens ‘d’ordinaire’, ‘normal’, ‘courant’, qu’il s’agisse d’un prix, d’un café, d’un format, d’un plein d’essence» (L’Insidieuse invasion, 2018). L’AQRP, en cultivant l’anglicisme et en le propageant, se fait le vecteur du virus.

Testé négatif ? (2020)

2020-03-17. Un correspondant me fait part de l’expression «Il a été testé négatif». On l’a reproduite à l’écran de Tout le monde en parle (15 mars, vers 20 h 5). L’expression constitue un calque de l’anglais. Le Robert & Collins traduit la phrase «he tested positive… » par «son contrôle de dopage était positif». Un traducteur, R. Meertens, rend «to test positive…» par «être dépisté positif». Le rédacteur publicitaire Michel Rondeau note la concision de la tournure anglaise, mais il propose deux solutions de rechange : «… dont le test à été positif» et «… a échoué au contrôle…» (L’Insidieuse invasion, 2018). Pour sa part, les linguistes de Radio-Canada observent : «… les calques ... « tester positif » et « être testé positif » sont toujours considérés comme abusifs. … on peut utiliser les formules suivantes : ÊTRE DÉCLARÉ POSITIF et, lorsque le contexte est suffisamment clair, ÊTRE POSITIF» . Les réalisateurs de TLMP n’ont sans doute pas le goût de tenir compte de telles observations.

Payer la traite / pizza large (2020)

 2020-03-18. Jetons un coup d’œil aux trois prospectus publicitaires distribués par Postes Canada : un carton de A & W., un dépliant de Salvatoré et un cahier de Canadian Tire. Le carton de A & W. annonce «On vous paye la traite». Tout est écrit en français, mais c’est du franglais. En anglais, on écrit : «this is my treat». Le mot «traite» a un sens commercial ou bancaire en français . Ici, il aurait fallu écrire : «on vous offre le café». Pour sa part, Salvatoré fait saliver les consommateurs avec une belle pizza bien ronde, comme une assiette, qu’on dit «Large». Pourtant, on ne parle jamais de la largeur d’une assiette, mais plutôt de sa grandeur. Le cahier des magasins C.T., daté 19-25 mars, révèle un exemple à suivre. Les prix des articles sont suivis des abréviations «Cour./Reg. Donc, en clair : «Courant / Regular. Bref, à la prochaine occasion, il faudra offrir une grande pizza aux propriétaires des magasins C.T., une pizza dont le prix courant est de 15 $.

Tarifs corporatifs? 2020

 2020-03-18. La revue Reflets (mars 2020) annonce des tarifs «corporatifs» dans les cartes publicitaires des hôtels Royal Versailles, Jaro et Dauphin de même que de l’agence de location Chalets entre amis (p. 55). En français, l’adjectif signifie relatif à une corporation, c’est-à-dire à une association de personnes exerçant la même profession (médecins, notaires, etc.) Le mot n’inclut pas les entreprises. En revanche, le mot anglais équivalent couvre indifféremment toutes ces catégories. C’est le cas de «Corporate price». . En France, on oserait sans doute «tarif corporate»! Mais comme des solutions de rechange sont chose possible (tarifs préférentiels que la revue utilise à une reprise et, en plus, tarifs avantageux, tarifs de groupe), il semble inutile d’user le franglicisme québécois ou le mot anglais.

Prendre par surprise (2020)

2020-03-23. Le dictionnaire Le Robert et Collins propose deux traductions différentes de l’expression «to take by surprise» selon qu’elle s’applique à des personnes ou à des villes ou forts. On propose «surprendre, prendre au dépouvu » dans le premier cas et «prendre par surprise» dans l’autre. Le Robert de la langue française donne à l’expression le sens de «par une attaque brusque, à l’improviste». Plusieurs guides correctifs notent qu’on a là un calque (Le Colpron, le Petit dictionnaire des québécismes, le Grand glossaire des anglicismes, etc.). La linguiste Annie Bourret lui accole la même caractéristique (Pour l’humour du français, 2018). Comme on entend l’expression sur les ondes de Radio-Canada à l’occasion (par exemple, Téléjournal Québec, 23 mars, 18 h 10), il serait approprié que les linguistes du réseau se penche sur les distinctions à faire. 

Employé régulier (2020)

/2020-03-25. On connait bien la manie de qualifier les employés occasionnels, temporaires, contractuels ou intérimaires de «réguliers». L’anglicisme est dénoncé depuis toujours (tout au moins depuis les années 1960) mais on l'emploie encore. Québec, la ville, vient-elle de remercier 2000 employés que Radio-Canada, première chaîne, les présente comme des employés «non-réguliers» (25 mars, bulletin de nouvelles de 9 h). Les rédacteurs étaient sur une bonne voie. Ils ont sans doute pressenti qu’ils ne pouvaient pas dire «employés irréguliers». Ils ont trouvé une solution : respecter l’anglicisme «regular» et lui accoler un «non». Ce faisant, ils négligeaient le fait que le mot français, dans le contexte, signifie «ponctuel», «assidu», «constant», et non occasionnel ou temporaire. 

Prendre des marches (2020)

 2020-03-29. On ne demande pas aux professeurs de mathématiques ou de philosophie de faire des leçons de français à leurs étudiants. Leur exemple est cependant essentiel. Il en va de même des administrateurs et des politiques qui retiennent l’attention de l’ensemble de la population ces semaines-ci. Tous ont sans doute entendu le premier ministre inviter, dix fois plutôt qu’une, ses compatriotes à «prendre des marches». On imagine l’importance de la classe : un million d’auditeurs et de téléspectateurs? Pendant ce temps, l’Office de la langue continue de noter que l’expression est une traduction littérale de l’anglais et qu’en français on utilise d’autres expressions idiomatiques : faire des marches, faire des promenades, aller faire un tour à pied, aller se promener. Ces dirigeants font, à un titre, un boulot extraordinaire, mais ils sabotent à l’occasion le travail d’un service de l’État qu’ils servent et représentent.

Lorsque... joint, interrogé, nécessaire, etc. (2020)

2020-03-31. L’emploi d’un raccourci de la forme «lorsque nécessaire», «lorsque utile», «lorsque opportun» est encore critiqué selon le Bon usage. Les dictionnaires de traduction ne rendent pas «My father, when young…» et «the floor is slippery when wet» par «lorsque jeune, mon père… » ou «... glissant si humide». On traduit plutôt par «quand mon père était jeune» et «sol glissant lorsqu’il est mouillé». Aussi peut-on se demander si l’expression «… lorsque possible» publiée dans le message publié ce matin (30 mars, p. 1) dans le Devoir et destiné à ses lecteurs n’est pas à compléter. L’expression est courte, c’est là son avantage. Mais cela reste un calque qu’on peut facilement éviter sans allonger indûment la phrase : «… lorsque cela est possible».

mardi 23 février 2021

Escorte (2021)

2021-02-22 Les nouvelles juteuses sont l'occasions de fourguer aux lecteurs de beaux anglicismes. Qui va s’attarder à la qualité du français dans un article digne d’Allo police? Le titre était « Coupable d’avoir séquestré deux escortes » (Le Soleil, 18 février). Escorte : le mot est français, mais ici on lui donne un sens qu’il n’a pas. Une escorte se compose toujours de plusieurs personnes. La journaliste utilise le mot à sept reprises sans lui adjoindre un seul équivalent. Elle n’a pas réveillé ses dictionnaires ou ses répertoires correctifs. Camil Chouinard, Gilles Colpron, Jean Forest, Lionel Meney épinglent le mot pris au sens de «compagne», d’«accompagnatrice», d’«hôtesse», de «prostituée» et de «dames qui dispensent leurs charmes moyennant rétribution» (M. Rondeau, L’Insidieuse invasion). Le calque de l’anglais masque donc plusieurs fonctions. Et il enrichit peut-être le français!

Embaucher ou engager? (2021)

2021-02-21. Le ministère de la Santé récuse la manchette en Une du Journal de Québec «Il reste 6400 préposés sur les 9500 embauchés» (19 février). Au Ministère, on donne une signification technique au mot « embauchés » (J. de Qc, 21 février, p. 2). De l’extérieur, cela semble du pinaillage. On a retenu 9500 candidats. On les a engagés à un titre ou à un autre : contractuel, intérimaire, occasionnel, saisonnier, surnuméraire, temporaire, vacataire…Plus intéressant est le fait que le mot en cause s’applique avant tout aux hommes ou aux femmes de peine, aux terrassiers, aux débardeurs et qu’on se sert du mot «engager» pour des secrétaires, des employés de maison (Terminologie, Université Laval, no 49). Et sans doute pour des aides-soignantes ! La courte passe d’armes entre le Journal et le Ministère est à renouveler. Le thème : préposée aux bénéficiaires ou aide-soignante ? PAB ou AS ? À pinaillage, pinaillage et demi !

Juridiction ? (2021)

2021-02-20. Ottawa veut s’occuper des francophones hors-Québec. Cela arrive sans doute trop tard. Le mal est fait. Les effectifs ont fondu. Mais bravo ! Comme disait San-Antonio, « Vieux motard que jamais ». Mais madame Mélanie Joly nous serine un bel anglicisme, comme pour participer à la curée. À la question d’un correspondant parlementaire qui lui demandait ce qu’elle pensait d’un restriction de l’accès aux cégeps anglophones, elle répond : « Québec doit agir dans sa juridiction» (J. de Qc, 19 février, p. 12). À la première chaîne, elle a repris la même formule à deux reprises : «… dans notre juridiction…» (20 février, 12 h 15). On note dans un répertoire correctif «juridiction. Anglicisme au sens de compétence, autorité, ressort, territoire, champ d’application ». Comme l’anglicisation se fait petit à petit, un mot à la fois, il serait sage que Madame la ministre se corrige et ne nous passe pas le virus de la nième vague.

Toponymie : Avenue Belvédère (2021)

 2021-02-19. On vient de distribuer un carton publicitaire d’une rôtisserie de Québec . On en donne l’adresse. Avant de la révéler, je me permets la fantaisie de former des toponymes du même style : avenue Montagne, avenue Promontoire, avenue Cap, avenue Pont, avenue Button, avenue Pointe, Avenue Quai, Avenue Cimetière, avenue Couvent, avenue Fleuve… Dois-je continuer la litanie ? Seulement un exemple supplémentaire : avenue Belvédère. Tous les Québécois, une forte majorité du moins, conviendront qu’il doit y avoir un article entre le générique et le spécifique. Donc, avenue de la Montagne…, avenue du Promontoire, etc. Mais pourquoi «avenue Belvédère»? C’est l’empreinte d’une époque et de l’influence des façons de dire anglophones. La rôtisserie n’y est pour rien. Et le comité de toponymie de Québec aime bien conserver quelques petits souvenirs de l’influence anglaise. C’est l’accent d’Amérique!

dimanche 21 février 2021

Convertible ou décapotable ? (2017)

2017.07.02. Un vieil anglicisme surnage encore dans le domaine de l’automobile : «convertible ». Un concessionnaire de Saint-Malachie et de Sainte-Marie (Daniel Paré) lance une invitation aux consommateurs : «Cet été, roulez en convertible » (Le Soleil, 25 juin, p. 17). Il y a un demi-siècle exactement, Gérard Dagenais écrivait «C’est… commettre un anglicisme que de dire convertible au lieu de décapotable. Pour qu’une chose soit convertible… il faut qu’elle puisse devenir autre chose… Une voiture dont la capote peut être repliée reste la même voiture. Elle est décapotable » (Dictionnaire des difficultés de la langue…). C’est limpide. En 1979, Louis-Alexandre Bélisle jugeait que le mot restait à proscrire. En 2015, les éditeurs du Multidictionnaire font la même recommandation. L’anglicisme survit sans doute dans le monde rural frontalier des États-Unis. On peut espérer que le concessionnaire annoncera des «décapotables » à la prochaine occasion.

Le SPOT (2017)

 2017.07.02. Le souci écologique des initiateurs des sympathiques places ouvertes à tous (SPOT) est exemplaire. La troisième édition met de l’avant l’agriculture urbaine. Mais on y néglige l’écologie linguistique. Le chapeau d’un article d’un journal de quartier (Québec Express, 28 juin, p. 3) se lit comme suit : «Le SPOT (Sympathique place ouverte à tous)…». On y écrit «Le SPOT»  alors que l’article «la » s’impose pour l’expression «Sympathique place ». On ne dit pas «le CSN» pour «la Confédération… », ni «le SSJB» pour «la Société… ». Les sigles sont du gendre du mot principal de la désignation. En somme, il faudrait dire «La SPOT » puisque qu’on dit «La Sympathique place… ». (Rév. 19 juin 2018).

Éphémère ? (2017)

 2017.07.02. Il ne faut pas reprocher à un journaliste, encore moins au maire de Québec, de parler des «sympathiques places ouvertes à tous» comme des endroits « éphémères » au lieu de «temporaires »(Le Québec Express, 28 juin, p. 3). Il faut vraiment avoir des loisirs et des soucis langagiers pour douter de l’équivalence des deux adjectifs. Les éditeurs du Trésor de la langue française informatisé distinguent l’utilisation qu’on peut faire de l’adjectif «éphémère» avec des entités concrètes ou avec des entités abstraites. Le mot «place » entre dans la première catégorie. C’est dire qu’il signifierait ici « qui dure vingt-quatre ou quarante-huit heures. Une fièvre éphémère dure deux jours, les insectes éphémères ne naissent que pour mourir. En somme, les places publiques imaginées par les étudiants de l’École d’architecture de l’Université Laval sont des places «temporaires ». On peut souhaiter que l’an prochain, dans un reportage semblable, Monsieur le maire et le reporter feront la distinction.

Tournures: Ça regarde mal (2017)

2017.07.07. Un correspondant prend le temps d’écrire à un chef d’antenne, monsieur S. Bovet, et de lui faire remarquer l’utilisation d’une tournure calquée. Il y a deux jours, il lui a rappelé que l’expression «Ça regarde mal» lancée en ondes était une horreur. Le correspondant a raison. L.A. Bélisle met déjà les Québécois en garde à la fin des années 1970 en le marquant d’un «x» (expression à proscrire du style soutenu). On peut supposer qu’un interviewer de la télévision d’État devrait l’écarter d’autant plus s’il s’adresse à un diplomate retraité. Depuis Bélisle, d’autres observateurs (Meney, 2017; Villers, 2015; Parmentier, 2006) ont épinglé le calque inspiré d’une expression anglaise (« it looks bad»). Il n’est pas aisé pour un Québécois de corriger sa langue maternelle, car on ne l’a pas vraiment apprise, mais on en a héritée. Pourtant, il faudrait se corriger et, donc la réapprendre. 

Inconfortable (2017)

2017.07.15. Le premier ministre fédéral dit souvent «ce pays » pour parler du Canada. Cette habitude lui vient de l’anglais. Il défendit il y a 24 heures le versement de 10 millions $ à Omar Khadr. Il affirma alors «… on ne peut pas … retirer les droits fondamentaux à quiconque dans ce pays» (Le Soleil, 14 juillet, p. 2). Un comité consultatif de l’Université Laval écrit après avoir donné un exemple: «Cet emploi abusif de ‘ce’ là où rien ne justifie le démonstratif, est un anglicisme. Il est possible en anglais de dire : ‘Ce Sénat (il n’y en a qu’un pour tous le pays) attend le projet de loi… Pareil emploi du démonstratif ne passe pas en français» (Les Maux des mots, 1982, p. 28). En somme, si monsieur Trudeau avait mieux appris le français, il aurait dit : «… dans le pays ».

samedi 20 février 2021

Ce pays... ? (2017)

 2017.07.15. Le premier ministre fédéral dit souvent «ce pays » pour parler du Canada. Cette habitude lui vient de l’anglais. Il défendit il y a 24 heures le versement de 10 millions $ à Omar Khadr. Il affirma alors «… on ne peut pas … retirer les droits fondamentaux à quiconque dans ce pays» (Le Soleil, 14 juillet, p. 2). Un comité consultatif de l’Université Laval écrit après avoir donné un exemple: «Cet emploi abusif de ‘ce’ là où rien ne justifie le démonstratif, est un anglicisme. Il est possible en anglais de dire : ‘Ce Sénat (il n’y en a qu’un pour tous le pays) attend le projet de loi… Pareil emploi du démonstratif ne passe pas en français» (Les Maux des mots, 1982, p. 28). En somme, si monsieur Trudeau avait mieux appris le français, il aurait dit : «… dans le pays ».

Activités régulières (2017)

 2017.07.16. Madame Annie Mathieu . Chère madame. Vous avez fait une chose qui me plaît beaucoup dans un de vos reportages («Gérer le trafic maritime… », Le Soleil, 16 juillet, p. 4). C’est l’ajout de guillemets à un anglicisme sémantique employé par la porte-parole du Port de Québec. Vous l’avez citée «… le tout doit être conjugué avec les activités touristiques ‘régulières’ ». Jusqu’à maintenant, vos collègues affirment qu’ils ne peuvent changer un iota des paroles prononcées par un témoin puisque tous les échanges sont enregistrés. De votre côté, vous avez identifié l’expression fautive «régulières » en la guillemetant. Il vous reste à faire un pas supplémentaire : suggérer les bonnes solutions. Dans le contexte : «courantes », «ordinaires» «habituelles», peut-être «quotidiennes » ou «hebdomadaires ». Il reste cependant que l’identification de la faute est un pas des plus importants.

Food truck (2017)

 2017.07.23. Les locuteurs conscients de la nécessité que les langues s’enrichissent à la suite d’efforts internes et selon les règles propres à chacune seront heureux de voir que l’expression «camion-restaurant » s’impose petit à petit. Il y a trois ans, les «food trucks» occupaient le paysage médiatique. Les habitudes ont changé. Les journaux québécois donnent maintenant la manchette aux «camions-restaurants» même si les auteurs des articles utilisent encore l’expression anglaise à l’occasion. Il ne semble pas qu’il en aille de même au Nouveau-Brunswick. On lit dans la livraison du 20 juillet de l’Acadie Nouvelle la manchette : «Les food trucks devraient être au menu des municipalités… » (p. 3). L’expression apparaissait dans les premiers mots du chapeau de l’article et dans le texte par la suite. Mais des expressions françaises y apparaissaient également (restauration rapide, restaurateurs mobiles, restaurants mobiles, camions-restaurants). Souhaitons que les hésitations des journalistes francophones de l’Acadie ne renversent pas la tendance observée en pays québécois.

Chainsaw (2017)

2017.07.27. On lit dans le Soleil du 25 juillet (p. 25) la manchette « Une attaque à la scie à chaîne ... en Suisse ». La nouvelle a été transmise de Berlin par l’American Press. C’est dire que les traducteurs vers le français ont rendu «chainsaw » par «scie à chaîne». Exercice des plus faciles. Chose intéressante, l’OQLF relève que le mot «tronçonneuse » porte à confusion en Amérique du Nord. La tronçonneuse y prend deux formes : un engin ou une machine-outil. Pour l’heure, en Europe, on applique l’expression tant à l’engin qu’à l’outil. Les Suisses, et les Européens, ont entendu parler d’une attaque à la tronçonneuse. La distinction suggérée par l’Office est justifiable. Les Québécois pourraient en tenir compte. Le calque permet d’éviter le mot anglais. Mais il faudra convaincre les autorités langagières de la Francophonie d’en tenir compte également.

Rue Principale (2017)

2017.07.30. L’Estrie porte la marque de son histoire. La venue des Loyalistes américains a laissé des traces normales dans la toponymie : les «Main Street». Le nom anglais de la principale rue d’un village ou d’une ville est souvent devenu «rue Main » ou, ce qui n’est pas mieux, «rue Principale ». On recense encore une quarantaine de « rue Principale » dans la région. On note cependant une heureuse tendance à remplacer le toponyme bâtard par des noms de personnalités ou de lieux géographiques. Ainsi la « rue Principale » de Compton s’appelle maintenant «rue Louis-S. Saint-Laurent ». Une autre, à Marston, est devenue « rue de la Grosse-Roche ». Les efforts en ce sens sont à poursuivre. D’abord, en raison de la mise en lumière de l’histoire, de personnalités et de phénomènes locaux; ensuite, afin de respecter des pratiques toponymiques à la française. On pourra toujours affirmer que la rue principale de Compton est la rue Louis Saint-Laurent, mais on ne dira plus « rue Principale ». La ville pourrait aussi adopter une façon française de dire : Grand’rue ou Grande-Rue.

Ce vendredi (2017)

 2017.07.31. Si l’on est le 31 juillet et que la fin de la compétition est fixée au samedi qui suit, il n’y a aucune raison d’écrire, comme le fait Guillaume Rosier dans Info Portneuf: «Cette épreuve... hors du commun se terminera CE samedi ». Le remarqueur Paul Roux, à qui on avait demandé si l’emploi de l’adjectif démonstratif dans le contexte était du bon français, a répondu : «… l’emploi de l’adjectif démonstratif est une tournure influencée par l’anglais. ‘Voyez l’émission X ce vendredi’ (this Friday). Comme il n’y a qu’un vendredi dans la semaine, le démonstratif est considéré comme inutile ici» (La Presse, 30 avril 2006, p. 16). Camil Chouinard avait relevé la même façon de dire en 2007 (1500 pièges du français parlé et écrit ; 3e éd.) et #Guy Bertrand, trois années plus tard, a rédigé une excellente capsule sur le sujet (400 capsules linguistiques, vol. 2, p. 195). Les professionnels de l’écriture n’ont aucune raison de succomber à la pratique douteuse mais généralisée.

vendredi 19 février 2021

Fatbike (2016)

 2016.12.21. Des solutions de rechange à l’expression « fat bike » existent depuis quelques années. Jean-Philippe Martin, le chroniqueur des sports à la 1e Chaîne de Radio-Canada Québec en est encore à multiplier l’expression anglaise (21 décembre, 16 h 45) et à ignorer « vélo tout terrain » ou, s’il faut être plus précis, « vélo à neige » ou «vélo des sables» ou encore « véloneige» (on a déjà autoneige et motoneige). Pour le journaliste, l’expression anglaise semble plus compréhensible que les équivalents français pour l’auditoire de la capitale. Une telle interprétation est incompréhensible de la part d’un employé de la chaîne. Les néologismes américains inondent le marché, on le sait. On éprouve de la difficulté à leur trouver tout à trac des équivalents. Mais quand des équivalents sont proposés (par Termium, par exemple), les journalistes francophones devraient les apprendre, les intégrer et s’en servir au besoin. Si cela est nécessaire, Radio-Canada devrait proposer à ces derniers une séance de perfectionnement hebdomadaire ou mensuelle. Le français s'apprend à tout âge.

Talk show (2016)

2016.12.02. Un journaliste du Soleil présente une émission qui sera à l'horaire de la télévision de Radio-Canada l’été prochain (2 décembre, p. 33). Il ne connait qu’une expression pour la qualifier : un talk-show. Il utilise le mot à quatre reprises sans trouver un seul équivalent français. Il pourra exciper du fait que l’Office juge l’expression anglaise acceptable et qu’on la place en première place avant «émission causerie », avant «interview-variétés», avant «infovariété», etc. Mais il y déjà là une possibilité d’aligner quelques synonymes. France Terme propose, depuis 2005, «débat-spectacle» et «émission-débat». Un correspondant suggère «propos-vision». Un autre néologisme a été lancé au cours des ans : «conversade ». Les propositions ne manquent donc pas. Il est un élément important à retenir : les journalistes devraient, devant les mots anglais qu’on est forcé d’importer, faire connaître au lectorat des solutions de rechange, s’essayer eux-mêmes à la néologie et lancer des ballons d’essai. Cela fait partie de leur champ de compétence. 

Inventaire ? (2016)

 2016.12.03. La Vie sportive se paye un placard publicitaire dans le Soleil du jour (3 décembre, p. 5). L’accroche : « Le plus grand inventaire dans l’Est du Québec ». Un inventaire n’est pas le stock en français. La note du Multidictionnaire est fort limpide à cet égard : «… le terme inventaire ne peut désigner que le dénombrement… et le document qui en résulte. C’est sous l’influence du terme anglais ‘inventory’, qui, outre les acceptions du français, désigne également les marchandises en magasin, que l’on emploie improprement le nom inventaire en ce sens». On pourra exciper du fait que l’anglicisme sémantique est fort courant et très difficile à déceler. Le mot existe bel et bien en français, mais pas dans le sens qu'on lui donne en anglais. Tous les locuteurs n'en sont pas conscients, mais les publicitaires devraient le savoir et être en mesure de choisir le bon mot le moment venu

Pantalons ou Pantalon ? (2016)

 2016.12.10. Depuis quelques semaines, Le Devoir présente un message publicitaire : « Le Devoir mobile, maintenant dans vos pantalons» (un seul personnage illustre le placard). Il y était encore dans la livraison du 8 décembre (p. A 2). Pourquoi écrire «vos pantalons »? Gérard Dagenais, linguiste québécois mort en 1981, écrit : « Dire ‘une paire de pantalons’ au lieu d’ ’un pantalon’, c’est s’exprimer de façons incorrecte. Le fait que les mots anglais qui désignent toute pièce de vêtement pour une personne du sexe masculin ou du sexe féminin nommé PANTALON en français sont toujours pluriels (trousers, pants, slacks) exige des Canadiens qu'ils se défendent constamment contre la tentation de dire ‘mes pantalons’ au lieu de ‘mon pantalon’ » (Dictionnaire des difficultés…, 1967). Le quotidien, ses publicitaires et ses réviseurs n’étaient pas sur leurs gardes quand le message leur a passé sous les yeux.

Tasse à mesurer (2016)

2016.12.24. Que dirait-on aujourd’hui? Voici six expressions relevées par Jean Forest en 2006 : «… expressions anglaises que le français ne partage pas… «horloge grand-père»… «bibittes à patates»… «charrue à neige » (pour les labours d’hiver), «habit à queue»…, « ça regarde mal » (vous avez les yeux croches?), « tasse à mesurer… » (Les Anglicismes de la vie quotidienne des Québécois; Triptyque, p. 137). Les solutions proposées à l’époque par le professeur de l’Université de Sherbrooke sont Horloge comtoise ou normande, Doryphores, Chasse-neige, Habit de grande cérémonie, C’est de mauvais augure, Pot gradué. Le professeur Meney de son côté propose : Horloge de parquet, Verre gradué ou verre mesureur et se montre sensible à l’expression populaire « bibitte à patates ».  C'est dire que nous avons encore beaucoup à apprendre.

Casting (2016)

 2016.12.17. La journaliste Chantal Guy de la Presse aime bien parsemer ses articles de mots anglais. Souvent ils sortent de la bouche d’une vedette (top 10, breaker, fun, on, focus). Mais elle-même y met son grain de sel : «casting » (Le Soleil, 16 décembre, p. 33). Madame Guy utilise le mot à deux reprises et, dans un cas, lui donne un sens qu’il n’a pas en anglais. On retrouve les expressions «agents de casting » et « aller au-delà du casting qu’on lui – Antoine Bertrand - destinait ». On peut accepter la première (chargé de la distribution ou, si l’on tient au mot anglais, du casting). Mais c’est pousser le bouchon un peu loin que de destiner un casting à un comédien, c’est-à-dire un rôle. Nos journalistes ne se contentent pas de publiciser des mots anglais évitables en français, ils en élargissent le sens. Les lecteurs de la Presse (et des journaux associés) devraient lui offrir un petit «casting» à l’occasion de Noël!

Monétaire ou pécuniaire ? (2016)

2016.12.16. On fait mal la distinction entre le mot «monétaire » et les mots du voisinage, « financier » ou « pécuniaire ». Un comité de l’Université Laval a alerté ses employés vers 1975 à la distinction à faire : l’adjectif monétaire « s’applique à ce qui est relatif à la monnaie nationale… Un particulier est, par contre, sensible aux avantages pécuniaires que lui vaut sa situation professionnelle » (Les Maux des mots, 1982). La remarque vaut aussi pour les entreprises et pour les dépenses des États. Aussi quand un journaliste du Devoir écrit : «L’obstacle le plus fréquent chez les entreprises … est d’ordre monétaire » (16 décembre 216, p. A 7, 2e col.), il donne un sens au mot qu’il n’a pas. Les Québécois masquent bien leurs anglicismes. Ils en font de parfaits quidams. Un tel talent manque aux cousins français. 

C'est-tu normal ? (2016)

 2016.12.15. Est-ce normal qu’un ministre québécois dise : « C’est-tu normal? »? Et est-ce acceptable que le Devoir fasse un intertitre de l’expression? (Le Devoir, 15 décembre, p. A 8, 4e et 5e col.). Le ministre Lessard fait partie d’un gouvernement qui appuie les efforts de l’Office québécois de la langue. Lui et ses collègues doivent savoir qu’il leur faut utiliser une langue soignée lorsqu’ils remplissent des fonctions étatiques. Ils ont bien sûr le choix, quand ils sont avec leurs familles, avec des commensaux habitués ou avec des copains, de s’en tenir à un niveau familier, populaire ou archaïque. Mais s’ils s’adressent aux médias, s’ils parlent à leurs collègues du parlement, ils devraient s’en tenir au registre soigné. L’OQLF pourrait rappeler cette règle à la représentation nationale. Pour leur part, les conseillers en matière de protocole pourraient les sensibiliser à l’exigence. Le Devoir reproduit l’expression plutôt que d’écrire : «Est-ce normal?» Était-ce essentiel?

Mettre l'épaule à la roue ? (2016)

2016.12.12. « Pousser à la roue », telle est la manchette d’un article du Devoir (8 décembre, p. B-7). Il y a belle lurette que la tournure franglaise («mettre l’épaule à la roue = to put one’s shoulder to the wheel ) est montrée du doigt. L’Association pour le soutien… de la langue française - Asulf - la dénonce depuis 2010 auprès de la ville de Donnacona qui en a fait sa devise. En français, on a le choix entre plusieurs expressions : donner un coup de main, mettre la main à la pâte, s'atteler à la tâche et celle tirée du Devoir. Mais le calque de l’anglais reste généralisé en dépit des mises en garde et des recommandations (Multidictionnaire…, Banque de dépannage linguistique, le Français au micro…). Il faut féliciter le titreur qui a mis sous les yeux de quelques milliers de lecteurs l’expression «Pousser à la roue ». Elle s'applique on ne peut mieux au spectacle annoncé. Cependant, une hirondelle ne fait pas le printemps. Les militants du bien-dire ont encore du travail à faire s’ils veulent qu’elle vienne instantanément à l’esprit des locuteurs francophones.

Maintenance ou Entretien ? (2021)

2021- 02-18. Faut-il semoncer le ministre de l’Énergie ou tout au moins l’informer que le mot «maintenance» est un anglicisme pris au sens d’«entretien»? Réagissant à une proposition de conservation de deux bâtisses de l’ancien jardin zoologique, abandonnées depuis une quinzaine d’années, le ministre a déclaré « «Leurs coûts de maintenance et de mise à niveau…» (Le J. de Qc, 18 février, p. 23). Le mot est français mais on ne peut l’appliquer à des bâtisses abandonnées. La maintenance implique réparation, par exemple du système de ventilation, du chauffage, de l’éclairage, etc. Ce qui fait dire à Gérard Dagenais (1967) «On commet un anglicisme chaque fois que l’on se sert du mot… à la place d’entretien … ». Le journaliste aurait sans doute pu gommer l’anglicisme et le remplacer. Le ministre aurait sans doute applaudi étant donné que, ce faisant, il aurait respecté les définitions du Grand dictionnaire terminologique de l’État (OQLF).

À date ? (2021)

 2021-02-17. Une langue ne disparaît pas, dit-on, parce qu’on la parle mal. Elle disparaît si ses locuteurs passent à une autre langue petit à petit. Mais l’abandon de mots ou d’expressions et leur remplacement par des équivalents d’une langue concurrente n’en serait-il pas un signe avant-coureur? Le public de Midi info aura entendu dans les premières minutes de l’émission du 17 février (11 h 30 ) «juridiction» (au sens de compétence sans doute) et «à date» . Cette dernière locution est dénoncée, depuis deux décennies, par les conseillers linguistiques de la médiasphère (P. Roux, 1997; G. Bertrand, 1999; C. Chouinard, 2001). Si les journalistes n’ont pas la volonté d’employer les expressions idiomatiques du français (jusqu’à maintenant, jusqu’ici, à ce jour, etc.), comment pourrons-nous juguler le phénomène global de l’anglicisation?

Être sur un comité? (2021)

 2021-02-16. Un quidam raconterait à des collègues qu’il «était sur un comité», on pourrait le lui pardonner. On pourrait quand même essayer de lui expliquer qu’il «était membre d’un comité» ou qu’il «faisait partie d’un comité». Mais comment accepter qu’une professionnelle des communications et de la langue, face à des milliers de téléspectateurs, utilise la tournure calquée sur l’anglais ? (24 / 60, 16 février, 19 h 42). Normalement, les expressions courantes en français devraient fuser spontanément. Il est vrai que nous drainons nombre d’expressions calquées. Les «outils» ne manquent pas à qui veut les corriger. Guy Bertrand a rédigé des billets sur le sujet à l’intention de ses collègues de Radio-Canada. Un de ses prédécesseurs, Camil Chouinard, a fait de même. Et il y a des ouvrages généraux également. En somme, il n’y a pas d’excuses. Il faut apprendre à utiliser les expressions idiomatiques françaises et à les décliner à l’auditoire du réseau.

Des banlieues? (2021)

2021-02-15. L’anglicisation est souvent illustrée par des données démographiques, parfois par des emprunts inutiles, par la malformation d’abréviations et même par la confusion entre le singulier et le pluriel. Jean Darbelnet a identifié quelques spécimens de ce dernier groupe. «Banlieue» en est un. Le mot est un collectif qui désigne la totalité des agglomérations d’une grande ville (Multi dictionnaire). Il a des synonymes : périphérie, couronne. La ville de Québec ne peut avoir qu’une périphérie, couronne ou banlieue. Le mot correspondant en anglais s’écrit «suburbs». Le démarquage s’explique. De là la manchette «Des banlieues mieux couvertes» (Journal de Qc, 15 février, p. 40) et l’utilisation du mot à TVA Nouvelles (17 h 40). Il faudrait arriver à l’éviter.

jeudi 18 février 2021

Tiguidoo ! (2016)

 2016.12.07. Jean Forest a recensé près de 400 exclamations dont un grand nombre provient de l’anglais (Anatomie du Québécois; 1996). De ce groupe fait partie « Wow! » qui se rend en français par «Ouah!». Il en a déjà été question ici. Il y a aussi «Tiguidoo » utilisé par un correspondant Facebook. On retrouve l’exclamation dans le Petit Robert sous la forme « Tiguidou», datée de 1976. On n’en précise pas l’origine et on en fait un régionalisme canadien familier. Léandre Bergeron (1980) présente l’interjection sous deux formes : «diguidou» et «tiguidou». Forest lui reconnaît la même orthographe francisée. Lionel Meney l’a inscrite dans son dictionnaire québécois-français (1999) sans indiquer d’origine. Personne ne semble en mesure de lui délivrer un acte de naissance. On peut cependant lui reconnaitre une une allure québécoise sous sa forme francisée. Mais on peut aussi l’entourer d’un certain nombre de synonymes : Entendu, Tope là! Très bien, Parfait, etc.

Levée de fonds ? (2016)

 2016.12.06. Simples locuteurs, nous sommes tous responsables de la qualité de la langue. Qu’est-ce à dire? On lira dans le Devoir du jour (6 décembre, p. A 4) deux phrases, l’une de la députée fédérale Alexandra Mendès et l’autre de la chef du Parti vert. D’abord, celle de madame Mendès : « … vendre son âme pour lever des fonds ». Puis, celle de madame May : « … prendre des marches sous la pluie». Deux calques de l’anglais. En français, il faudrait dire… pour se financer, pour garnir sa cagnotte (dans le premier cas). Dans le second : faire une ou des marches… Les deux femmes politiques ont le mérite de s’être exprimées en français, mais elles ont répété ce qu’elles entendent tous les jours des locuteurs québécois et francophones. De là, la responsabilité qui nous incombent tous: donner l’exemple et même sensibiliser l’entourage à l’emploi des expressions recommandées par les autorités langagières (OQLF, le Français au micro, etc.).

À date (2016)

2016.12.08. Le Devoir et sa correspondante parlementaire à Ottawa reproduisent deux anglicismes de l’ancien premier ministre canadien Mulroney (7 décembre, p. A 8, 6e col.) : «locker-room talk» et «à date ». On détecte d'instinct le premier et les Québécois un tant soit peu familier de l’anglais savent le rendre en français sans trop d’hésitations : propos de vestiaire par exemple. Mais le deuxième est beaucoup plus difficile à détecter. Même les correcteurs du journal l’ont laissé passer sans le marquer. On l’entend d’ailleurs souvent. Il à une allure française. On écrit dans le site web de Banque de dépannage linguistique (OQLF) : « si on veut indiquer que le moment où l’on parle constitue une limite dans le temps, on peut utiliser les locutions à ce jour, jusqu’à présent, jusqu’à maintenant ou jusqu’ici». Le calque de l’anglais donnera plus de fil à retordre que « locker-room talk ». 

mercredi 17 février 2021

Membre régulier (2018)

 2018-09-26Un membre veut proposer une énumération des catégories de membres à prévoir et à bien nommer au sein d’une association. Il a en tête « Membre en règle » et « Membre honoraire ». Il veut éviter l’anglicisme « Membre régulier ». Une consultation rapide montre que les répertoires correctifs, règle générale, ne relèvent pas le problème. Ainsi, les collaborateurs de l’Expression juste (www.asulf.ca) consacrent seize articles au mot « régulier » de 1987 à 2018 sans l’aborder. Les fiches d’adhésion portent : Partenaire et Sociétaire… Lionel Meney note que « membre en règle » est un calque à l’égal de son compère. La Banque de dépannage de l’OQLF donne l’exemple « L’association comprend les catégories de membres suivantes : membres ordinaires, membres associés, membres observateurs et membres bienfaiteurs ». Jean Darbelnet (1986) propose : membre adhérent, membre bienfaiteur, membre d’honneur, tout en reconnaissant que d’autres énumérations sont possibles. Le Robert aligne quatre exemples : Membre actif, honoraire, fondateur, perpétuel (2007). Somme toute, trois possibilités de voisinage avec « membre honoraire » : membre actif, membre adhérent, membre ordinaire.

Statut Facebook? (2018)

 2018.09.28. San-Antonio a écrit « entre deux mots, il faut choisir le pire ». Parfois, on a l’impression que voilà le leitmotiv de certains titreurs. On lit dans le J. de Q. (28 septembre, p. 12) la manchette « Un juré récusé après un statut Facebook ». La pigiste n’utilise pourtant pas le mot « statut » dans son article. Elle parle tout simplement de « commentaires ». Le mot convient beaucoup mieux en la circonstance que son concurrent. Un statut est un recueil de lois, une situation sociale dans la société ou encore le règlement constitutif d’un groupe. L’OQLF reproduit le mot et le définit comme l’information qu’un internaute punaise sur son babillard et que ses correspondants peuvent consulter à distance en tout temps. On ne critique pas le mot; on ne l’approuve pas non plus. On n’aime pas affronter le raz-de-marée de « statuts », même s'il est éloigné de « commentaire », « message », « communiqué », « note » ou « circulaire » et même s’il est inutile.

Dernier droit ? (2018)

2018.09.27.  Note adressée à Monsieur Guy Bertrand. On entend souvent sur les ondes de Radio-Canada l’expression « dans le dernier droit ». François Cardinal s’en est servie ce soir (27 septembre, vers 19 h 55, au 24/60). Votre équipe devrait étudier l’expression et proposer des solutions de rechange tant aux animateurs du réseau qu’à ses invités. On devine bien qu’on ne dirait pas « dans le dernier courbe » ou « dans le dernier étape ». Si on n’avise pas les invités et les journalistes que l’expression est inacceptable, ils la répéteront et l’auditoire, à son tour, la fera sienne. La banque de dépannage linguistique publie une fiche dans son site : « L’expression dernier droit... est utilisée uniquement au Québec. Ailleurs dans la francophonie, on emploie plutôt dernière ligne droite. On peut penser que l’emploi de «droit» (qui n’a pas le sens de « ligne droite » en français) est influencé par l’anglais… ». Paul Roux l’avait relevée dans sa chronique du 22 janvier 2006 (La Presse, p. 16). Des conseils de votre part sur le sujet à l’intention de vos spécialistes s’imposent.

Faire sortir le vote (2018)

 2018-09-20. Les auditeurs de la première chaine (Québec) ont entendu le chef d’antenne C. Bernatchez reprendre une expression calquée sur l’anglais : « faire sortir le vote » (8 h 57, 20 septembre). Selon deux linguistes de l’Université de Sherbrooke, il ne faudrait pas dénoncer une telle expression sous le prétexte qu’elle est un calque. Donnons une bonne raison : elle constitue un contresens. Les partis politiques veulent que le vote s’exprime, que les bulletins entrent dans les boîtes de scrutin, que les électeurs se rendent aux urnes. Pour cela, ils incitent la population à voter, à donner leur opinion, à exprimer leur choix. Il ne faudrait surtout pas qu’ils fassent « sortir » le vote. Au demeurant, les urnes sont cadenassées afin d’empêcher les bulletins de prendre la clé des champs. Le politologue Bernatchez serait justifié de mettre la tournure au rebut puisqu’elle n’a pas de sens. Peu importe son origine!

Tailgate (2018)

 2018-09.18. Il est de notoriété publique que les campagnes militaires ou, même, les campagnes électorales ne sont pas les occasions idéales pour consulter les répertoires correctifs. Le Parti Québécois lance une invitation à ses membres. « Invitation au Tailgate … / … l'Équipe … de Jean-Talon invite tous les militants de la Capitale nationale à se regrouper au Tailgate d’avant-match… » lit-on dans le courriel distribué à 8 h 5 le 19 septembre. Le mot « tailgate » a un équivalent français : « Avant-match » ou « fête d’avant-match ». Les équipes en lice pour les députations à l’Assemblée nationale doivent avoir le sens de l’État et accepter les recommandations de ses services. L’Office a étudié le cas de l’américanisme et propose des solutions de rechange : « fête d’avant-partie » et « fête d’avant-match ». On voit parfois le raccourci « avant-match ». Le P.Q. envisage la rédaction d’une loi 202 et ses adversaires ont également des visions face à la qualité du français. La campagne électorale serait un bon moment de montrer sa sensibilité langagière.

Rue de Lévis ou Rue Lévis? (2018)

2018.09.10. Quand Claude Bernatchez répète à trois reprises (1e chaine de Radio-Canada, Québec, 10 septembre, 8 h 15) « rue de (ou De) Lévis », il ne dit pas s’il prononce une minuscule ou une majuscule! Le détail est pourtant important. La majuscule suppose que le toponyme honore François-Gaston de Lévis. À l’opposé, la minuscule indiquerait que l’artère mène à une ville nommée Lévis (comme on disait « chemin de Sainte-Foy dans un passé lointain). La règle de la Commission de toponymie peut être utile à l’écrit. Mais elle est tout à fait inutile à l’oral. À moins que l’animateur précise « rue – majuscule – De Lévis » ou « rue – minuscule – de Lévis ». On a crû faire œuvre utile en distinguant deux réalités par une mince règle typographique. Il aurait été trop simple de s’en tenir à « rue Lévis » ou à inscrire le nom au long (rue François-Gaston de Lévis). Les auditeurs comprendraient mieux à qui ou à quoi renvoie le toponyme, à une personnalité ou à une ville. 

Quitter (2018)

 2018.09.09. Il y a deux attitudes possibles face à l’expression « Madame a quitté ». Au lieu de « … vient de partir ». On lit dans LeMorisset.com : « L’utilisation du verbe quitter sans complément d’objet direct …est tout à fait correcte. ... cette forme est décrite à tort par certaines sources comme « vieillie » ou « fautive ». Or, le Larousse en ligne la présente simplement comme « familière… ». Et dans le Multi dictionnaire, on note : « Au sens de s’en aller, partir’, la construction intransitive (il a quitté » est vieillie. On emploiera plutôt les expressions … : il n’est pas au bureau ou il vient de partir… ». On ajoute, quelques lignes au-dessous, « FORME FAUTIVE : Quitter. Anglicisme au sens de démissionner ». Or, Gilbert Lavoie écrit : « poste laissé vacant par un ingénieur qui vient de quitter » (Le Soleil, 10 septembre, p. 7, 1e col.). Bref, deux attitudes, mais il faut choisir celle qui convient le mieux à sa sensibilité.

Prix régulier ? (2018)

 2018-09-08. Les factures du service de diffusion culturelle de Lévis reproduit une colonne sur ses factures dont le titre est « Prix régulier ». On comprend aisément qu’un simple locuteur tombe dans le panneau et utilise l’expression. La faute est inexcusable quand elle est le fait d’une administration municipale et d’un service culturel. On succombe trop souvent aux facilités de la traduction littérale de l’anglais « Regular price ». On ne contre-vérifie pas les sens respectifs des mots « régulier » et « regular ». Ce dernier a le sens de « courant » ou d’«ordinaire » contrairement au mot français. Une consultation rapide du Multi dictionnaire ou du Français au bureau devrait convaincre les administrateurs qu’il faut écrire « Prix courant ». Si cela ne suffit pas, on se reportera à la Banque de dépannage de l’OQLF : « … lorsqu’on l’utilise dans le sens de « courant », « ordinaire » … l’adjectif régulier est un anglicisme sémantique, puisqu’on lui prête alors le sens de l’adjectif anglais regular. On peut alors le remplacer, selon le contexte, par des adjectifs comme ordinaire, … courant… ». Les préoccupations culturelles justifient la correction.

Trouvé coupable ? (2018)

 2018.09.05. F.B., un auditeur régulier et constant de Radio-Canada, se fait remarqueur à toutes les bonnes occasions qu’on lui fournit. Il vient de s’adresser à Sébastien Bovet et lui a fait remarquer qu’il ne devrait pas dire « trouvé coupable ». Il a raison, mais il ne propose pas de solutions de rechange. On peut supposer qu’un animateur expérimenté saura trouver une bonne façon de dire. Mais s’en donnera-t-il la peine? En toute simplicité, il faudrait lui souffler des recommandations : « déclaré coupable », « reconnu coupable », « jugé coupable »… Il serait bon également de lui expliquer le dérapage : les Québécois traduisent littéralement l’expression anglaise (found guilty) et négligent les expressions françaises. Par ailleurs, il ne faut pas hésiter à relever les conseils du langagier de la maison, lequel écrit : « On peut dire que la police a trouvé le coupable, mais il est abusif de dire qu’une personne a été trouvée coupable… ».

Temps supplémentaire (2018)

 2018-09-06. Madame McCann. Vous êtes candidate à l’Assemblée nationale et, par le fait même, au conseil des ministres. Vous deviendrez de facto une porte-parole de l’État québécois. C’est dire qu’il ne faudrait pas aller à l’encontre des conseils qu’on y formule, même en matière de langue. Vous drainez avec vous les mots habituels du milieu qui fut le vôtre. Tel est le cas de l’anglicisme « temps supplémentaire » (Le Soleil, 6 septembre, p. 8). Cela s’explique : le mot anglais « overtime » conduit tout naturellement aux calques « surtemps » et « temps supplémentaire ». Une fois élue à une députation ou nommée au sein du ministère, vous devriez choisir en principe les mots recommandés par les autorités linguistiques de l’État, l’OQLF en particulier. Donc « heures supplémentaires » idéalement.

Joueur régulier ? (2018)

 2018.09.04. Les titreurs des médias corrigent parfois à tort les traducteurs des reportages d’agences étrangères. Celui du Soleil vient de pondre « De curiosité à régulier » (4 septembre, p. 40). L’article est consacré à David Onyemata, un joueur de football d’origine nigériane qui s’impose chez les Saints de la Nouvelle-Orléans. Au départ, il était occasionnel ou remplaçant. Il est devenu « régulier » selon le titreur. Pourtant l’auteur ou le traducteur ont eu la sagesse de parler de sa promotion au sein de l’alignement de départ de l’équipe et même de « partant ». Pour sa part, le titreur n’a pas encore fait siennes les observations des remarqueurs et des langagiers, celles de la Presse canadienne (Guide de rédaction…, 2006), celles du Multidictionnaire… (2018). À sa décharge, il y a lieu de souligner que la fautes est « universelle » au Québec.

À date ? (2018)

2018.09.01. Les langues sont en Occident objet de préoccupations et de discussions. Certains Québécois s’en prennent à de nombreux calques ; « dernier droit » (au lieu de dernier sprint…), « pour faire une histoire courte » (somme toute…), « à date » (jusqu’ici…). J’ai déjà commenté les deux premiers dérapages. Je trouve le dernier sous la plume du chroniqueur Y.F. Blanchet : « La plupart des autres enjeux abordés à date… » (Le Soleil, 1er septembre, p. 36, 2e col.). Tous les répertoires correctifs notent : calque de l’anglais « up to date ». Les Québécois sont-ils les seuls à s’en prendre à des telles écarts avec les idiomatismes de leur langue? La question se pose : quelle serait l’attitude des anglophones devant un de leurs concitoyens qui dirait « Hard of the leaf » (plutôt que Hard of hearing sur le modèle du français Dur de la feuille), « Whitout shouting station » (… Without warning… Sans crier gare) ou encore « To buy in big » (…To buy wholesale… Acheter en gros)? Les exemples énumérés par le grammairien buissonnier J.L. Chiflet (Sky my husband! The integrale = Ciel mon mari!...; Points, 2008) sont tirés par les cheveux mais ils laissent entrevoir que le phénomène des calques et leur dénonciation n’est pas limité au Québec.

mardi 16 février 2021

Tailgate (2017)

 2017.09.14. On ne peut reprocher à l’Université Laval de négliger les entourloupettes pour annoncer les #avant-matchs et les «tailgates ». L’affiche porte, en gros caractères, «Les avant-matchs de football des diplômés » et la légende reprend les mêmes mots. Mais la manchette ou surtitre du message reste « Le tailgate officiel des diplômés de l’UL ». C’est d’ailleurs cette dernière manchette qu’il faut cliquer dans CyberContact de la faculté des sciences sociales (daté de septembre) pour parvenir à l’affiche rédigée en français. En somme, on fait une affiche en français mais pour y arriver il faut passer par l’anglais. Et rien n'explique l'utilisation du pluriel en français et le singulier en anglais.

Joindre une équipe ? (2017)

 2017.09.15. On peut être sensible à la qualité de la langue et utiliser des formes fautives sans s’en rendre compte. Ces derniers jours, c’était le 14 septembre, la Fondation de l’Université Laval a fait publier dans les journaux un message publicitaire invitant les citoyens à «joindre une équipe… ». La formule exacte était : « Joignez une équipe performante ! ». Les Québécois sont trop souvent soumis au matraquage de la formule, à son aspect correct au premier abord, pour s’en méfier illico. Seul le doute systématique et la contre-vérification révéleront le guet-apens et, donc, la correction qui s’impose : «Joignez-vous à une équipe ». Il est compréhensible que le voisinage de l’anglais «Join a team » déteigne sur la langue maternelle des Québécois et inspire un calque difficile à repérer et à remplacer.

Oeuvrer (2017)

 2017.09.17. L’instinct de sa langue maternelle permet de percevoir des nuances entre deux notions. À l’occasion d’un reportage réalisé aux Jardins de Quatre-vents, le journaliste N. Provencher écrit : «Raynald Bergeron … y œuvre depuis 35 ans», enchaîne avec l’observation de la propriétaire («Il a travaillé… avec mon père») et précise : «… une vingtaine de résidents de Charlevoix tirent des revenus de leur travail aux Jardins…» (Le Soleil, 17 sept. p. 6, 3e col.). Le verbe «Œuvrer » s’est éloigné du sens courant de travailler, il a pris celui de « travailler à quelque chose de noble », souvent par conviction, bénévolement, par dévouement, par altruisme. Sans doute peut-on élargir la notion à une personne rétribuée, mais travaillant avec enthousiasme et passion pendant trois décennies!

Place Bell (2017)

 2017.09.24. On peut se demander comment Laval, la ville, réussira à se dépêtrer de la confusion de langage qui voudrait que Place Bell soit une place. Le site internet présente ainsi la supposée «place » : «complexe multifonctionnel culturel et sportif… / … sert d'amphithéâtre …transformable en salle de spectacle … de patinoire olympique … / de patinoire communautaire… / … On y retrouvera également un secteur commercial … / Elle comporte un stationnement intérieur et est construite … dans le quadrilatère bordé par les boulevards de la Concorde et Le Corbusier ainsi que les rues Claude-Gagné et Lucien-Paiement ». On notera aussi que les photos de l’inauguration se limitent à des patinoires, à des salles de spectacles, à des scènes, à une œuvre d’art. Nulle photo de la place annoncée. En somme, si le site internet de la ville est fidèle, on a affaire à un quadrilatère ou à un quartier spécialisé. La place imaginée au départ semble occupée par un complexe culturel, sportif et commercial. La place est sans doute cachée sous le béton! (voir «https://www.laval.ca/…/amphitheatre-de-la-place-bell-et-cit…».

Fournaise (2017)

 2017.09.23. Le monde publicitaire a un impact important sur la qualité de la langue. Ses messages sont diffusés dans de nombreux foyers à l’égal des médias. L’annuaire des Pages jaunes (Québec et environs), tant l’édition datée d’octobre 2016 que celle de 2017 distribuée ces jours-ci, offre dans la chronique Trucs et astuces une fiche intitulée «Quelle FOURNAISE pour votre maison?» (2016) et «Vérifiez votre FOURNAISE… » (2017). Le mot s’est généralisé en Amérique francophone sous l’influence du mot anglais «furnace ». Les auteurs de dictionnaires l’ont relevé périodiquement depuis 1909 (Dionne). On lui fait la chasse depuis. Un collaborateur de l’OQLF, L.P. Béguin, le dénonça en 1974. L’OQLF (2016) privilégie toujours l’équivalent «chaudière» mais ouvre la porte au calque, puisqu’il s’intègre au système linguistique français et qu’il est généralisé. Il met le drapeau dans ses classeurs et n’ira plus aux créneaux pour défendre «chaudière ». Les locuteurs, eux, peuvent encore le faire : modernisation et enrichissement de la langue justifient leur démarche.

Copies ou exemplaires ? (2017)

2017.09.22. Si vous étiez reviseur d’un texte destiné à la publication, laisseriez-vous passer tels quels les passages suivants ? «… Galy… était bien à son spot (sic) habituel pour vendre ses COPIES» et «… certains promettent d’acheter une COPIE» (Le Soleil, 22 sept. p. 17, 1e et 2e col.). Le journaliste B. Ricard-Châtelain, c’est clair, ne fait pas la distinction entre «copie » et « exemplaire ». Il est sans doute victime de sa connaissance de l’anglais : il ignore ou a oublié que le mot «copy » recouvre deux notions : la reproduction fidèle d’un original d’une part et un exemplaire d’un tirage quelconque d’autre part. Tous les outils correctifs insistent sur la distinction (Banque de dépannage, Multidictionnaire, Le français au micro…). Le journaliste devrait mémoriser les deux notions pour l’avenir. Les réviseurs, quant à eux, auraient pu corriger l’expression, surtout que le camelot de la Quête ne semble pas l’avoir suggérée.

Des viaducs, il en pleut à Québec (2017)

 2017.09.21. Cher monsieur Lehouillier. Vous devriez vous méfier de monsieur Labeaume. C’est un boutefeu et un illusionniste. Il vous fait croire (Le Soleil, 21 sept. p. 2) qu’il y a ou qu’il y aura trois viaducs le long de l’autoroute Laurentienne (au croisement de Félix-Leclerc, du chemin de fer et du boulevard Hamel; il a même caché dans sa manche le «viaduc» Soumande, parallèle au chemin de fer). Je vis dans le quartier voisin. Il n’y a pas là l’ombre d’un viaduc, si on prend le mot au sens que lui donnent les dictionnaires. De grâce, ne vous laissez pas berner. Soyez critique et raisonnable : exigez un pont routier, un pont autoroutier ou un pont ferroviaire pour Saint-Rédempteur. Cela coutera moins cher à Lévis qu’un viaduc. Imaginez qu’il vous faudrait, pour perpétuer l’illusion, creuser la vallée ou la coulée à traverser! Demander un viaduc là où il faut un simple pont, c’est acheter un fauteuil lorsqu’on a besoin d’une chaise.

Sur un comité (2017)

 2017.09.19. On se demande comment des calques résistent comme du chiendent dans la presse. Une journaliste du Soleil répète à trois reprises l’expression «siéger sur » dans un reportage sur les flirts politiques d’une candidate à l’élection partielle de Louis-Hébert (19 septembre, p. 3): «Mme …. a siégé pendant au moins cinq mois sur l’exécutif», «une des militantes… qui siégeait sur…», «n’a jamais siégé sur…». Les répertoires correctifs ont le calque à l’œil depuis belle lurette et les dénonciations sont unanimes. En 1986, il y a trente ans, Jean Darbelnet en notait l’emploi abusif. Le Multidictionnaire fait également une mise en garde. Et la Banque de dépannage linguistique (OQLF) proclame toujours : « Les expressions être sur un comité ou siéger sur un conseil, ... sont des tournures calquées de l’anglais. En français, la préposition sur ne suit pas les mêmes règles que la préposition anglaise on. Ainsi, on fait partie d’un comité, on siège à un comité, on est membre d’un comité, on est nommé à un comité ou à un conseil ». Bref, on peut supposer qu’on contourne aisément les répertoires correctifs au quotidien de Québec.

lundi 15 février 2021

Trou d'homme, Manhole, Puits de visite (2013)

2013-06-12. La traduction est souvent un guet-apens. On y tombe, en matière de système d'égout, quand on rend « manhole » par « trou d'homme ». Cette dernière expression est un calque intégral: on ne peut faire mieux ou pis. En français, le « trou d'homme » est un PUITS DE VISITE des canaux d'égout qui coulent sous les rues. On appelle aussi ce puits « regard de visite» ou simplement « regard » lorsque le contexte s'y prête. Les piétons n'ont pas accès à ces espaces. Ils n'en voient que le couvercle, le tampon ou l'écoutille. On notera en passant que le puits de visite n'est pas, en français tout au moins, une bouche d'égout, laquelle est fermée par une grille. 

Cranberry? Canneberge? (2013)

2013-06-13. Un correspondant de passage à Paris me signale que les cousins français n'en ont que pour le « cranberry juice ». Ils ne savent pas que c'est tout simplement du jus de CANNEBERGE. L'anglomanie de nos cousins est incompréhensible et idiote. Le français possède à peu près tous les mots qu'il faut pour désigner les réalités contemporaines et quotidiennes. Les Québécois ont aussi leurs faiblesses en matière de langue. Mais, dans l'ensemble, le snobisme ne les fait pas dérailler. Il leur reste à faire connaître outre-Atlantique l'existence de mots du lexique : jus de canneberge, télécopieur, courriel, épinglette, clavardage, infolettre... Et à convaincre ces cousins de les utiliser.

Membership (2013)

2013-06-14. Beaucoup de mots anglais inutiles en français disparaissent avec le temps. Certains s'usent comme bien des mots français; d'autres sont dénoncés et finissent à la poubelle. Souvent, on pourrait les remplacer sans trop de peine. Ainsi en va-t-il de « membership » et d' « entrepreneurship ». Le premier pourrait faire place à « ADHÉSIONS », à "nombre de membres" ou à "effectif" selon le contexte. Une linguiste a déjà proposé des solutions de rechange plus osées, dont membrerie et membrature. Le second, quant à lui, subit déjà la concurrence d' « entrepreneuriat », mais il résiste. Car on a proposé des définitions différentes au mot français et au mot anglais. Il reste à se servir des mots français et à les illustrer, à les « choser ».

Opportunité, occasion (2013)

2013-06-17. À la radio, on entend souvent les gens parler comme s'ils étaient dans un bar ou dans la rue. Les journaux, eux, reproduisent des expressions critiquées comme si on y ignorait la présence de dictionnaires normatifs. Le Soleil offre un concours (16 juin 2013, p. 31) et annonce « .... vous aurez l'opportunité de lui poser votre question... » (à Michel Boujenah). Comment peut-on imaginer qu'il puisse être opportun de poser une question à un humoriste? Et que l'occasion soit favorable? Non. Les mots « chance », « OCCASION » ou « possibilité » auraient été beaucoup plus justes dans les circonstances. Mais les journalistes ne savent pas toujours qu'il existe des dictionnaires normatifs. Pourtant, ils en auraient besoin à l'occasion.

Bullshit! (2013)

 2013-06-20. Bel exercice hier (19 juin, vers 9 h 15) à la première chaine de Radio-Canada: parler du mensonge et de la "BULLSHIT". D'entrée de jeu, l'animatrice a utilisé le mot anglais. Aussi les invités (Boisvert, Denis, Dufort) l'ont-ils répété pas moins de vingt-cinq fois durant l'émission. Un chercheur a cependant évité de le répéter. Bravo! On a profité de l'émission pour chercher un terme français et on a proposé: faire du pipeau, vasouiller, baratiner. Ces équivalents seront noyés par le raz-de-marée du mot anglais. L'animatrice s'est d'ailleurs servie de ce dernier en introduction de l'entrevue suivante. Bref, elle l'a proposé au départ et l'a rappelé par la suite. Elle ignore l'influence qu'elle a sur ses invités et les mots qu'ils emploieront.

Lit simple, lit double, lit queen (2013)

2013-06-27. Une auberge de Saint-Joseph-de-la-Rive utilise, dans sa liste de prix, les expressions qui suivent: « lit simple », « lit double », « lit queen ». Normalement, on devrait dire en français LIT À UNE PLACE ou PETIT LIT, LIT À DEUX PLACES ou GRAND LIT et, enfin, LIT À GRAND FORMAT ou GRAND LIT À DEUX PLACES. L'entreprise n'offre pas de TRÈS GRANDS LITS, ceux qu'on aurait sans doute appelés « lits king » en franglais. On pourrait probablement affiner ces catégories si le français servait de matériau de base.

Avertissement de pluie (2013)

2013-06-28. Tous les locuteurs, ou peu s'en faut, font du psittacisme lorsqu'ils parlent. Même les professionnels des ondes. Surtout eux, car ils n'ont pas toujours le loisir de réfléchir. Prenons l'expression « avertissement de pluie en vigueur » répétée à plusieurs occasions aujourd'hui. Habituellement, quand on sert un avertissement, on pourra sanctionner. Si mauvais temps il y a, qui est l'auteur de la sanction? Et si l'avertissement est en vigueur, qui a le pouvoir de le rappeler ou de l'annuler? L'expression est probablement un phénomène d'inflation verbale. AVIS ou ANNONCE de pluie suffirait.


Bois plastique, Plastic wood, futée (2013)

2013-06-30. Combien de quincailliers québécois sauraient répondre à la question: « Avez-vous de la FUTÉE? J'en prendrais une petite boîte ». Peu sans doute. Même l'auteur de cet articulet serait resté bouche bée si on la lui avait posée. Pourtant le mot existe depuis le XVIIe siècle selon les dictionnaires. Et tous les bricoleurs utilisent ce mastic depuis belle lurette. Ici, on ignore le mot et on a recours à « plastic wood » ou à sa translittération: « bois plastique ». Somme toute, le français peut nommer bien des réalités contemporaines mais on n'y parvient pas toujours. Il y a des progrès à faire. 

Perdurer (2013)

2013-06-30. Le verbe « PERDURER » signifie : qui dure longtemps. Normalement, on ne devrait pas écrire « le conflit... perdure depuis 14 jours » sous une photo (Le Soleil, 30 juin 2013, p. 2). Il aurait fallu écrire: ... dure depuis 14 jours ou, tout simplement, ... perdure (sans plus). Pourquoi avoir utilisé le verbe perdurer et en limiter le sens? À ce propos, Julien Lepers commente: « L'avantage de perdurer tient peut-être de sa syllabe en plus. Elle le rend plus seyant... à ceux qui confondent la lourdeur des mots avec le poids de la pensée » (Les Fautes de français..., 2011).

Voyageurs internationaux (2021)

2021-02-14. Autrefois, les globetrotters se rendaient au Mexique en voiture, montaient en Alaska, traversaient à Terre-Neuve, prenaient l’avion pour l’Asie, parcouraient les routes du Québec. Pourtant cela n’en faisait pas des voyageurs intercontinentaux ou interprovinciaux, ou encore interrégionaux … Nous avons maintenant des voyageurs internationaux qui, de surcroit, vont à l’étranger! On lit dans le Soleil «… les chaînes d’infection de la covid-19… finissent toutes par aboutir à des destinationvoyageurs internationaux qui l’ont attrapée à l’étranger…» (Infolettre du Soleil diffusée à 10 h 2 le 14 février) Entre nous, vaut-il mieux être un voyageur international plutôt qu’un globetrotter pour aller à l’étranger? 

dimanche 14 février 2021

Raisons sociales: Cut in, Eye Am... (2017)

2017-01-27. Une langue peut se maintenir ou se développer dans une société si elle demeure une langue de plein emploi, c’est-à-dire «une langue qui couvre tous les domaines… tous les lieux… où s’échange du langage : étatique, économique, scientifique, culturel…» (Pierre Encrevé, 2007). Dès lors quand le français est mis de côté dans les raisons sociales, il devient de plus en plus une langue à temps partiel. À Québec, nous avons un le salon de coiffure «Cut in», un bureau d’ophtalmologues dont le nom est «Eye Am» et une entreprise qui s’annonce actuellement sous l’appellation «Today’s Park » (Préparez votre hiver, 2016-17, p. 8). On pourrait allonger la liste. De tels choix s’expliquent mal dans une société francophone. Les propriétaires sont pour le moins inconscients de leurs responsabilités sociales et culturelles. Ce faisant, ils sapent la qualité, le dynamisme et l’évolution du français en terre québécoise, ils en font une langue à temps partiel ou sectorielle. 

Ne pas toffer (2017)

 2017-01-29. Il y a des Québécois qui veulent conserver les franglicismes et en faire la culture. Mais ce ne sont pas nécessairement les personnes qui les utilisent tout à trac. L’ex-ministre Hamad peut affirmer « Je ne tofferai pas des années» (Le Soleil, 28 janvier 2017, p. 8) à brule-pourpoint, en employant les mots populaires du milieu. Un journaliste peut le citer fidèlement. Le dérapage s’enclenche quand le titreur place la citation en gros caractères dans un médaillon au coeur de l’article et qu’il la propulse en manchette à la une de la livraison. Ce faisant, il néglige les expressions françaises (Je ne tiendrai pas.., je ne résisterai pas…, je n’endurerai pas…, je ne supporterai pas…). On inculque un franglicisme aux lecteurs du journal, on enrichit (!) leur langue en leur présentant un calque du verbe anglais servi à la sauce québécoise (to tough, toffer). C’est presque de la félonie.

En développement (nouvelle) (2017)

2017-01-31. . Les téléspectateurs de LCN lisent à l’occasion, au rez-de-chaussée de leur écran, l’expression «En développement» au moment où on leur fait part d’une nouvelle. On connaît des pays «en développement » ou «en voie de développement », des entreprises «en développement». On a alors affaire à des entreprises ou à des pays qui progressent. On n’irait pas jusqu’à dire «livre en développement» (livre en chantier, livre en rédaction). Quand on l’applique à une nouvelle ou à l’actualité, elle semble mal à propos. Par ailleurs, elle est ambiguë. Signifie-t-elle «en cours » ? Veut-on dire que les faits se déroulent parallèlement au reportage. L’expression peut aussi apparaître afin d’indiquer que le reportage est fait en direct. Faire une telle observation est-il couper un cheveu en quatre? 

Joindre une équipe ? (2017)

 2017-01-27. Les publicitaires comme les entreprises tiennent pour acquis, comme la majorité des Québécois, que le français fait partie des gènes de la nation, que c’est inné, que tout est parfait. Alors les fautes seraient impossibles! C’est sans doute ce qui explique qu’un bureau d’avocats (BCF) ait laissé passer l'accroche «Quatre nouveaux talents joignent l’équipe… » (Le Soleil, 26 janvier 2017, p.23). Le bureau a une excuse : tous les mots sont français. Mais la syntaxe est de l’anglais de la plus belle eau. En français, l’expression idiomatique, est plutôt : «… se joignent à l’équipe ». On écrit dans la Banque de dépannage linguistique (OQLF) : «Join est un anglicisme (to join) lorsqu’on l’emploie avec le sens de … devenir l’employé de ». Mais on précise : «Dans certains cas, là où l’emploi de joindre est un anglicisme, l’emploi de se joindre à est toutefois correct… Monique s’est jointe à notre équipe (et non a joint notre équipe)». En somme, il ne faut jamais être trop sûr de soi quand on parle français en Amérique du Nord : le doute est de rigueur.

Directeur exécutif (2021)

 2021-02-13. Monsieur Stéphane Sainte-Croix. Dans un reportage publié dans le Soleil (13 février, p. 18), on vous désigne comme «directeur exécutif» de Destination Gaspé. L’adjectif est français, mais il s’applique à des organismes et non à des personnes. Aussi parle-t-on du «pouvoir exécutif» ou gouvernemental. Sous l’influence de l’anglais, il est courant ici d’élargir le sens du mot et de négliger les façons de dire en français : directeur, secrétaire ou directeur général. On relève la forme fautive dans le Multi dictionnaire, dans la Banque de dépannage (OQLF) et même dans Usito . Après avoir délimité le domaine de l’adjectif à des organismes, Jean Darbelnet, écrit : «Ce qui n’est pas recommandé…, c’est d’appliquer ‘exécutif’ à une personne qui exerce des fonctions d’administrateur ou de gestionnaire». En somme, l’expression serait à remplacer dans le quotidien ou, à plus long terme, dans les statuts de Destination Gaspé.

Joindre un mouvement (2021)

2021-02-12. Monsieur Lavoie (Journal de Québec). Vous écrivez « Le maire de Saint-Bernard… a joint une branche de la Coalition...» et le titreur en tire «Un maire… joint le mouvement…» (Le J. de Qc, 11 février, p. 21). Il semble que les expressions «joindre une association, joindre un parti ou une compagnie» constituent des anglicismes ou tout au moins des formes fautives. …». Le Multi dictionnaire, que vous avez sans doute à portée de main, fait une remarque qui va en ce sens comme Usito et la Banque de dépannage de l’OQLF. Et également comme un recueil de billets publié chez vous. Je lis : «Autre calque de l’anglais : ‘Ce hockeyeur ‘joint les rangs (joins the ranks) de l’équipe….’. Il faut dire : Ce hockeyeur se joint à l’équipe…». (Les mots dits; 350 trucs.../ Jacques Lafontaine; Les Éditions du Journal, 2016), Il ne reste qu’à inscrire la note à votre guide personnel de rédaction à titre d’«en-cas».


Coach X répond à vos questions

2024.04.12. Écrirait-on «Professeur Tartempion répond à vos questions… »? ou encore «faites connaissance avec Chimiste Untel» ? D’instinct...