dimanche 20 juin 2021

Décéder ou mourir? (2021)

2021-06-18. Le romancier Bernard Leconte a déjà noté, c’était en 2004, que les journalistes ont tendance à fuir le verbe « mourir » et à lui préférer « décéder ». Cela malgré les clignotants des répertoires correctifs. On lit dans le Multi «Décéder. Mourir , dans la langue administrative». Leconte juge que le verbe «fait déplacé dans le langage courant». Jean Girodet écrit de son côté : «… S’emploie comme synonyme administratif de mourir et aussi comme euphémisme, dans la conversation». Écrire «… chacun lève son verre à la ténacité de la militante […] qui décédera en 2018…» (Aurélie Lanctôt, Le Devoir, 18 juin, p. A7) constitue une atténuation. Ce serait moins brutal que dire «… qui mourra en 2018 ».Même les animaux profitent de l’évolution . Le chroniqueur Claude Duneton a noté que la presse du début du siècle écrivait que des baleines ou des oiseaux décédaient! 

Représentations... (2021)

2021-06-17. Ottawa veut protéger le français. Il est sans doute tard, car la vie en français en dehors du Québec et de ses marches frontalières reste un mauvais rêve. L’État fédéral pourrait toutefois demander aux animateurs de Radio-Canada de suivre les recommandations de ses services linguistiques. Si un chef d’antennes de la première chaîne dit «Avez-vous fait des représentations auprès du gouvernement…?» (Claude Bernatchez, 17 juin, 9 h 45), ne pourrait-on pas lui adresser un avis, lui demander de prendre connaissance des observations des services du réseau, de les assimiler et d’en tenir compte. Les linguistes de la chaîne observent : « Faire des représentations est un calque de l’anglais » et ils proposent des solutions de rechange. Camil Chouinard, un ancien, écrit pour sa part : « Le mot 'représentation' est un anglicisme quand on l’emploie au sens de pressions que l’on exerce, de démarche, d’intervention » (2007). La protection du français suppose aussi le bon usage de la médiasphère.  

Vegas ou Las Vegas? (2021)

 2021-06-16. Le Journal de Québec présente trois manchettes à ses lecteurs : « Le Journal à Vegas », «Le pitbull de Vegas», «Le CH en territoire ennemi à Vegas» (14 juin). On n’oserait pas écrire «à Angeles» (au lieu de «à Los Angeles), ni «à Pasos», ni «à Paz». Le traitement de tels toponymes étrangers diffère de celui réservé aux toponymes québécois Les Éboulement, Les Machins… Ici, on écrirait «aux Éboulements», «aux Méchins». Dans le cas des toponymes espagnols du même modèle, étatsuniens ou latino-américains, on peut considérer que l’article est soudé au nom. Titreurs et journalistes devraient respecter le toponyme pris dans son entier et écrire: ... à Las Vegas... Comme on le dit dans le Multi dictionnaire : «Dans les cas où le nom géographique n’a pas d’équivalent français, la graphie d’origine est respectée».

Majusculite (2021)

2021-06-15, Voici le titre d’une page publicitaire marquée par la majusculite : «Si Vous Avez un Problème Érectile ou si Vos Érections Arrivent Moins Vite Que Vous ne le Souhaitez… Bentley’s-50 Est la Solution Pour Retrouver Une Vie Sexuelle Normale» (J. de Qc, 11 juin, p. 20). Seulement deux majuscules sur vingt-deux sont justifiées, la première de la phrase et le nom du produit proposé. L'usuel Le français au bureau note deux écueils dans leur utilisation : l'omission et donc l’inutilisation d’un moyen d’expression d’une part et leur abus d’autre part. Il était difficile de faire mieux : 28 mots, 22 majuscules nécessaires. La technique utilisée donne le tournis (plutôt que la stimulation!) et constitue un mauvais exemple pour les lecteurs. Il est à espérer que le publicitaire respectera les règles de base à l’avenir.

Éligible ou admissible? (2021)

 2021-06-14. La société se démocratise. Il en va de même du secteur des libérations conditionnelles! Les candidats à la libération peuvent, si on en croit un reportage, poser leur candidature et la soumettre à l’électorat. Lisons : «Me Caroline Munger […] a demandé au juge François Huot une période de douze ans avant que Mme Webb puisse être éligible à la libération…» (Le Soleil, 12 juin, p. 14). Des hommes politiques perdent à l’occasion le droit de poser leur candidature à sa suite d’une condamnation. À fortiori, Mélissa Webb devra-t-elle attendre plus d’une décennie avant de briguer de nouvelles fonctions. C’est beaucoup en regard de l’abandon de la rétrograde admissibilité, compétence de cercles fermés ignorant le droit de candidater. Ce progrès vaut bien un anglicisme sémantique (https://asulf.org/eligible/)!

Soi-disant, Prétendu (2021)

 2021-06-12. La chroniqueuse Aurélie Lanctôt écrit, contre toute logique semble-il, «… pour endiguer le soi-disant chaos» (Le Devoir, 11 juin, p. A7). L’expression «soi-disant revient à dire : le chaos qui se dit tel, qui se qualifie ainsi lui-même. Bref, l’expression est incongrue. Des auteurs renommés en ont toutefois ignoré le sens évident. Aussi peut-on exciper de leur négligence ou de leur laxisme pour suivre leurs brisées. Mais cela reste illogique. Un commentateur français écrit : «…signifie tout simplement se disant […] à propos de choses […]. Leur prêterait-on le don de la parole? Au vrai, ils veulent dire que les choses expriment quelque chose» (Alfred Gilder). Chez nous, la Banque de dépannage constate le glissement, le Multi conseille de faire appel à «prétendu» quand on parle d’objet. Les lecteurs accepteraient fort bien : «prétendu chaos» en attendant que le sens original de «soi-disant» soit oublié.

«Tchéquez ça» (2021)

2021-06-10. Un professeur qui parle bien français peut utiliser par inadvertance une impropriété ou un anglicisme courant. Il parle de manière spontanée. Un caricaturiste ne rencontre pas le même défi. Il dessine et il peut remplir une ou deux bulles en s’accordant une minute de réflexion. Il peut s’amuser à déformer le français et mettre dans la bouche de ses personnages : «Thèquez ça les gars, des photos de filles avec pas de masque!» (Le Soleil numérique, 9 juin). Un tel laxisme a des conséquences. Les lecteurs ou locuteurs enregistrent ce vocabulaire, l’emmagasinent et le répéteront sans y réfléchir à un moment ou l’autre si on le leur serine. Par ailleurs, le franglicisme «tchéquer» et le joual «avec pas de…» n’exercent pas un monopole. Des solutions de même niveau de langage existent. Pourquoi pas ? « Regardez ça, les gars, des photos de filles sans masque!» Tous auraient apprécié la caricature même avec des bulles correctes!

Site, emplacement, terrain (2021)

2021-06-08. On abuse du mot site. Le Soleil numérique (8 juin) consacre un article au pourtour du 955 Grande Allée. Le journaliste et les citoyens du voisinage n’en ont que pour le «site» visé par les entrepreneurs. Si ces derniers lorgnent l’endroit, ce n’est pas qu’il ait valeur de site. Si tel était le cas, on le protègerait, on en ferait un parc public. L’intention des investisseurs est des plus intéressées et des plus prosaïques : le site évoqué par les citoyens, par l’auteur de l’article et par le chef de Démocratie Québec est inspiré par l’anglais. Le mot anglais a le sens d’emplacement, de terrain, de lieu. D’après les clichés qui agrémentent l’article, on a affaire à un jardin ou à un parc agréable, à la limite, à un site en puissance. Mais si on veut raser le tout, ce n’est pas un site.

Opérer (des charriots...) (2021)

 2021-06-06. Les Messageries dynamiques publient depuis quelques semaines une annonce d’offre d’emploi. On y lit entre autres : «Avoir une carte pour opérer des charriots élévateurs» (Le J. de Québec, 6 juin, p. 18). Le verbe «opérer» est un anglicisme sémantique qui en ratisse large en français québécois. Si on veut constater l’importance des dégâts, on consultera les fiches de la Banque de dépannage linguistique ou du site internet de l’Asulf (https://asulf.org/operer ). Le Multi dictionnaire relève un exemple semblable à celui des Messageries : «Opérer une machine». De son côté, le Dictionnaire québécois-français aligne «Opérer une déneigeuse» et «Opérer une grue». Selon les auteurs des deux usuels, on fait un anglicisme (sémantique) en employant le verbe et on fait fi des solutions de rechange : actionner, conduire, faire fonctionner, manœuvrer... des charriots élévateurs

Char (2021)

1310-06-04. Les futurs candidats au conseil municipal de Québec doivent s’habituer à utiliser un niveau de langage qui correspond à la fonction visée. Madame Alexandra Tremblay de Transition Québec voulait peut-être opposer la notion péjorative de «char», impropriété au sens d’«auto» et calque du mot anglais «car» (Le J. de Qc, 30 mai, p. 13). Il est des solutions de rechange (bagnole, bazou, tacot, minoune). L’Office de la langue rejette le calque même s’il est ancien (Politique de l’emprunt linguistique; 2017). Les candidats en lice devraient s’inspirer des recommandations de l’Office au cours des campagnes électorales et, à fortiori, au cours de leurs mandats éventuellement. Maires ou conseillers, parlementaires ou ministres, parlent au nom de l’État. Les campagnes sont l’occasion de s’y faire.

Expertise (2021)

2021-06-03. Certains lecteurs peuvent douter fort à propos en lisant le mot «expertise». Sous l’influence de l’anglais, il prend ou reprend des sens nouveaux ou exhumés du passé. Si bien qu’on ne sait plus où est le français et où est l’influence de l’anglais. Une chroniqueuse du Devoir écrit «Retrouver les fosses […] exige expertise et moyens technologiques» (2 juin, p. A3). La question aurait été plus simple avec «know-how». Mais le mot employé est français. Pierre Cardinal (Le VocabulAide) souligne qu’il qu’il prend de nouveaux sens sous la pression. On lit dans Dictionnaire québécois-français (Meney) : (moy. fr «expertise»(=habileté, adresse, expérience); sens anc. revivifié […] sous l’infl. de l’anglais). Et l’Académie écrit : «… ne doit pas être employé avec le sens d’expérience, qu’il n’a plus depuis la fin du Moyen Âge. Il ne doit pas non plus remplacer des termes comme compétence ou savoir-faire». Reste à savoir dans quel sens l’utilise la journaliste.

Liquidation d'inventaire (2021)

2021-06-02. Matelas Dauphin annonce une « liquidation d’inventaire » (Le Soleil, 29 mai, p. 12). En français, le mot est correct si on veut dire «liquidation avant inventaire, «… après inventaire» ou même, si l’on veut être fanfaron, «liquidation pendant inventaire». Il est le recensement, le dénombrement des articles stockés dans un magasin ou dans un entrepôt à un moment donné ou leur relevé. Par contre, si les matelassiers pensent liquidation de stock, des marchandises en magasin, ils font un anglicisme dit sémantique. L’anglais « inventory » signifie dénombrement mais aussi stock. On donne au mot français un sens du mot anglais. On a donc un choix cornélien (!) à faire : l’anglicisme «inventaire» (un petit bâtard!) ou le mot anglais «stock», intégré au français depuis le XVIIe siècle et à la nombreuse descendance (stocker, stockage, stockeur, stockiste, stockable…). Matelas Dauphin a-t-il fait le bon choix? 

vendredi 4 juin 2021

Vente , méga vente (2016)

2016.03.12. L’enseignement de l’anglais en 6e année du cours primaire est populaire dans la région de la capitale nationale selon le Soleil du 12 mars (p. 2-3). Peut-on tenir pour acquis que l’étude de l’anglais favorisera parallèlement la qualité du français dans la région? On voit dans la même édition du journal une page publicitaire de la Clef de Sol dont l’accroche est « Méga vente d’inventaire » (p. 9). L’entreprise et ses agents de promotion devraient savoir que le mot français «vente » ne signifie pas aubaine, ni rabais, réclame, liquidation ou solde. Si les enseignants de l’anglais hâtif parviennent à convaincre les Québécois que le mot anglais "sale" a deux sens (action de vendre et solde) et qu’il faut utiliser celui qui convient au bon moment, la population aura une raison de plus de favoriser l’apprentissage de l’anglais. Jusqu’à maintenant, on n’a pas identifié une telle retombée. Ni d’autres du même ordre. Et les publicitaires de l’entreprise nommée n’ont pas encore mis en pratique les leçons données aux élèves depuis une décennie.

«Scrapbooking» (2016)

2016.03.13. Les auditeurs à l’écoute de l’émission Médium Large (sic) diffusée à partir de 10 h 18 le 4 mars sur la première chaine se rappelleront sans difficulté le mot «scrapbooking ». Mais garderont-ils à l’esprit « collimage »? L’animateur ce matin-là, P. Masbourian, et la chroniqueuse P. Lévesque ont répété le mot anglais à plus de vingt reprises en l’espace de dix minutes au bénéfice ou aux préjudices des francophones à l’écoute. Cette dernière à eu quand même le courage de révéler qu’on avait proposé un équivalent français : « collimage ». Les néologismes comme « collimage » réussissent à se tailler une place dans la langue si on les utilise et si on les entend. Le déséquilibre – 21 occurrences contre une - en faveur du mot d’origine américaine est inacceptable sur les ondes publiques. Des guides et des dictionnaires proposent déjà « collimage » (Multidictionnaire…; Usito). Des institutions gouvernementales aussi : non seulement l’O.Q.L.F. mais également Termium, établi par l’État fédéral canadien, auquel la première chaine émarge et, donc, ses animateurs et ses chroniqueurs.

«Touchy» (2016)

2016.03.23. Quand le commissaire à la santé et au bien-être, Robert Salois, se contente de parler de sujet «touchy », que le titreur du Soleil repêche le mot de la quatrième colonne de l’article (23 mars, p. 12) et le reproduit en médaillon, il faudrait que les abonnés et les lecteurs réagissent et proposent des solutions de rechange. Le témoin utilise le mot anglais. Il ne sait pas comment rendre l’idée. Il faudrait lui proposer : sujet sensible, sujet délicat, sujet chargé d’électricité, sujet épineux. Et comme la langue française est la sienne, il faut qu’il sache qu’il peut chercher aussi, dans son lexique intérieur, l’expression qui convient. De son côté, l’auteur du reportage aurait dû ajouter un équivalent français au mot anglais (entre parenthèse s’il le faut). Cela aurait permis une alternative au titreur. Si tous font leur bout de chemin, témoin, auteur, titreur et lecteurs, le français pourra s’améliorer en sol québécois.

«Un long shot» (2016)

2016.03.20. Faisons un rapprochement entre une expression employée par un candidat à la présidence du Mouvement Desjardins et une citation d’un professeur à la retraite de l’Université Laval. Celui-ci, Jean Marcel, affirme « … chaque mot repris sur le terrain de l’anglicisation nous rapproche de notre libération » (Le Joual de Troie, 1973). Celui-là, Daniel ‎Paillé, ex-chef d’un parti fédéral indépendantiste et ex-ministre du Parti Québécois, qualifie ainsi sa candidature : « c’était un ‎long shot » (Le Soleil, 20 mars, p. 5, 4e col.). La vision nationale de l’homme d’affaires devrait l'amener à dire la prochaine fois : « j’avais peu de chance de gagner», « ma victoire était peu probable » ou une autre expression de son cru. Seule une petite fraction du lectorat aura compris illico le sens des mots anglais. Mais le journal de la capitale n’hésite pas à les porter en manchette : ce doit être une illustration de l’Accent d’Amérique!

Faire des représentations (2016)

2016.03.18. L’État consacre des sommes importantes à l’établissement d’un socle solide à partir duquel institutions et fonctionnaires peuvent rectifier la langue employée. Parmi les instruments émargeant à son budget, actuel ou passé, on a la Banque de dépannage linguistique et Usito. Nos nationaux payent également leur part des sommes fédérales pour Termium et pour le Français au micro. Mais les observations de ces organismes ne sont pas toujours prises en compte. On lit un avis dans le Soleil du 16 mars : « …toute personne intéressée peut… ‎faire des représentations auprès du Conseil du patrimoine culturel… ». L’expression « faire des représentations » est pourtant épinglée par la BDL et Usito à Québec, par Termium et le Français au micro du côté d’Ottawa. À la BDF, on écrit : « La locution …est un anglicisme : elle est en effet calquée sur l’anglais... On la remplacera donc par des expressions telles que intervenir, faire des démarches, exercer des pressions, etc. ». Les autres sources vont dans le même sens. Pourtant, le ministère de la Culture ignore les observations de ses spécialistes et même de ceux qui relèvent des institutions fédérales. N'y a-t-il pas une faille quelque part?

Être très shakée (2016)

2016.03.19. Les animateurs de radio ont parfois des lacunes en français. Plusieurs ne sont pas familiers avec le lexique français et ils doivent à l’occasion se servir de l’anglais. #Éric ‎Duhaime est de ceux-là. Le Soleil présente ses observations à la suite de l’arrestation de l’ex-ministre Nathalie ‎Normandeau : « Elle est… très ‎shakée »; elle n’est pas « assise sur… une montagne de cash » (Le Soleil, 19 mars, p. 7, 2e col.). Pourtant ce sont là des observations qu’un animateur francophone devrait pouvoir rendre en français. Madame Normandeau, on l’imagine facilement, a été ébranlée, bouleversée, émue, secouée, paralysée… par les accusations dont elle est l’objet. Il est possible qu’elle ne soit pas indépendante de fortune, qu’elle ne soit pas un Crésus, ni argentée, ni fortunée, ni richissime… Mais un locuteur francophone est normalement en mesure de traduire ces réalités dans des mots français courants. A fortiori, un animateur d’une station de radio! c’est-à-dire un professionnel de la langue qui vit de sa loquacité sinon de son bagou.

Meilleur vendeur (2016)

2016.03.17. Vous interrogez-vous encore sur l’identité ou sur la nature du meilleur vendeur? Habituellement, en français, c’est un homme ou une femme que vous appréciez et que beaucoup de chalands utilisent. De la sorte, il devient le meilleur vendeur de l’entreprise ou d’un regroupement d’entreprises. Mais il semble que sous l’influence de l’anglais « best-seller », expression appliquée à l’origine, en français, à des succès de librairie, on a tendance à faire comme si le meilleur vendeur pouvait être une voiture, un mobilier de jardin ou une cafetière. C’est de l’anthropomorphisme : l’article est devenu le commis ou le vendeur. On entend souvent l’expression dans les messages publicitaires, on l’entend sur les ondes. Par exemple, en début de matinée à la première chaine (Québec, 17 mars, vers 8 h 38). Pourtant les auteurs du Français au micro (Radio-Canada) signalent la faute, comme ceux du Multidictionnaire, du Français au bureau, d’Usito, d’Antidote. Les feux clignotants ne sont pas encore assez puissants! dirait-on. 

Meilleur vendeur ou Meilleures ventes (2021)

21-05-31. C’est une expression qu’on croyait oubliée, celle qui voulait que tel ou tel article était le « meilleur vendeur » de l’année. Une entreprise, Atlas for men, annonce que ses tee-shirts seront « les meilleurs vendeurs de l’été » (J. de Qc, 29 mars, p, 21). On peut faire l’hypothèse que les commis seront mis à pied si gaminets, maillots ou tee-shirts se mettent à vendre. À moins qu’il y ait confusion sur le sens des mots. «Best-seller» désigne déjà les produits à succès. Guy Bertrand, conseiller linguistique à Radio-Canada, écrit : « Un vendeur est une personne qui vit de la vente. Il est donc peu probable qu’un livre, qu’un disque […] soit un vendeur, bon ou mauvais » (400 capsules linguistiques; 1999). On peut supposer que l’affirmation vaut aussi pour les «tee-shirts» . Selon Bertrand, «la locution ‘meilleur vendeur’ est un calque de l’anglais. Espérons qu’Atlas for men puisse rectifier son message et écrire : « les meilleures ventes de l’été » et garder les vendeurs à son service.

Compétition, compétiteurs, concurrence (2021)

2021-05-30. Depuis quelques semaines, Armoires PMM, un vendeur et installateur d’armoires achète des pages de publicité dans les quotidiens. On y relève un anglicisme de maintien : « salle de montre », deux impropriétés : «futur site» et … Mais là, on semble hésiter. Dans le Soleil (29 mai, p. 9), on lit : «… Vous avez de la difficulté à faire installer vos armoires […] par la compétition…». La phrase devient dans le Journal de Québec (30 mai, p. 10) : «… par nos compétiteurs». Dans le contexte, le mot « compétition » est un anglicisme. On peut lire dans Lexique des difficultés du français de Paul Roux (La Presse, 2004) : « Sous l’influence de l’anglais, le mot ‘compétition’ est de plus en souvent employé au sens de concurrence dans le domaine des affaires », mais on lit aussi : «Le mot ‘compétiteur’ a suivi une évolution semblable, puisqu’on lui donne aujourd’hui le sens de capable d’entrer en concurrence…». En somme, l’idéal aurait été « par nos concurrents » dans le contexte de la rénovation.

Préposés aux bénéficiaires ? (2021)

 2021-05-29. Il est courant que des techniciens veuillent changer l’appellation de leur profession même au prix d’un anglicisme ou d’une impropriété. On a vu les ambulanciers qui se donnent du «paramédic» (emprunt à l’anglais). Mais on observe, c’est rare, des employés qui acceptent une désignation prosaïque plutôt que descriptive et fidèle. C’est le cas de nos «préposés aux bénéficiaires » (Le Devoir, 29-30 mai, B1-B3). Règle générale, les préposés sont rattachés à des domaines : préposés au vestiaire, à l’accueil, aux renseignements, au nettoyage, etc. On ne voit pas encore de préposés à des êtres vivants, des préposés aux visiteurs, aux abonnés ou aux voyageurs. L’auteure du Multi dictionnaire note à propos de l’expression : «La désignation de cette fonction laisse grandement à désirer aussi bien sur le plan sémantique que syntaxique. La dénomination ‘préposé’ […] pourrait s’appliquer à n’importe quelle fonction administrative » (La Presse, 1er juillet 2020). Bref, « aide-soignant » serait préférable, question de rayonnement du groupe et de qualité de la langue.

Vidanges ? (2021)

2021-05-25. Une foule se forme au Parc Victoria. Il fait beau. Les gens viennent piqueniquer. Comme cela arrive souvent, ils laissent les déchets et les ordures sur le sol. Monsieur Labeaume note que les employés de la ville ont mis beaucoup de temps à « ramasser les vidanges » et, par la même occasion, il conseille aux piqueniqueurs : « Ramassez vos vidanges » (Le J. de Qc, 25 mai, p. 6). Le mot doit venir de la campagne. Autrefois, on y utilisait des fosses d’aisances qu’on devait vider périodiquement. On faisait la vidange. Utiliser le mot pour désigner les reliefs, les restants de table, les sacs de plastique, les bouteilles vides, les peaux de banane … constitue une impropriété. On le classe parmi les québécismes, mais on en critique l’usage depuis 1938 au moins. Usito y va doucement : « emploi familier … parfois critiqué comme synonyme non standard de déchets, ordures ». Par respect pour les piqueniqueurs et la modernisation de la langue, ne devrait-on pas... ?

Droits humains ? (2021)

2021-05-24. Les animateurs radio et les chroniqueurs peuvent être des critiques modèles quand ils parlent de leur domaine de spécialisation, mais ils ignorent à l’occasion la qualité des mots. Ainsi Franco Nuovo et Élisabeth Vallet utilisent-ils «droits humains» (Première chaine, 23 mai, vers 8 h 45) . Autrefois, on traduisait «human rights» par «droits de l’homme». L’expression «Droits humains» est considérée comme un calque (Colpron, Multi dictionnaire…). Louis-Paul Béguin note « … il n’y a aucune raison de parler des 'droits humains' […], qualificatif incorrect : aucun droit n’est humain ». Les dictionnaires de traduction rendent l’expression anglaise par « droits de l’homme » et « droits de la personne ». Généralement, on considère que le mot « homme » englobe à la fois la femme et son compagnon. Au Québec, on a oublié ce sens. Il fallut trouver une solution de rechange. On a proposé «droits de la personne». Mais le calque surnage de temps à autre.


Exclamations: Fuck!

2024.03.01. La chroniqueuse Josée Blanchette aime bien parsemer ses textes de mots anglais. L’habitude fait partie de son style. Dans le Dev...