mercredi 17 novembre 2021

Trail (2017)

 2017.10.02. Les Québécois, on peut en faire l’hypothèse, ont une première langue, l’anglais, et une langue seconde, le français! Cela ne veut pas dire qu’ils s’expriment aisément en anglais, mais ils en sont imprégnés. Ils sont bilingues de naissance, comme le dirait Gaston Miron. Un journal de quartier, le Québec Express publie un article sur un nouveau sport, «le trail » (4 octobre, p. 7). Le mot est mis en vedette dans le titre de l’article, dans le chapeau et dans la légende de la photo. Le spécialiste de la discipline, Martin Fortin, connaît l’équivalent français «sentier » et «course en sentier ». À vue de nez, le mot « trail » ne désigne pas un sport, non plus que «road ». Mais l’avantage d’un francophone est de faire dire n’importe quoi au mot anglais. Il n’oserait jamais dire « Le sentier : une discipline… en croissance ». De fait le titre de l’article est «Le trail : une discipline…». On peut souhaiter qu’un jour les Québécois puissent torturer leur langue maternelle comme ils peuvent le faire avec l’anglais. Mais il leur faudrait d’abord l'aimer, l’apprendre et l’enrichir.

Juridiction (2017)

2017.10.03. Madame Buzzetti,  Vous citez plus que fidèlement monsieur Jagmeet Singh : «Ce n’est pas notre juridiction…» et «Je respecte la juridiction du Québec…. » (Le Devoir, 3 octobre, p. A 4). La seconde citation est même reproduite en médaillon. Vous savez, il n’y a pas à en douter, que le mot «juridiction » dans le contexte est anglicisme de choix! Le Multi aligne une série d’équivalents : compétence, autorité, ressort, territoire, champ d’application. Termium, l’équivalent du Grand Dictionnaire terminologique pour l’administration fédérale et les gens qui y gravitent, signale aussi les guets-apens propres au mot. Il me semble que pour l’instruction du chef du NPD et de ses collaborateurs, pour le lectorat du Devoir, il se serait imposé d’ajouter une ou la bonne expression française dans le voisinage de l’anglicisme.

Payeur de taxes / Éligible (2017)

2017.10.05. Si Jean-François Gosselin est élu à la mairie de Québec, ses conseillers devront lui préciser le sens de certains mots et les façons de faire des phrases. Au cours des derniers jours, il s’est opposé à la rénovation de la bibliothèque Gabrielle-Roy. Là n’est pas le problème, mais plutôt dans la phrase : «L’argent doit aller à rénover…  C’est pas des projets de 32 millions des payeurs de taxes… qui doit servir à faire ça» (Le Soleil, 4 oct. p. 8). Si le candidat relit la citation, il n’y comprendra rien. En passant, en français, un «payeur de taxes» est un contribuable. Il est vrai que le maire actuel ignore aussi ce détail. Vingt-quatre heures plus tard, le candidat lance une autre phrase tarabiscotée : «Les gens ont des choses à dire. Ils veulent les dire directement au maire… et c’est ce que je m’engage à faire» (ibid., 5 oct. p. 4). Ah bon! il va en parler au maire! Autre faille à corriger : dans le même reportage, il confond le mot «éligible» et le mot «admissible ». Les citoyens invités à s’inscrire à des déjeuners de consultation n’y seront pas choisis à la suite d’un scrutin. S’il est vrai que la bonne administration commence par le bon langage, monsieur Gosselin aura à améliorer sa langue maternelle. 

Récipiendaire (2017)

 2017.10.08. Comment une entreprise de la taille de Bell peut-elle ignorer la différence entre un «récipiendaire » et un «organisme subventionné »? Les dictionnaires précisent depuis longtemps qu’un lauréat, un décoré, le gagnant d’un prix ne sont pas des récipiendaires. Alors la compagnie Bell a-t-elle raison d’annoncer «Causons des exceptionnels récipiendaires du Fonds communautaire 2017 »? (Le Soleil, 7 oct. p.13; et sans doute ailleurs). De fait, Bell a accordé 26 subventions à des groupes québécois (414 pour le Canada). Les groupes sont des bénéficiaires tout simplement, ou des groupes subventionnés. Ce ne sont pas des «récipiendaires », c’est-à-dire des personnes physiques ou morales reçues au sein d’une société savante lors d’une cérémonie. Il est difficile d’expliquer comment Bell en arrive à une telle dérive et à ignorer les définitions. Le linguistique Robert Dubuc, abordant le mot en cause en 2008, pense que les professionnels de la communication se conforment souvent à la norme du «t’sais-veux-dire» (Au plaisir des mots, p. 176).

Démotion ? (2017)

2017.10.11. Des mots étrangers traversent la frontière et émigrent au Québec qu'on a peine à identifier. Ils ont une allure française. C'est le cas des verbes «revamper » (rajeunir) et «finaliser » (ficeler), des substantifs  «représentation» (démarche) et «démotion ». Ce dernier substantif a été utilisé par l’animatrice de Radio-Canada (11 oct. vers 17 h 30). Elle parlait du ministre François Blais et de la décision du premier ministre de confier la responsabilité de la capitale nationale à un autre collègue. Le substantif n’appartient pas au français. Mais il existe bel et bien en anglais («demotion »). Son équivalent français est «rétrogradation ». Le terme est donc un emprunt intégral à l’anglais. Selon l’Office, il ne vient combler aucune lacune en français. En somme, Madame Lachaussée n’a aucune raison de l’employer. Mais on lui concédera qu’il serait facile à intégrer et à assimiler! À l’égal des compères nommés.


Place Bell ? (2017)

2017.10.17. La ville de Laval fait de valeureux efforts pour attirer les touristes : construction d’immeubles ou d’édifices et planification d’un centre ville moderne. Un reportage du Devoir (14-15 octobre, p. I-4) rend compte des réalisations : trois patinoires, un complexe aquatique, un réaménagement routier et piétonnier… Mais pas un mot ni de photo de la place elle-même que l’on devrait trouver à la sortie de la station de métro. Se retrouve-t-on sur une place du genre «place d’Youville » (à Québec) ou du genre «place Québec» (un complexe administratif, commercial et hôtelier). La description des lieux laisse supposer que l’administration de Laval a enrichi ou déformé (c’est selon!) le concept de «place ». La prétendue «#place Bell » est bien plus que «place d’Youville» et bien plus que la fausse « place Québec ». Ne serait-elle pas un secteur ou un quartier culturel et sportif? À Montréal, on a un quartier des affaires, à Québec, on a le Petit quartier Champlain (de fait : le quartier du Petit Champlain!). Pour faire mieux (?) qu’à Laval, il aurait fallu, à Québec, baptiser le Centre Vidéotron «Place Vidéotron ».

dimanche 14 novembre 2021

Déployer une campagne de financement (2021)

2021-11-10. On abuse du verbe «déployer». On s’est permis par le passé de «déployer» (sic) un seul médecin à Anticosti! Les OUIQuébec annoncent une campagne de financement «qui se déploiera » jusqu’à son assemblée générale (message diffusé le 9 novembre). À première vue, on semble confondre le verbe avec «se dérouler», «avoir lieu» ou «battre son plein». Il signifie avant tout : déplier une chose qui était pliée, disposer sur une plus grande étendue et montrer dans toute son étendue. Le sens concret de «se dérouler», de «se tenir», est étranger à «se déployer». De fait, les exemples ou illustrations fournies par les dictionnaires ignorent pour le moment «le déploiement» d’une campagne de financement ou l'entreprise de «déployer» un défoliant ou des injections. Rien n’empêche toutefois les membres des OUIQuébec de se déployer eux-mêmes dans le pays laurentien et de solliciter des dons.

Chez ? (2021)

2021-11-08. Les entreprises n’ont pas toujours le loisir de s’arrêter à de légers problèmes de langue. Un manufacturier offre l’accroche suivante aux lecteurs du Journal de Québec : «C’est Noël chez Armoires PMM» (5 novembre, p. 15). L’entreprise aurait-elle accepté : Noël chez Machines à coudre PMM, Noël chez Construction PPM ? La solution n’est pas toujours facile à trouver. Voici quelques filons proposées par l’Académie française : «Chez […] ne se dit qu’en parlant de personnes et, par extension, d’être personnifiées […]. Quelques solutions sont possibles :- la raison sociale se confond avec un nom de personne […] - la raison sociale est un nom de chose…». C’est le cas ici. Un exemple suit : .«on utilise ‘à’ : aller au Bon Marché». Il faudrait écrire dans le cas relevé : «C’est Noël aux Armoires PMM». Une autre ouverture : «on traite comme nom de personne un nom de chose, un acronyme». C’est dire qu’on pourrait écrire «C’est Noël chez PMM» si l’on oublie la différence entre un acronyme et un sigle. Mais peut-on personnifier Armoires PMM? Et écrire : … chez Armoires PMM.

Dernier droit ? (2021)

2021-11-07. À madame Stéphanie Martin (Le Journal de Québec), Dans le « premier droit » (!) ou plutôt dans le deuxième de votre article (Le J. de Qc, 7 novembre, p. 2), vous écrivez «Dans le dernier droit de la campagne …». Je m’empresse d’employer l’impropriété ou le franglicisme et même d’en multiplier les formes. C’est risqué. On est en terrain glissant. Un «droit» n’existe pas en français dans le sens de «ligne droite». C’est ce qu’affirme le Multi dictionnaire, la Banque de dépannage, l’Asulf (https://asulf.org/dernier-droit/).... La BDL propose le remplacement de l’impropriété par «dernière étape», par «fin de parcours», par «derniers moments» et même par «sprint final». Avant que la logique et l’expression correcte l’emporte, il faut torturer le français et le déformer! Comme l’écrit Frédéric Dard : «Entre deux mots, il faut choisir le pire». Entre deux expressions aussi.

Tournure: N'être pas sorti du bois (2021)

2021-11-07. Pourquoi la manchette «Dominique Anglade n’est pas encore sortie du bois»? (Le Journal de Québec, 4 novembre, p. 28). Le blogueur Marc-André Leclerc n’a pas utilisé la tournure dans son article. La seule explication valable est que le titreur connaît la locution anglaise «not to be out the wood yet» et la traduction mot à mot qu’il met de l’avant. Il ignore les équivalents français. Michel Parmentier en propose quatre ou cinq : «ne pas être sorti de l’auberge », «ne pas être au bout de ses peines» ou «… au bout du tunnel», «être loin du bout du tunnel» et «ne pas en voir la fin» (Dictionnaire des expressions… calquées sur l’anglais). Pour sa part, Pierre Cardinal (VocabulAide) observe qu’on utilise la traduction littérale «sous l’influence de l’anglais …». En somme, un journaliste néglige la tournure calquée, mais le titreur la met sous les yeux des abonnés et donc dans leur mémoire.

Autobus ou Autocar? (2021)

2021-11-05. Dans le passé, des chroniqueurs ont pointé la traduction comme un vecteur d’anglicisation de la langue. On peut penser que la multiplication des traducteurs informatiques nous ramène à ce passé. Une page publicitaire de Google et de sa plateforme Meet illustre cette évolution (Le Devoir, 4 novembre, p. A8). On y lit : «… plus de 5100 autobus urbains». En anglais, les publicitaires ont eu besoin de préciser «urban bus» par opposition aux bus interurbains. En français, deux mots différents distinguent les deux types de transport en commun : autobus ou bus d’une part et autocar ou car d’autre part. Il était sans doute prudent d’écrire «autobus urbains» dans le contexte québécois. Il reste des efforts à faire pour que la distinction se fasse spontanément. Mais il y a lieu de retenir une réflexion de Louis-Paul Béguin : «Parce que l’anglais ne marque pas la distinction entre ces deux genres de véhicules […] nous nous privons d’un mot bien français»(Problèmes de langage…, 1978).

Officier ? (2021)

2021-11-04. Le mot «officier» pour désigner des fonctions parlementaires (whips, leaders) et leurs conseillers politiques a été employé par madame Rotiroti et par monsieur Arcand, respectivement whip et président du groupe libéral à l’Assemblée nationale (Le Devoir, 3 novembre, p. A3). Le mot est jugé comme un anglicisme et comme un archaïsme. Le chroniqueur Alphonse Lusignan l’a relevé en 1885. Depuis, on ne cesse de le dénoncer. Il y a douze ans, le professeur Pierre Cardinal attribua son utilisation à l’influence de l’anglais et nota : « le terme ‘officier’ ne s’emploie, en français général, que de façon limitée dans la terminologie administrative…». Reste à savoir quelles seraient les solutions de rechange. On a proposé «Agent», «employé», «préposé», «dirigeant», «responsable». Termium, la banque linguistique fédérale, garde comme cinquième choix «officier» tout en le jugeant «vieilli». Madame Rotiroti aurait pu parler du rôle des responsables parlementaires du groupe et monsieur Arcand des conseillers cadres.

C'est juste... (2021)

2021-11-03. Gérard Bouchard remerciera-t-il le titreur du Devoir d’avoir rendu en franglais (!) ce qu’il a écrit? Le passage de son texte se lit : «Ce n’était qu’une blague» pour synthétiser la pensée de cinq juges de la Cour Suprême dans l’affaire Ward c. Gabriel (Le Devoir, 2 novembre, p. A7. La formule était trop française sans doute. Au Québec, on dit et on entend «C’est juste une blague» . Le Devoir en fait un titre. La tournure est québécoise mais elle semble se répandre en France. A. Gilder, un ancien haut fonctionnaire français écrit : «Ne dites pas : «J’ai pris juste un verre de vin’. Dites : ‘Je n’ai pris qu’un verre de vin’ ou ‘J’ai seulement pris un verre’…». Il propose deux autres façons de dire (Les 300 plus belles fautes… à ne pas faire) . On ne relève pas l’erreur au Québec. Peut-être juge-t-on qu’elle y serait tellement ancrée que rien ne servirait de l’épingler. Le moins qu’on puisse affirmer est que l’expression pourrait constituer un anglicisme de fréquence. On néglige les formules françaises et on se contente de calquer une américaine.

Vente ? anniversaire (2021)

2021-11-01. Le cahier publicitaire des pharmacies Brunet (4-10 novembre) met en vedette l’accroche franglaise «Vente anniversaire». En français, l’expression signifie qu’on veut marquer une vente historique que Brunet aurait faite il y a dix, vingt ou cinquante ans. De fait, le prospectus est silencieux sur la prétendue vente. On nous présente plutôt des dizaines d’articles à prix réduit au cours de la semaine, des mouchoirs de papier, du papier hygiénique, du détergent, etc. Il va de soi que ces articles sont en vente, c’est-à-dire qu’ils sont à vendre et que les chalands peuvent les acheter. Mais l’essentiel est ignoré… en français tout au moins. On ne précise pas «vente au rabais». On fait comme en anglais où le mot «sale» signifie à la fois «vente» et «solde». En français, on distingue les deux réalités. Proposition est donc faite à la direction des pharmacies de tenir compte, à l’avenir, de la distinction entre les deux notions. Un tel soin envers le bon usage s’inscrirait bien dans le continuum hygiène, santé, beauté…

Coulé dans le ciment (2021)

2021-11-01. À Daniel Côté (Le Quotidien, Saguenay), Vous seriez sans doute porté à défendre la tournure utilisée dans le chapeau de votre article consacré à un roman historique à venir : «… sans être coulé dans le ciment, le titre […] pourrait être…». Tous les mots sont français, mais elle est un calque de l’anglais. La Banque de dépannage linguistique observe : « C'est sous l'influence de l'expression anglaise 'set' ou 'cast in concrete' qu'on emploie […] ‘coulé dans le béton’ (ou, plus rarement, ‘coulé dans le ciment’) pour qualifier quelque chose de définitif ou d’irréversible». Au demeurant, si on consulte un dictionnaire de traduction, on constatera qu’on propose «rien n’est encore décidé» comme traduction de «nothing is yet set in concrete». Il aurait donc été plus correct d’écrire : «… sans être définitif …», «…sans être fixé…».

lundi 1 novembre 2021

Nolin, Sofia (2021)

2021-10-31. Un professeur de mathématique, un hockeyeur ou une comédienne peuvent briller sans enseigner le français. Tout au moins doivent-ils faire des efforts pour parler correctement. Cela ne semble pas la préoccupation de Safia Nolin. En entrevue avec la journaliste V. Marcoux du Soleil (30 octobre, p. M12-M13), elle aligne «Scuse moi», «fucking en crisse», «sortir deux tunes», «le public […] ne ‘care’ pas à propos de ma musique…», «une calice de chance», «des albums fucking longs», «il y a un shit qui se passe à l’automne». De plus, elle propose à la journaliste, empressée de les utiliser: «version sunrise», «en mode ‘full band’» et «en mode ‘unplugged’». Tout n’est pas perdu cependant. Le dernier album de l’artiste serait un clin d’œil à la France.

Tu (particule interrogative) (2021)

 2021-10-29. La campagne électorale municipale à Québec bat son plein. Un candidat voit une hausse importante de sa popularité, monsieur Bruno Marchand. Ce dernier et ses adversaires doivent être conscients qu’ils parleront au nom de la ville s’ils sont élus et qu’ils devront en principe négliger un français négligé une fois en poste. Même en lice, ils devraient faire des efforts. Monsieur Marchand vient de poser une question à madame Savard : «On peut-tu être transparent?» (Le Devoir, 29 octobre, p. A4). C’est une formule à conserver pour le langage familier. Un homme politique devrait pouvoir dire quand il parle en public : « Peut-on être transparent?» ou «Est-ce qu’on peut être transparent?» Le soin à utiliser le français standard lors des activités officielles devrait être la règle même si le laxisme domine à l'occasion.

Récipiendaire ? (2021)

 2021-10-29. L’État québécois vient de dévoiler les gagnants des prix du Québec. Le communiqué daté du 27 octobre précise que les ministre Fitzgibbon et Roy « sont heureux de dévoiler les récipiendaires des Prix du Québec 2021 ». On a toutes les raisons de croire que le mot est une impropriété. Jean Girodet explique bien qu’il désigne celui qui est reçu dans une société, une compagnie et non celui qui reçoit une récompense. Le Multi dictionnaire note qu’on devrait employer «lauréat» ou «gagnant» pour désigner les personnes qui gagnent un prix. Même la Banque de dépannage donne cet avis : « L’emploi de ‘récipiendaire’ au sens très général de « personne qui reçoit quelque chose » est considéré comme fautif en raison de l’influence probable de l’anglais...». C’est dire que le gouvernement ni l’Administration ne tiennent compte des observations des spécialistes qui émargent à leur budget!

Party, parté ou partez ? (2021)

2021-10-28. Que faire du mot «party»? Il fait partie du français depuis près de 200 ans. En France, on prononçait «parti» selon le comité […] de la qualité du français à l’Université Laval (Terminologie, 10 février 1983). Mais ici on compose avec la prononciation anglaise et on prononce «parté» ou «partez!» (au moins en territoire francophone). Comme nos concitoyens ne parviendront pas à prononcer «parti» lorsqu’ils lisent la manchette «La thématique d’un party d’Halloween aurait…» (Le J. de Qc, 27 octobre, p. 16) ou la mise en garde «Le party est fini» (Le Devoir, 27 oct., 1e p.), il serait préférable d’utiliser la graphie «parté». Cette dernière correspondrait à la prononciation du mot. Nos ancêtres ont utilisé de telles recettes. Le «trestle» de Cap-Rouge est devenu le «tracel» (le seul au monde!), le «backhouse» est devenu la «bécosse». Il est vrai que la graphie et la prononciation «parté» concurrencera la pratique française!

Le Dr X ou Dr x... ? (2021)

2021-10-26. La fondation de l’Institut universitaire de cardiologie … (IUCPQ) reproduit, souvent avec leurs fautes, des témoignages poignants à l’occasion de ses campagnes de financement. Ainsi peut-on relever dans une lettre circulaire distribuée dans la semaine du 18 octobre : «… sauver encore plus de vie» (de vies), «puisqu’étant médecin» (on ne doit pas élider), «Suite à un traitement…» (À la suite de…), «Faites comme eux, donner (donnez) et «… l’accompagnement … de Dre Catherine … et Dr Philippe…». Arrêtons-nous à cette dernière façon de faire. Tout naturellement, on est porté à dire «… l’accompagnement … de la Dre … et du Dr…». Lionel Meney, un professeur de l’Université Laval, écrit : «… en français standard, le mot ‘docteur’ employé … dans une phrase complète, est précédé d’un article» (Dictionnaire québécois français). Il émet l’hypothèse que la tournure critiquée serait un calque de l’anglais. Espérons que l’Institut, à l’avenir, fera corriger les témoignages avant de les diffuser.

Médecin de famille (2021)

2021-19-25. Si l’on se fie à une observation de Confucius, il est fort normal qu’on cafouille lorsqu’on aborde le dossier des médecins faussement dits « de famille ». L’édition imprimée du Soleil du 23 octobre nous offre la manchette : « Pour en finir une fois pour toute avec la ‘pénurie’ de médecins de famille (p. 10). C’est le mot « pénurie » qui est guillemeté et non «médecins de famille»! Plus loin, Jean-Marc Salvet parle de la promesse de la CAQ, en 2018, de faire en sorte que chaque Québécois ait son « médecin de famille ». En somme, une famille de quatre personnes devrait avoir, en principe, quatre « médecins de famille », si les mots ont un sens. De là, l’idée de citer Confucius : «Tout d’abord il faudrait préciser le sens des mots […] Si le sens des mots n’est pas précisé, le langage ne correspond pas à la vérité. Si le langage n’est pas véridique, les affaires ne peuvent pas être achevées » (Confucius; Paris : Éditions Seghers, 1962). Bref, l’État devrait faire en sorte que chaque Québécois ait un médecin, tout simplement.

Prérequis ou préalable ? (2021)

2021-10-24. On utiliserait en territoire laurentien le substantif « prérequis » sous l’influence de l’anglais « prerequisite». C’est le professeur Pierre Cardinal qui le dit ou l’écrit (Le VocabuAide, 2009). Le mot est dans le Petit Robert avec la note « d’après l’anglais… » et son synonyme français, « préalable ». Son intégration ne semble pas avoir posé problème du côté français. Par contre, ici, il a donné lieu à une valse hésitation. L’OQLF recommande de ne pas l’utiliser au sens de « préalable ». Madame M.É. de Villers note que celui-ci est à privilégier (2021). Tout ce petit détour s’explique par le passage d’un article du Journal de Québec sur les salles de sports : « Seul prérequis, le passeport vaccinal…» (24 octobre, p. 26). Le mot fait partie du lexique français. On n’y peut rien. Sauf se rappeler qu’il avait et qu’il a toujours un équivalent en français : «préalable».

Contracteur ou entrepreneur? (2021)

2021-10-23. Armoires PPM publient des pages publicitaires depuis le printemps 2021 dans les quotidiens de Québec. L’entreprise a beaucoup de facilité à présenter des impropriétés et des anglicismes! Au cours des mois, les lecteurs ont constaté qu’elle ignore les expressions «salle d’exposition», «concurrents» ou «joindre quelqu’un au téléphone». Une nouvelle faille apparaît dans une page du Soleil (23 octobre, p. 9). On ignore cette fois-ci le mot «entrepreneur» au profit de l’anglicisme «contracteur», lequel n’est pas français, mais plutôt un franglicisme classique. Alphonse Lusignan l’a dénoncé à la fin du XIXe siècle et les critiques à son égard sont constantes depuis. Encore en 2006, Jean Forest écrit sur le sujet : «… pour peu que le correcteur automatique de votre ordi soit aux aguets, il soulignera ce 'contracteur' d’une ligne rouge ondulée parce qu’il sait que ce mot n’existe pas […] C’est bien la preuve […] que les Québécois ne consultent pas leur dictionnaire… » (Les Anglicismes de la vie quotidienne, 2006).

Liqueur ? (2021)

2021-10-22. À Pizza Ramo. Votre pizzéria annonce encore «Gratuite / Liqueur de 330 ml à l’achat de toute taille de pizza» (L’Antidote, oct.-nov. 2021, p. ). Si vous consultez le premier dictionnaire français à votre portée, vous lirez une définition qui ressemblera à ceci : «Liqueur. Boisson sucrée alcoolisée». Bref, en principe, vous devriez offrir une crème de menthe, du cointreau ou une prunelle de Bourgogne à vos clients si on en croit les coupons publicitaires de L’antidote. Si c’était le cas, ils seraient agréablement surpris. Mais ils devinent sans doute que vous employez le mot sous l’influence de l’anglais «liquor», de liqueur forte et de liqueur douce. Il y a des solutions de rechange : «boisson gazeuse» ou «soda». C’est mieux que «liqueur», plus juste, plus contemporain et plus économique!

Médecin de famille (2021)

2021-10-20. Le Devoir nous rappelle, à l’occasion de l’ouverture d’une nouvelle session de l’Assemblée nationale, que la décentralisation du réseau de la santé et l’accès à un MÉDECIN DE FAMILLE faisaient partie des promesses de la Coalition Avenir Québec en 2018 (20 octobre, p. A6). Monsieur Legault utilise l’expression et les médias la reprennent comme un mantra (Première chaîne, 18 h 2). Quand on réfléchit au sens des mots, on voit bien que l’expression n’exprime pas la réalité. Les médecins ne prennent pas en charge les familles, mais un ou des individus de la famille et très rarement tous. Elle n’existait pas en 1970. De fait, elle n’apparaît pas dans les Travaux du comité d’étude des termes de médecine du Québec (Ayerst), ni dans le Bélisle (1979), ni dans le Dictionnaire québécois d’aujourd’hui (1992). Le Québec était-il sans médecins? 

Joindre, partager (2021)

2021-10-19.  Il est toujours désespérant de voir de disgracieuses formes fautives dans les messages d’institutions importantes. C’est le cas du regroupement «Québec ville en rose». On y lance la 10e édition d’une campagne annuelle et on y laisse distiller un calque de l’anglais («Joignez le mouvement») au début du message publicitaire et une forme discutable («Nous sommes fiers de vous partager notre vidéo…» à la fin (courriel diffusé à 11 h 4 le 19 octobre). Un réviseur décèlerait ces tournures courantes, mais habituellement critiquées. Le verbe joindre peut être transitif (joindre les deux mains) mais il en va autrement quand il signifie adhérer à un groupe. Un correcteur aurait proposé : « Joignez-vous au mouvement ». Et il aurait sans doute proposé la formule : «… fiers de partager notre vidéo avec vous». Bref, un réviseur est toujours utile.

Soi-disant (2021)

2021-10-19. Le vieux Guide de rédaction (2006) de la Presse canadienne note prudemment, à l’article «soi-disant» : «En règle générale, ne s’applique qu’aux personne (physiques ou morales». Question de logique dit-on. Pourtant, on lit encore, à propos d’une prétendue ou supposée fraude : «808 063,97 $ facturés pour de soi-disant formations » (Le Journal de Québec, 18 octobre, p. 5). Les séances de formation elles-mêmes pourraient se désigner de la sorte, elles parleraient! Merveille! Plus sérieusement, l’Académie note encore (en 2020) qu’on ne doit employer la locution qu’avec des êtres vivants. On ne respecte pas toujours la règle cependant. Mais ce n’est pas une raison d’en faire autant et de négliger les solutions de rechange, les adjectifs «prétendu» ou «supposé».

Temps supplémentaire (2021)

 2021-10-17. Ni le journaliste ni le titreur du Journal de Québec n’ont sans doute contre-vérifié. Ils se sont fiés au langage ambiant. Le journaliste n’en a que pour «temps supplémentaire…» (17 octobre, p. 5). Un simple coup d’œil au Multi dictionnaire (aux mots Temps ou Supplémentaire) leur aurait mis la puce à l’oreille : «temps supplémentaire. Calque de ‘overtime’ pour ‘heures supplémentaires». Si cette première démarche ne les avait pas convaincus, ils auraient pu consulter à distance le Grand dictionnaire terminologique de l’Office et prendre connaissance du conseil suivant : «Temps supplémentaire, Surtemps / Il faut éviter d'employer les termes temps supplémentaire, qui constitue une impropriété en ce sens, et surtemps…». On peut supposer que les propriétaires de Québecor médias approuveraient l’utilisation de l’expression recommandée (HEURES SUPPLÉMENTAIRES) et la mise au rancart de l’impropriété.

Avenue Belvédère (2021)

2021-10-16. Les lecteurs du Soleil tiqueraient si un journaliste écrivait : « rendez-vous coin Collège et chemin Royal ou Coin Bravoure et Maire-Beaulieu ou encore Lilas et 1e Avenue. Pourtant le chroniqueur François Bourque le fait. Il écrit «coin Belvédère et René-Lévesque» (16 octobre, p. 10). Bien sûr, il peut exciper du fait que tout le monde dit «Avenue Belvédère» et que le comité de toponymie de Québec a entériné l’odonyme. Il arrive qu’on entérine des toponymes parce qu’ils sont utilisés même si ce sont des anglicismes. Il y eut sans doute dans le passé un belvédère qui permettait aux citoyens de contempler la basse-ville et les Laurentides. Un journaliste pourrait peut-être semer le doute sur le bien-fondé de l’appellation.

Corporatif (2021)

2021-10-15. Les négociations internes à Radio-Canada sont difficiles. Chacun protège son domaine. Obtenir des minutes supplémentaires pour une émission au dépens d’une autre serait «corporatif» selon l’expression du chef d’antenne (R.C. Québec, vers 17 20 le 15 octobre). « C’est corporatif » a-t-il dit et répété à une occasion. L’adjectif est une impropriété en la circonstance. L’esprit corporatif est avant tout l’esprit de corps de groupes de professionnels organisés en corporation (médecins, avocats…) afin de protéger le public. Mais l’anglicisme est tellement implanté qu’on le répète sans s’en apercevoir et en élargissant sa signification. Dans le contexte, l’animateur voulait dire que les services défendent bec et ongles leur carré de sable, leur petite chapelle, leur territoire, les horaires de leurs émissions. Du corporatif? Mieux : du clanisme! 

Bagels ou baguels ?

2024.04.01. Les bagels que l’on trouve sur le marché pourraient être des baguels. En français, cela va sans dire! Selon Lionel Meney, «bagel...