lundi 19 juillet 2021

Cabinet fantôme (2015)

2015.11.23. Un gouvernement fantôme, c’est un gouvernement qui n’a guère de réalité selon le Petit Robert. On suggère l’analogie « inexistant ». En serait-il de même d’un « ‎cabinet fantôme »? Si l’on traduit de manière littérale l’expression « shadow cabinet », on aurait « cabinet de l’ombre ». La traduction semblerait moins péjorative. L’Assemblée nationale perçoit probablement un certain malaise face à « cabinet fantôme ». On guillemette l’expression du titre de l’article publié dans l’Encyclopédie du parlementarisme québécois. On donne la traduction courante, mais on suggère l’utilisation de « contre-gouvernement » et de « contre-cabinet », même si les deux expressions, lancées dans les années 1980, n'ont pas connu un grand succès. Il est vrai que les répertoires correctifs (Banque de dépannage de l’OQLF, Multidictionnaire…, Mieux dire mieux écrire, etc.) n’ont pas suivi les brisées de l’Assemblée sur le sujet. Il y a quelques jours, un article de la Presse canadienne (le Soleil, 21 novembre, p. 16) annonçait « Trois députés dans le cabinet fantôme… ». Il serait préférable qu’ils soient des contre-ministres, non des ministres fantômes!

Formes passives (2015)

2015.11.24. Citation de Jean-Marc Léger (2004): « L’anglicisation s’exprime principalement sous deux formes. C’est d’abord le recours grandissant au mode passif, qui de plus en plus supplante l’actif, régime habituel du français et, d’autre part, … / Ainsi, on ne compte plus les tournures du genre : les mesures à être envisagées, la maladie en voie d’être circonscrite, les élections partielles à être tenues le jour X, les propositions à être faites lors du congrès, des commandes à être reconfirmées, les ‘marines’ ont été empêchés d’avancer, on a des travaux qui ont été entrepris dans la rue Z, et des dizaines, des centaines de formules de même encre chaque jour, dans la presse écrite mais bien plus encore à la radio et à la télévision… » (L’Action nationale, avril 2004, p. 19). 

Billets de saison (2015)

2015.11.25. « ‎Les billets de saison sont en vente ». Tel est un message publicitaire d’InfoPortneuf (24 novembre) . Le site web de la ville de Saint-Raymond publicise aussi le calque « billet de saison » et néglige l’équivalent français « abonnement ». Pourtant, les dictionnaires et les guides de traduction (Le Robert Collins, Meertens) rendent « season ticket » par « carte d’abonnement » ou par le seul mot « abonnement ». De même, les répertoires correctifs québécois (B.D.L., M.É. de Villers, Camil Chouinard, Paul Roux…) critiquent et dénoncent le calque. Une association de défense de la qualité du français (l’Asulf) a fait des démarches auprès des Nordiques en 1994 et les propriétaires avaient alors adopté le mot « abonnement ». Les mauvaises expressions sont des plantes vivaces. Le désherbage s’impose constamment. La sensibilisation des entreprises qui vendent des abonnements et leurs publicitaires est toujours à renouveler. Aux lecteurs conscients de jouer!

Abonnement de saison (2015)

2015.11.26. Les diplômés de l’Université de Montréal viennent de recevoir (26 novembre, 15 h 40) un message publicitaire de leur alma mater. On les invite au match des Carabins contre une équipe fantôme (on ne l’identifie pas). Le message est bien fait et bien présenté. Cependant, au moins deux corrections seraient à prévoir l’an prochain si… Deux titres font problème : « Dans l’autobus des partisans » et « Abonnement de saison ». En français, un autobus est un véhicule de transport urbain. Pour les circuits interurbains, on utilise des autocars. Les rédacteurs s’en doutaient. Ils ont écrit le mot dans le texte. L’an prochain, il faudra adapter le titre... À moins que les Montréalais considèrent que Québec est sa banlieue éloignée! Quant à « Abonnement de saison » (ou « billet de saison »), c’est un calque de l’anglais. L’expression « de saison » y est inutile. En français, le mot « abonnement » dit tout et exactement la même chose. On achète un billet ou on prend un abonnement. Pour une fois que le français est plus court, il y aurait lieu d’en profiter. Économie d’énergie!

Vendredi noir (2015)

2015.11.27. Vendredi fou, vendredi noir ou black Friday? Les lecteurs du Soleil, ceux de l’édition du 27 novembre, qui ont fait le relevé des placards publicitaires seront arrivés au résultat suivant : vendredi fou : 12; vendredi noir : 5; black Friday : 2. Les observations de l’O.Q.L.F. semblent prises en compte. On privilégie « vendredi fou », on déconseille « vendredi noir » et l’expression anglaise. Oublions cette dernière que les entreprises devraient réserver à un milieu anglophone. Le choix entre les deux traductions françaises s’explique par le côté exceptionnel et excitant de « fou » et par le côté plutôt morose et sombre de « noir ». Le progrès de « vendredi fou » est à souligner. L’effort de l’Office y est pour beaucoup. Comme les pressions des militants de la qualité de la langue. Comme le vote (pécuniaire) des consommateurs, lesquels encouragent les établissements qui optent pour les expressions recommandées. L’appropriation du français et de son lexique passe par de tels petits pas.

Prononciation: AirBnb (2015)

2015.11.30. Les journalistes francophones de Radio-Canada devraient prononcer le nom des réalités importées de l’extérieur, surtout des États-Unis, selon la phonétique propre à notre langue. De la sorte, ils pourraient influencer les spécialistes invités au micro. On vient de parler de l’application AirBnB (28 novembre à la première chaîne). Et, bien sûr, on ignore la prononciation française : air-bé-n-bé. Il en fut de même lors d’une entrevue du début de l’été (4 juin, Café show, 8 h 19 +) avec le professeur Dany Bélisle de l’Université de Sherbrooke. D’entrée de jeu, la journaliste G. Michaud-Sauvageau a prononcé le sigle-acronyme à l’anglaise. Inévitablement, le spécialiste a fait la même chose une dizaine de fois en dix minutes. Les auditeurs ont enregistré la même musique quinze fois au total. Aussi auront-ils, à leur tour, de la difficulté à donner des sons français à l’appellation au moment où ils en auront besoin. Les journalistes sont les prismes qui permettent aux Québécois de comprendre les phénomènes étrangers dans leur propre musique. Comme le font les journalistes étrangers qui présentent le Québec ailleurs.

Bon matin! (2021)

 2021-07-17. Un chef d’antenne de Radio-Canada a annoncé que le conseiller linguistique Guy Bertrand ne s’opposait pas à l’utilisation de «Bon matin» (vers 9 h 5, 17 juillet). Il est fort possible que la généralisation de l’expression rende toute critique inutile. Les fautes passées deviennent parfois des règles. C’est précisément le sens d’une note consultable dans Le Français au micro : «… certaines personnes utilisent la formule 'bon matin' sous l’influence de l’anglais. Cette façon de saluer n’est pas recommandée en français. […] la formule [...] n’a pas été consacrée par l’usage […] En anglais et dans les langues germaniques, il existe une formule de salutation spéciale pour la matinée (Good morning, […]). Ce n’est pas le cas en français ni dans les principales langues latines. Dans ces langues, l’usage veut qu’on se dise 'bonjour' […] du lever au coucher du soleil». Bref, l’usage s’imposera peut-être, mais pour l’heure, «bonjour» semble encore préférable..

Prononciation: camping (2021)

 2021-07-15. Un correspondant de l'Asulf a essayé de convaincre le journaliste radio-canadien Louis Martineau de prononcer le mot «camping» comme on le fait pour «campeur». Donc «quand pigne» et «quand peur», en nasalisant le «am», comme le recommande le Petit Robert. Le journaliste a fait savoir à l'auditeur qu'il continuera à prononcer le mot à l’anglaise. André Belleau a noté, il y a quarante ans, l'écart entre la normalité et le modèle radio-canadien: «Situation normale: la langue accueille selon son propre système phonique la diversité linguistique [...]. Modèle imposé par Radio-Canada: la langue est incapable de recevoir la pluralité, elle doit se soumettre au système des sons de la langue unique: l'anglais» (Liberté, mai-juin 1980, p. 7). Au demeurant, on peut lire sous la plume de G. Bertrand, conseiller du réseau : «Le mot ‘camping’ se prononce à la française. Il faut donc dire KAM-PING et non pas 'kammm-ping» (400 capsules... 1999, p. 48). C’est dire que le correspondant est en bonne compagnie.

Futur ou Avenir ? (2021)

2021-07-13. En français, on fait une distinction entre les substantifs «futur» et «#avenir». Aussi peut-on juger ambigüe une manchette récente du Journal de Québec (8 juillet, p. 4) : « La diaspora haïtienne très inquiète pour le futur du pays». Une note de l’Académie française est on ne peut plus claire sur le sujet : « 'Avenir' désigne une époque que connaîtront ceux qui vivent aujourd’hui, alors que 'futur' renvoie à un temps plus lointain, qui appartiendra aux générations qui nous suivront. Employer en ce sens 'futur' pour 'avenir' est un anglicisme qu’il convient de proscrire » (Dire, ne pas dire, vol. 3, p. 75). Deux répertoires québécois mettent également en garde les locuteurs, le Multi dictionnaire (7e édition, 2021) et Usito, sans être l’un et l’autre aussi directs. Le mot est jugé «anglicisme» par le Colpron (1999) et par le Grand glossaire des anglicismes (2011). Il est à espérer qu’on ajoutera une note sur le sujet dans la marche des journaux de Québecor.

Prononciation: zoo (2021)

2021-07-13 Les auditeurs de C’est encore mieux l’après-midi, sans doute environ 20 000, ont entendu Marc-André Boivin, le spécialiste des bouchons de circulation, diffuser la prononciation «zou» en lieu et place de «jardin zoologique» ou de l’apocope «zoo» (15 h 9 le 12 juillet). Selon Jean Marcel, on peut corriger son langage : « … les mots ne sont pas faits que d’habitudes acquises […] un homme a plusieurs occasions dans sa vie de modifier ses habitudes sur tel ou tel mot pour en acquérir d’autres […] une langue … institution acquise, modifiable, toujours en voie d’acquisition …» (Le Joual de Troie). Premier effort : lire l’observation du Multi dictionnaire (2021) : «Les lettres oo se prononcent comme un seul o ou comme deux oo (zo) ou (zoo) (et non ou». Deuxième effort, assimiler la correction. Troisième effort : la mettre en pratique. Retombées : les auditeurs le remercieront. S’il doute de l’avis du Multi, il pourra voir le commentaire du service linguistique du réseau (http://linguistique.radio-canada.ca/search-fam/?qfam=zoo).

Toponymie: Le Caire, Les Méchins... (2021)

2021-07-12. Le noms de villes comportant un article font problème. Le Soleil numérique présente la manchette : «Kyoto, Caire, Dakar, Stockholm […] dans les rues de Québec» (12 juillet, 4 h 17). Dans une telle énumération, il y aurait lieu d’écrire « Le Caire », comme on le ferait avec «Los Angeles», «Les Éboulements», «Les Méchins», «La Ciotat» ou «Le Mans». Le respect du toponyme commande dans la circonstance le maintien de l’article. Les lecteurs trouveraient étrange et, pour tout dire, ambigüe, une liste ainsi présentée : Angeles, Caire, Ciotat, Éboulements, Machins, Mans, Vegas… Bref, les correcteurs, les titreurs et les journalistes devraient être alertés au moment opportun par leurs guides de rédaction.

Langue des médias (2021)

2021-07-11. Denis Gravel quitte CHOI Radio X. Le Soleil lui consacre un long entretien (10 juillet, p. 2). Il faut espérer que son successeur saura illustrer mieux que lui le bon français. Le reportage du journal révèle un certain nombre de lacunes. Entre autres, il y aura lieu que le successeur parvienne à remplacer, sur les ondes et dans la presse, le «tu» du registre familier («Un matin, tu te lèves […] et tu réalises…) par un pronom mieux adapté, qu’il sache employer les équivalents français des mots anglais «gang», «fun», «show», «switch on-off», «ratings», qu’il puisse distinguer la notion d’«opportunité» de celle d’«occasion», qu’il réussisse à dire «avoir de la difficulté» au lieu d’«avoir de la misère» et même à moderniser le français courant («dénoncer»… au lieu de «varger sur…; «mon petit sceau d’eau» au lieu de «ma petite chaudière…»). À l’heure où les Québécois attendent une nouvelle Charte de la langue, on peut espérer que les ondes fassent leur part côté qualité.

Lorsque... contacté (2021)

 2021-07-09. Deux journalistes du Devoir utilisent une tournure anglaise sans s’en rendre compte. Annabelle Caillou écrit : « Lorsque contactée par Le Devoir…» (8 juillet, p. A4, 2e col.) et Fabien Deglise : «… lorsque joint par Le Devoir…» (ibid, p. A3, 2e col.). Lionel Meney aligne près de dix exemples semblables (Lorsque allumé, lorsque interrogé, lorsque mis en échec, lorsque perché, lorsque questionné, lorsque reçu) dans le Dictionnaire québécois-français. Il les qualifie de calques de l’anglais. Pierre Cardinal (Le VocabulAide) en arrive à la même conclusion et il note : «Sous l’influence de l’anglais 'when' + participe passé». En français, on pourrait écrire : «Lorsque Le Devoir l’a contactée…» et «… lorsque Le Devoir l’a joint». Ces deux propositions ne sont pas limitatives. Le défi est avant tout de prendre conscience du fait que le français d’ici est dominé par les pratiques de l’américain. Les correcteurs informatiques des journaux devraient sonner l’alerte quand il le faut.

Majuscules inutiles (2021)

2021-07-01. L’Institut canadien de Québec (ICQ) présente une intéressante vidéo de son histoire et de la Maison de la littérature. En objet du courriel de promotion (diffusé à 10 h le 30 juin), on lit : « Découvrez l’histoire de la Maison de la littérature et de L’ICQ » (noter le L majuscule). Le texte de la présentation est reproduit à l’écran grâce à un bandeau déroulant. Cela permet de constater que l’Institut reproduit inutilement une règle d’écriture de la typographie anglaise du du XIXe siècle. On écrit dans la loi de l’Institut «… The Institute…» et «… L’Institut…» à l’intérieur des phrases (T» et «L»). Chose intéressante, dans la version anglaise de la porte-parole, la transcription est «… the Institute» («t» minuscule). En français, on reproduit une douzaine de fois «… L’Institut…». En somme, on a adopté la règle d’écriture française pour le texte anglais et on maintient la règle anglaise dans le texte français. Un ajustement s’impose.

Tournure: Être dans le trouble (2011)

 2021-07-02. Voici une manchette exemplaire (!): «Le CH est dans le trouble» (Le J. de Qc, 2 juillet, p. 70). Tous les mots sont français. La tournure est bien implantée dans la langue des Québécois. Certains parmi nous seront très fiers de la créativité des locuteurs. En français, on dit plutôt, «avoir des ennuis, des problèmes, des difficultés», «être dans le pétrin». Si l’on descend d’un cran, on pourrait entendre «être dans la sauce, dans la mélasse, dans un sacré merdier», etc. Mais nous sommes créatifs à peu de frais. Nous avons réussi à traduire mot à mot l’expression anglaise courante «to be in trouble». Mais cela ne justifie pas sa présence dans une manchette de quotidien. Les journalistes devraient douter et avoir la curiosité de contre-vérifier son existence… en français.

vendredi 2 juillet 2021

Match no 2 ? (2021)

 2021-06-30. Il semble curieux de lire à la Une du Journal de Québec (30 juin) : «Match no 2; Comment ralentir le Lightning?». Pensons à d’autres situations : Congrès no 2, Colloque no 38, Assemblée annuel no 18, Jeux olympique no 22, etc. Les convocations aux assemblées annuelles ou aux conseils d’administration des associations annoncent plutôt «18e assemblée…» et les invitations se déclinent : «Le président invitent les membres à s’inscrire au 2e congrès» ou «… au 38e colloque». Par le passé, à l’époque où on faisait mettre les élèves en rang, on disait «le premier», «le deuxième»… On aurait trouvé cavalier de désigner chacun et chacune par un simple numéro : «le un», «la deux». Il est fort possible que la manchette relevée soit inspirée par des pratiques nord-américaines. Elle frappe comme un coup de marteau. Sans doute plus que «2e match».

Province (2021)

 2021-06-29. Matthieu Bock-Côté s’en prend au mot «province» pour des raisons constitutionnelles. («Le maudit mot ‘province’», Le J. de Qc, 29 juin, p. 23). Son point de vue est tout à fait valable et les spécialistes des sciences politiques seront d’accord. Il est une autre raison de dénoncer le mot. On lit dans le Dictionnaire historique (A. Rey) : «Depuis le XIXe siècle, ‘province’ s’emploie avec une acception spéciale dans le cadre du Canada (1867) : il s’agit d’un anglicisme, le mot désignant en anglais les États fédérés formant le Canada.» Cela nous rapproche d'une observation de Gérard Dagenais : «’Province’ … désigne seulement une partie d’un empire […] Les États canadiens […] ne sont pas des ‘provinces’. Ce sont des États au sens strict » (La Presse, 23 mars 1966). C’est dire que linguiste et publiciste sont d’accord en dépit de perspectives différentes.

Onomatopées: splash! (2021)

 2021-06-28. Les onomatopées et exclamations françaises sont souvent perçues comme étrangères en sol québécois. On dit «atchou», mais non «atchoum, on dit «mozusse», non «flûtes», on dit «maudite marde!» et non «bordel de merde». Une manchette du Journal de Québec en fournit un autre exemple : «La Brigade Splash est de retour…» (27 juin, p. 😎. De fait, l’onomatopée fait partie de l’appellation d'une brigade de la Société de sauvetage destinée à la sensibilisation aux dangers de la noyade. Le mot n’est pas français. On ne le trouve pas dans le Petit Robert. Un dictionnaire de traduction recommande, en français, les équivalents «plouf» ou «floc». Les onomatopées varient selon les systèmes phonologiques. Au Québec, ce dernier est mis en échec. De là le «Splash!» anglais ou américain et l’ignorance de ses équivalents français.

Journaux et correction (2021)

 2021-06-27. Le Soleil amuse gentiment ses lecteurs en leur proposant chaque fin de semaine «Le mot caché Antidote». L’exercice est sans doute stimulant. Mais n’y aurait-il d’autres priorités? Le bandeau de l’édition de samedi (26 juin, p. 2) est coiffé d’un article intitulé : «On ne protège pas les victimes…». La journaliste, M. Moisan, reproduit quelques «belles» expressions de son informatrice : «il avait de la drive» (le feu sacré? ), «l’air de la personne qui allait fiter» (convenir?), «c’était OK» (entendu?) , «une bonne job» (poste?, bon boulot? ) , «je pleurais dans mon bain» (baignoire), «la traiter comme une ‘vidange’» (moins que rien?) , «je te flushe» (balance), «mon char était rempli» (auto, voiture). On peut comprendre la journaliste de donner une couleur locale à son reportage, de profiter des lacunes d’une locutrice. C’est aussi l’exploiter. Mais, pour le moment, la fidélité des citations critiquables justifie le remplacement du bandeau actuel par des exemples de solutions de rechange.

Partager ses archives (2021)

 2021-06-25. Les sépultures approximatives réservées à des jeunes amérindiens du Canada font la manchette. Un spécialiste du monde religieux, Alain Pronkin, se demande si les religieuses du pensionnat de Marieval, au Saskatchewan, ont conservé les archives de l’établissement et si elles acceptent de les «partager» (J. de Qc, 25 juin, p. 😎. Cela suppose qu’on applique une méthode utilisée, dit-on, lors de la partition de l’Inde et du Pakistan. On y avait, semble-t-il, partagé une encyclopédie britannique entre les deux pays : vol. 1 à l’Inde, vol. 2 au Pakistan, etc. Inutile de dire que la méthode était plus que simpliste, mais elle illustre ce que serait le partage des archives des Sœurs de Saint-Joseph : dossier des sépultures de 1919 à un centre d’archives, celui de 1920 à un autre… On ne peut qu’espérer que le spécialiste a mal traduit «to share their archives». Comme il arrive souvent quand on dit : «partager un renseignement». Dans le cas d’archives, on devrait dire : «les ouvrir», «en permettre l’accès», «les rendre accessibles».

Saskatchewan (en? la?) (2021)

021-06-24. On écrit «au Québec», «au Portugal», «au Kansas», «au Cameroun». On considère ces toponymes comme masculins. Ils commencent et se terminent par une consonne. Pourquoi n’écrit-on pas «au Saskatchewan»? et pourquoi se contente-t-on de «en Saskatchewan»? On lit dans le Courrier du soir du Devoir (24 juin) , «Aujourd’hui, 751 sépultures […] ont été retrouvées […] en Saskatchewan». Règle générale, on devrait dire «au Saskatchewan» et «le Saskatchewan». On note dans le Dictionnaire québécois-français : «en français canadien, le mot […] appliqué à la province, est fém. (la Saskatchewan); en français standard, il est masc. (le Saskatchewan) quand il désigne la province […] fém. (la Saskatchewan), quand il désigne la rivière». Bref, le français permet de distinguer la province de la rivière. Personne n’ose faire le pas.

Faut-tu pas...? (2021)

2021-06-22. Les assemblées parlementaires publient les comptes rendus intégraux de leurs débats. Des réviseurs corrigent les fautes des orateurs sans changer le sens de leur pensée. La langue d’un ou d’une élue peut lui avoir fourché, il ou elle peut avoir utilisé un barbarisme, avoir massacré un proverbe. Les relecteurs interviennent et proposent des corrections acceptées la plupart du temps par les orateurs. C’est dire que les textes publiés dans le Journal des débats de l’Assemblée nationale peuvent être légèrement modifiés. Pourquoi la presse ne pourrait-elle pas faire de même? Ainsi, quand le maire Labeaume ne se méfie pas et affirme : «Faut-tu ne pas avoir confiance en son projet?» (Le J. de Qc, 22 juin, p. 12), le journaliste devrait prendre l’initiative de corriger l’affirmation en en respectant le sens et la tournure. Monsieur le maire serait sans doute heureux de lire : «Faut-il ne pas avoir…». Et les lecteurs du journal apprécieraient une phrase plus soignée que celle lancée tout à trac.

Appeler une punition (2021)

 2021-06-21. Les éliminatoires du hockey retiennent l’attention. La brutalité aussi. Pour en parler, Radio-Canada a invité un ancien arbitre, Bernard de Grâce (R.C., Québec, 21 juin, 15 h 40). En moins de dix minutes, il a aligné de beaux anglicismes : saison régulière, manque de support, définitivement, power play, un gap et surtout l’expression «appeler une punition» et ses variantes. Le verbe «appeler» vit souvent sous l’emprise du verbe anglais «to call» en français du Québec. Le Multi dictionnaire donne quatre exemples. Paul Roux note que le verbe est grandement influencé par son voisin. Colpron signale l’anglicisme et propose des solutions de rechange : annoncer, infliger, imposer et donner. On peut supposer que les services linguistiques de Radio-Canada peuvent suivre les brisées de René Lecavalier et de Jean-Maurice Bailly, étudier l’anglicisme, suggérer le bon usage à ses animateurs et peut-être à leurs invités.

Oeuvrer (2021)

 2021-06-20. Les médias aiment bien le verbe «œuvrer». Le verbe a longtemps signifié « travailler », mais il a pris le sens de travailler à quelque chose de noble au XXe siècle. Paul Roux observe : « Ce verbe n’est pas un banal synonyme de travailler. Œuvrer, c’est travailler à une œuvre artistique, travailler avec désintéressement… » (Lexique des difficultés du français… 2004). Vingt ans plus tôt, Jean Darbelnet nota : « Parfois employé abusivement au sens de travailler pour gagner sa vie […] un travailleur n’œuvre pas là où il reçoit son salaire, il y travaille » (Dictionnaire des particularités de l’usage). On lit pourtant dans le Soleil (19 juin, p. 12) « Députée caquiste […] celle qui a auparavant œuvré dans le milieu de la télévision pendant quarante ans ….». Si cela correspond à la réalité, il faut accepter le verbe. Autrement…

Endosser (2021)

 2021-06-19. On lit dans le Soleil, sous la plume du journaliste Olivier Bossé et à propos de la députée Claire Samson de la CAQ, «… même si elle n’endosse pas encore toutes les positions de son chef…» (19 juin, p. 12). Le verbe «endosser» signifie entre autres choses « accepter la responsabilité ». Mais il ne signifie pas «souscrire ou adhérer à une opinion». Le professeur Pierre Cardinal note que le verbe anglais «to endorse» déteint sur le verbe français et lui fait prendre des sens qu’il n’a pas. Deux auteurs de répertoires destinés à la presse écrite épinglent l’anglicisme. Paul Roux (2004) note : « … on n’endosse pas une opinion on y souscrit». Et Camil Chouinard (2007) : «… il faut éviter d’employer ‘endosser’ au sens d’approuver un projet, un décision….». On laissera au journaliste et aux correcteurs du Soleil le soin de consulter Usito et la Banque de dépannage linguistique avant d’oser employer le verbe.

jeudi 1 juillet 2021

Shit (2018)

2018.07.10. Le Journal de Québec écrit en manchette : «Shit, il y avait trop de pluie» (9 juillet, p. 5). La citation appartient à Dave Grohl des Foo Fighters à qui on a demandé quel souvenir il gardait du spectacle écourté de 2015. Peut-on faire l’hypothèse qu’il a dit : «Shit! there was too much rain». S’il lui fut possible de dire : «il y avait trop de pluie», il doit connaître l’interjection «Merde!» En somme, le journaliste serait parvenu à traduire l’essentiel de la phrase mais il aurait buté sur l’interjection ou l’a-t-il confondu avec un mot français. On confond assez facilement les vocabulaires français et anglais au Québec. Diantre! On y ignore les interjections françaises. La consultation du Larousse ou du Robert ou même un dictionnaire bilingue de l’anglais au français s’impose. Selon le Grand Robert & Collins, on rend «Shit! » par «Merde» dans la langue de Molière.

Soixante-dix (prononciation) (2018)

2018.07.14. Un correspondant m’écrit (14 juillet) : «Ce matin, à RDI, de Montréal: "...soixante-disse kilos». Il a raison. Jacques Laurin observe «Devant une voyelle...  l’adjectif numéral ‘dix’ se prononce (diz) comme dans : dix enfant (di-zan-fan)… Devant une consonne, on prononce (di) comme dans : dix camions (di-ka-mion)…» (Améliorez votre prononciation pour mieux communiquer; les Éditions de l’Homme, 2007). Roland Godiveau (1000 difficultés courantes… 3e éd.; De Boeck & Larcier) avait fait une observation semblable deux ans plus tôt. Même Guy Bertrand (400 capsules linguistiques, vol. 2, 2010), premier conseiller linguistique du réseau fédéral de radiotélévision, note : «Contrairement aux chiffres cinq, six, huit et dix, dont la consonne finale devient muette devant un mot commençant par une consonne… ». Conclusion : certains journalistes devraient prendre un cours de prononciation, lire les remarques de G. Bertrand et s’habituer à dire «di-kilo».

Majuscules inutiles (2018)

2018.07.13. L’anglicisation de la langue des Québécois touche à bien des secteurs : vocabulaire, syntaxe, interjections, etc. Et même les simples règles d’écriture. L’institut canadien de Québec célèbre son 170e anniversaire. Le communiqué de la Ville, publié le 10 juillet, multiplie les «L» majuscules : «bénévoles de L’Institut…», «vous le savez, L’Institut…», «à L’Institut…», «au nom de L’Institut…», «un honneur, pour L’Institut… ». Le maintien de la majuscule du texte de loi du 19e siècle constitue un relent de l’influence de l’anglais. Le remplacement de la majuscule par une minuscule ne modifierait le sens des mots ni des phrases. Il y a belle lurette qu’on est passé à la minuscule à l’intérieur des phrases : on n’écrit pas «anniversaire de L’Énap» (mais … de l’Énap) et «histoire de L’Académie française» (mais… de l’Académie…). Le changement serait le bienvenu après 170 ans.

Exclamations: Fuck!

2024.03.01. La chroniqueuse Josée Blanchette aime bien parsemer ses textes de mots anglais. L’habitude fait partie de son style. Dans le Dev...