lundi 2 janvier 2023

Onomatopées: Pop! Pschitt! (2022)

2022.12.01. La  Société des alcools fait parvenir à ses clients un courriel intitulé : «Des Fêtes qui font pop!» (1er décembre, 11 h 1). En français, les Fêtes feraient plutôt «Pschitt!. Les publicitaires de la Société ignorent sans doute que les onomatopées désignant un bruit varient d’une langue à l’autre. Par exemple, le «glug-glug» anglais est rendu par «glou-glou» en français. De même, les canards danois ne font pas «coin-coin» mais «rap-rap» et une détonation se décrit par «Pan!» en français et par «Bang!» en anglais. On retrouve l’onomatopée «Pop!» dans le Grand Robert & Collins. Le premier équivalent proposé est «Pan!» Il y a mieux à faire. Le Petit Robert aligne «Pschitt» et une courte définition : «... bruit d'un liquide qui fuse...». Au demeurant, l'onomatopée a souvent sa place dans les mots croisés. En somme, la SAQ aurait mieux servi le français en employant «pschitt» plutôt que son concurrent anglais. 

Être dû pour... (2022)

2022.12.02. Je vois une manchette; «Comment mesurer le déclin du français au Québec?» Quelques secondes plus tard, c’est une citation du député André Fortin : «… on est pour une bonne conversation […] sur la monarchie» (Le Journal de Québec, 2 décembre, p. 2). L’expression serait un calque de la tournure anglaise «to be due for». Elle et les autres de même nature, inspirées de l’anglais, phagocytent des expressions françaises. Le phénomène n’est pas pris en compte quand on veut mesurer le recul de la langue commune. On s’efforce de parler démographie, de langue d’usage, d'origine linguistique des immigrants. Ce sont des données essentielles. Mais les locuteurs francophones, dans l’ensemble, négligent ou ignorent les mots et les expressions françaises. Colpron a récolté 2000 anglicismes en 1982, 5000 en 1999. Jean Forest en retraça 10 000 en 2008. Ce n’est peut-être pas décisif, mais il faudrait tâcher de mesurer la qualité du français parlé et écrit. 

Vintage (2022)

2022.12.03. La manchette «Table des Fêtes : touche moderne ou vintage« est reproduite trois fois dans le Soleil du 3 décembre (1e p., 1e p. du Mag et p. M25). Pourquoi «vintage» pour parler des tables de Noël? Le mot qualifie avant tout un porto d’un millésime particulier. L’Académie française note qu’on ne devrait pas appliquer le mot à des objets qui auraient pris de la valeur en vieillissant (Dire, ne pas dire). De fait, le Grand Robert & Collins ne traduit jamais le mot anglais par «vintage» pour qualifier des objets ou même des vins. On fait une observation semblable dans le Guide anglais français de la traduction (René Meertens). En somme une vieille voiture, un volume ou même un grand vin ne sont pas couronnés du titre de «vintage» par les traducteurs. Que proposent-ils? Sans doute : touche moderne ou traditionnelle, … ou classique, … ou du siècle passé. Mais il est tellement facile de traduire «vintage» par «vintage»!

Un drink (2022)

2022.12.04. Le Journal de Québec nous a habitué au médaillon  «En français S.V.P.». On le reproduit lorsque l’état de la langue des Québécois fait la manchette (recul, immigration, cégeps, etc.) Le Journal devrait le publier lorsque le vocabulaire ou les tournures françaises sont ignorées ou négligées. Il y a trente-six heures (3 décembre), la manchette du sommet de la Une était «Des drinks 100% d’ici». Les mots anglais que les locuteurs emploient au détriment des équivalents français constituent un premier pas vers leur anglicisation. Le Journal aurait pu écrire : «un apéritif», «une consommation», «un cordial», «un digestif, «une framboise», «une liqueur», «une poire», «un pot», «un verre», etc. Chaque mot repris sur le terrain de l’anglicisation est un pas vers la souveraineté… culturelle. Jean Marcel aurait été plus radical. 

Salle de montre ? (2022)

2022.12.05. Si on demandait à un étudiant quelle est la traduction française du mot «showroom», il se tournerait selon toute vraisemblance vers un dictionnaire de traduction. Il y verrait qu’on rend le mot par «salle d’exposition». C’est du moins l’avis du Grand Robert & Collins. S’il est fier d’avoir des notions approximatives de l’anglais, il proposera : «salle de montre ou pis «chambre de montre». C’est peut-être mieux que ce qu’on fait en France où on utilise le mot anglais. Les Armoires PMM ne vont pas jusqu’à imiter les entreprises françaises, mais elles se contentent du calque de l’anglais. Cela se voit cette semaine (5 décembre) sur la pochette du Publisac : «Salle de montre ouverte du lundi au…». On peut au moins reconnaître que le calque constitue un anglicisme furtif, difficile à identifier pour les locuteurs québécois et pour l’Office de la langue.

Black Friday, Vendredi noir ? (2022)

 2022.12.07. Matelas Dauphin fait publier des placards publicitaires dans le Journal de Québec. Ce fut le cas le 27 novembre et le 3 décembre. On y annonce «  Les soldes du vendredi noir ». L'expression est un calque de l'anglais «Black Friday». «Vendredi noir» signifie en français «jour dont on ne veut pas se rappeler», une catastrophe, une tuerie, une crise financière, etc. Le Jeudi noir du 29 octobre 1929, marque le début de la crise économique, le Vendredi noir du 9 janvier 1998, une panne d'électricité généralisée au Québec. Aussi, l’Office québécois de la langue a-t-il proposé il y a plusieurs années la traduction «vendredi fou», une journée de soldes importantes dans les magasins, des soldes folles, inespérées. La proposition fait l'unanimité ou presque. Matelas Dauphin fait exception ou peut-être n’est-il que retardataire. Mais ce faisant, il crée un anglicisme furtif, difficile à identifier pour les locuteurs lambda. De là, l'invitation à adopter «vendredi fou» l'an prochain. «Soldes du vendredi fou», c’est 100 sur 100; Soldes au lieu de «vente» et fou au lieu de «noir».

Abréviation: Dr ou Dr.? (2022)

2022.12.08. On abrège de façons différentes le titre de «Docteur» dans deux chroniques nécrologiques du Devoir (7 décembre, p. B4). Dans la première : «Dr Louis Authier…» (Complexe Pierre Tétrault) et dans la seconde : «À la mémoire du Dr. Jacques Francoeur…» (Lépine Cloutier). Dans un cas, on suit la règle d’écriture française. Dans l’autre, l’anglaise ou l’américaine. Le Français au bureau (2014) propose Dr (r en exposant ou non) et sans point. La règle appliquée est celle que Gérard Dagenais donne : «Pour les mots qui commencent par une consonne : la première et la dernière lettre» (Dictionnaire des difficultés de langue…, 1967). Alfred Gilder, un essayiste français observe pour l’abrègement de «monsieur» : «… l’anglaise ‘Mr’ (pour Mister) est courante, mais erronée». Il en va de même pour «docteur». La règle de nature technique est simple, mais elle n’est pas la même qu’en anglais où «Dr.» est de mise.

Référer quelqu'un ? (2022)

2022.12.09. La direction d’Énergie Cardio Vanier consulte ses abonnés et les invite à lui signaler des personnes qu'elle pourrait embaucher. L’offre manuscrite, placée sur un chevalet au gymnase, comporte une impropriété (référencement d’employé) et un anglicisme (référez cette personne). Le mot «référencement» désigne la rédaction de la référence d’un article, d’un livre ou d’un site web. Le verbe «référer» est transitif indirect ou pronominal en français. On ne peut pas «référer quelqu’un» mais on peut «se référer à quelqu’un» ou «en référer à quelqu’un». Dans le contexte, on aurait pu écrire : «Recommandez-nous cette personne», «mettez-nous en contact avec…». Il faut quand même reconnaître qu’il est difficile d’éviter l’anglicisme lui-même et l’impropriété qui se présente dans son sillage. 

Slaque! Confortable! (2022)

 2022.12.10. Le ministre Pierre Fitzgibbon a visité l’île de la Province (toponyme exemplaire!) et ses amis réunis à l’occasion d’une chasse au faisan. Le décor semble propice au déploiement d’un langage provincial. Le député Vincent Marissal juge que le ministre «a l’éthique assez slaque» (Le J. de Qc, 9 décembre, p. 12). Pour sa part, le ministre juge qu’une enquête de la commissaire à l’éthique pourrait rendre «confortables» journalistes et adversaires politiques (Ibid). Les deux politiques représentent l’État québécois. Ils devraient s’efforcer d’employer la langue commune et un registre approprié. Le mot anglais «slack» (même naturalisé sous la forme «slaque») n’en fait pas partie. L’équivalent serait plutôt «éthique lâche» ou «éthique molle». Côté journalistes ou opposants, ni les uns ni les autres ne deviendront confortables à la suite de l’enquête évoquée. On les imagine difficilement être confortables comme on le dit d’un fauteuil ou d’une voiture. Ils seront sans doute plus à l’aise.

De Kiev à Kyïv et de fun à fonne ? (2022)

2022.12. 11. Il y a neuf mois, le Journal de Québec décidait d’employer le toponyme Kyïv à la place de Kiev, graphie correspondant à la prononciation russe du nom de la capitale ukrainienne. C’était une excellente façon d’exprimer sa solidarité avec le pays attaqué par la Russie. Le Journal pourrait en toute logique favoriser la naturalisation de quelques mots anglais courants dans le français des Québécois. Un exemple. Le Journal met en première la manchette «Gros party … » (10 décembre). Si on applique la pratique Kiev = Kyïv, les titreurs pourraient adapter une graphie française (donc : Gros party = Gros parté»). On pourrait le faire également avec le mot «fun» et écrire «fonne». De fait, l’adoption d’une graphie fidèle au prononcé français s’inscrit bien dans le modèle du passage de Kiev à Kyïv. Par ailleurs, il faut dire que la recette fonctionne ici depuis plusieurs décennies. Des exemples : trestle = tracel, keating = quétaine, loose = lousse, etc.).

Tournures: Avoir de la misère ! (2022)

2022.12.11. Quelques personnes m’ont dit avoir sursauté en lisant la manchette du Journal de Québec : «Les cégépiens ont de la misère à écrire … » (11 décembre). L’expression «avoir de la misère» survit au Québec. La constatation est du Dictionnaire historique de la langue française. L’expression est jugée un dialectalisme. Ce statut explique son absence des répertoires spécialisés tels Expressio.fr ou ses éditions papier. Par ailleurs, les observateurs de la langue la critiquent. D’abord, Gérard Dagenais en 1967 : «… ce barbarisme qui survit […] est à proscrire» . Puis Camil Chouinard au tournant des années 2000 : «Il faut éviter de confondre misère et difficulté […] Misère est synonyme de malheur, d’adversité […] Au lieu de dire qu’on a de la misère à comprendre quelqu’un, on dira qu’on a du mal, de la difficulté à comprendre cette personne» (1500 pièges du français parlé et écrit). En somme, les titreurs du Journal n’ont pas tenu compte du sens des mots.

Une pièce législative ? (2022)

2022.12.12. Les journalistes de l’écrit susurrent à l’occasion l’expression «pièce législative». C’est le cas de Marc-André Gagnon du Journal de Québec (8 déc., p. 16). Il note que Gabriel Nadeau-Dubois préfère la pièce législative de son parti plutôt que celle du ministre Roberge. La «pièce ...» est ici un projet de loi. En anglais, on dit habituellement un «bill» ou, sans doute, «piece of legislation». On trouve, semble-t-il,  plusieurs exemples de cette dernières expressions dans le Cambridge English Corpus  Les « traducteurs de nature» que sont les Québécois font souvent de la translittération. Ils traduisent «pièce législative». Bref, ils commettent un anglicisme de combinaison au dire du professeur Meney. Les traducteurs, les vrais, au service des parlements québécois et canadiens, devraient y regarder à leur tour. 

Réguliers ? prix, tarif... (2022)

3022.12.14. La rédactrice des cartes publicitaires du trimestriel de l’Association québécoise des retraités… (AQRP) tient mordicus à l’anglicisme «régulier» associé aux mots «prix», «tarif», etc. Nous lui avons souligné en décembre 2019 que, ce faisant, la revue publicise un calque de l’anglas et nous lui avons même transmis l’avis de la Banque de dépannage de l’OQLF. Il y a eu un petit progrès. Le numéro de décembre 2019 alignait dix-huit «régulier», celui de septembre dernier, dix et le plus récent, onze. Voici un extrait de l'avis : «L’adjectif 'régulier' peut avoir plusieurs sens en français. Il peut signifier qu’une chose est conforme aux règles, qu’elle est symétrique, qu’elle a une vitesse, un rythme ou une intensité uniforme […] Toutefois, lorsqu’on l’utilise dans le sens de « courant », « ordinaire », « usuel » ou « normal », l’adjectif […] est un emprunt critiqué à l’anglais, puisqu’on lui prête alors le sens de l’adjectif 'regular'. On peut alors le remplacer, selon le contexte, par des adjectifs comme 'ordinaire', 'normal', 'standard', 'habituel' 'courant' et 'permanent'». La direction de la revue devrait revoir le dossier.

Des bières régulières ? (2022)

2022.12.16. Chalou se présente comme un « dépanneur de bières régulières et de microbrasseries» (Le J. de Qc, 16 déc., p. 15). Il ne s’est sans doute pas aperçu que sa présentation pourrait signifier que les bières des microbrasseries sont «irrégulières»! Et s’il était dans l’ordre de pouvoir acheter des bières «régulières», il le serait tout autant d’imaginer des cafés, du lait, des yoghourts, des sodas ou des coquetels «réguliers»! La panoplie serait exemplaire. On aurait alors, si l’on se fie au sens des mots, des produits de forme régulière ou des produits répondant à des critères fixés par des règlements. C’est dérailler. Pour être régulière, la bière devrait être conforme à des règles, constante (comme un pouls) ou encore avoir des proportions harmonieuses! On voit bien que l’on donne à la bière «régulière» un sens que l’expression n’a pas : une bière ordinaire, courante, classique. Bref Chalou serait un marchand de bières courantes… et artisanales…

Anglomanie des Français (2022)

2022.12.17. Il n’y a pas que les Québécois qui se moquent de l’anglomanie des locuteurs. Des Français le font. Hélène Carrère-d’Encausse, secrétaire perpétuel de l’Académie, le fait aussi. Voici un de ses billets. Le titre : Pour une soirée chez les fashionistas. «Conseils d’une coach au top 50 des people. Le dress code dit : casual chic. Adoptez la touche seventies boostée par le blouson customisé, shoppé à la brocante vintage du quartier. Une headband dorée dans les cheveux pour glamouriser la tenue. Le must-have de l’hiver qui assure la sécurité des girlies est le bijou self-defense, un sifflet doré. Les trendy n’oublieront pas le it bag, indispensable quand on assiste à une performance en live. ( dans Flâneries au pays des mots… / Académie française; Paris : Philippe Rey, 2022, p. 11. Les anglicismes, une vingtaine, sont en italiques dans le volume). 

Accord historique (2022)

2022.12.19. La COP15 aurait débouché sur un accord «historique». Philippe Papineau présente la nouvelle dans le Courrier du soir du Devoir (19 décembre). Le qualificatif apparaît trois fois au début du texte : «… la COP15 aboutit à un accord historique» dans le chapeau du bulletin, «Accord historique à la COP15» en manchette et «la COP 15 a donc adopté […] une entente historique» dans le deuxième paragraphe. L’Académie française a fait part, en 2015, d’une tendance à faire du qualificatif un synonyme de «sans précédent» ou d’«inégalé». L’institution a publié intégralement la même fiche en 2020 (Dire, ne pas dire..; l’intégrale). Par ailleurs, une traductrice des Nations Unies, écrit à propos d’accords qualifiés sans réflexion d’historiques «Un accord passé aujourd’hui, ne devient pas automatiquement historique». La facilité du dérapage devrait amener les journalistes à dresser une liste des solutions de rechange. 

Événement (2022)

 2022.12.21. Le responsable de la page Facebook du Convois de la liberté 2023, Mario Lapointe, affirme qu’«un événement aura lieu au Québec dans la même optique et les mêmes intentions» qu’avaient les organisateurs de l’occupation d’Ottawa l’hiver dernier (Le Courrier du soir, Le Devoir, 20 décembre). À première vue, il est un préalable à l’événement: un congrès, un colloque, une commémoration ou, mieux, une manifestation. Il est possible qu’en anglais on parvienne à organiser des «events» et que le savoir-faire amène les intervenants francophones à rêver de l’organisation d’un évènement au sens prosaïque du mot anglais. En français, le mot «événement» sert à désigner avant tout une activité réussie, parvenue à regrouper de nombreux militants, à retenir l’attention de la médiasphère et même des citoyens. En somme, l’événement suit la manifestation, son succès ou son échec.

Overbooking (2022)

2022.12.23. Le titreur du Soleil a un œil de faucon! Le chroniqueur François Bourque consacre un article à la vente des vignettes de stationnement par la Ville de Québec (Le Soleil, 21 déc. 22). Il utilise surtout l’expression «survente» pour décrire l’activité. Au 20e paragraphe, il élargit le sujet abordé et il emploie le mot «overbooking». Il est alors question de réservation dans les hôtels ou sur un vol en avion. On a alors affaire à une réservation de chambre et d’une place en aviron. De là la possibilité de pratiquer la surréservation, d’accepter cent réservations pour quatre-vingt places. La possession d’une vignette de stationnement ignore les contrôles formels. On ne pointe pas une liste des voitures qu’on va garer dans tel ou tel secteur. La vignette est un permis qu’on achète. Si la Ville en vend plus que le nombre de places, elle fait de la survente. Elle ne fait pas de surréservation. En somme, Œil-de-Faucon confond réservation et achat d’une vignette. 

Exclamations: Never mind! (2022)

 2022.12.26. La professeure Lise Gauvin présente dans le Devoir (24-25 décembre, p. B-9) un regard contemporain sur Le Survenant de Germaine Guèvremont. Détail intéressant, le personnage est identifié par une exclamation anglaise naturalisée en français québécois : «Neveurmagne!» (Never mind!). On a déjà noté que les exclamations en sol laurentien sont avant tout d’inspiration anglaise, que celles de la francophonie et de la France y gardent toujours quelque chose d’exotique. Jean Forest pose une question : «Que reste-t-il des exclamations françaises? Et il répond : «Quand elles n’ont pas été balayées par les jurons […], elles nous semblent avoir été oblitérées par les emprunts à l’anglais» (Le Grand glossaire des anglicismes). Ici, la graphie française laisserait surnager l’idée d’une appropriation souriante.

Vendredi noir, Boxing Day (2022)

2022.12. 27. Les journalistes ne sont pas avares des expressions anglaises. Ils les emploient même si elles sont facilement remplaçables. Telle est le cas d’un court article consacré à l’achalandage restreint des magasins le lendemain de Noël. Le Soleil concocte d’abord la manchette : «Le Boxing Day n’est plus ce qu’il était». L’auteure de l’article, qui n’est pas en reste, présente dans son premier paragraphe les anglicismes doux à son clavier : « La popularité du vendredi noir et du cyber lundi semblent avoir usurpé des consommateurs au Boxing Day…» (Le Soleil numérique, 27 décembre). Elle connaît l’expression française «Après-Noël». Elle l’emploie au deuxième paragraphe. Elle devrait savoir aussi que le qualificatif «noir» a un sens plutôt négatif dans le contexte : le Jeudi noir, les années noires... Un petit détour par Google suffira à illustrer l’observation. Bref, deux petites fautes à corriger en décembre 2023!

Boxing Day (2022)

 2022.12.28. La grande majorité des services linguistiques conseillent l’abandon de l’anglicisme «Boxing Day». Font partie du groupe la Banque de dépannage linguistique, le Multi dictionnaire, Usito, Termium, Radio Canada, l’Asulf. Pour sa part, Paul Roux n’est pas agacé par l’expression. Cependant, il ajoute : «Mais je veux bien qu’on lui substitue une appellation française». En dépit de cette unanimité, l’entreprise LaVue met l’expression en vedette (Le J. de Qc, 27 déc., p. couv.), le journal lui-même en fait une manchette («La folie du Boxing Day … »; p. 3). Le Soleil et la journaliste M.S. Brault font de même (27 décembre, 6 h 9) : manchette et premier paragraphe de l’article. Heureusement, des entreprises donnent le bon exemple : (Tanguay, Matelas Dauphin…)  et publicisent «Après-Noël»…

Charger des frais (2022)

 2022.12.29. Le Soleil numérique offre une manchette franglaise à ses lecteurs: «Est-ce qu’Hydro vous chargera des frais…?» (29 décembre). Tous ceux qui vivent de leur plume ou de leur clavier, les journalistes en particulier, devraient savoir que le verbe «charger» n’a pas la même signification que son «homologue» anglais. Au moins trois guides de rédaction établis à leur intention les mettent en garde. On lit dans celui de Camil Chouinard : «’Charger’, au sens de demander de l’argent, est un anglicisme» (1500 pièges du français...; La Presse, 2007). Pour Paul Roux, le verbe «n’a pas le sens de ‘compter’, ‘débiter’, ‘demander’, ‘exiger’, ‘facturer’ […] Ce sont des anglicismes» (Lexique des difficultés du français dans les médias; 2004). Enfin, le Guide (2006) de la Presse canadienne illustre la faute par un exemple : «On peut charger un camion, mais on ‘exige’ un montant d’argent pour ce travail». C’est dire que tous devraient être prévenus.

À savoir... (2022)

2022.12.30. À Madame Marie-Soleil Brault. Je viens de lire votre article (29 décembre) à propos d’Hydro Québec. La première phrase se décline ainsi : «Après plusieurs jours sans lumière ni chaleur, des citoyens se questionnent à savoir s’ils verront des frais d’électricité… ». Une rapide consultation des dictionnaires correctifs et du Grevisse vous révélera que la locution signifie «c’est-à-dire». À première vue, il est impossible d’insérer cette dernière expression à la place de la locution. Le Bordas des difficultés précise en plus qu'«à savoir» introduit une énumération ou une explication. Lionel Meney (Dictionnaire québécois-français; 1999) relève une dizaine d’exemples d’emploi fantaisiste de l’expression et propose des solutions de rechange. Je vous laisse le soin de contre-vérifier ces quelques observations.

Insécurité linguistique (2022)

2022.12.31. Madame Mireille Elchacar, professeure à Téluq, vient de publier un livre qu’il faut lire : Délier la langue (Montréal : Alias, 2022). L’auteure soutient que les Québécois souffrent d’insécurité linguistique en raison des comparaisons que l’on ferait entre leur parler et celui des Français… Pourtant, l’affirmation ne semble pas correspondre à la réalité. Cette insécurité, si on se fie aux sondages, découlerait du recul du français au Canada, au Québec et dans la métropole. L’hypothèse de l’insécurité qualitative mérite qu’on la retienne et qu’on tâche de la mesurer en regard du français international et non par rapport au seul recul sur le terrain (démographie, monde du travail, manque d’attrait pour les immigrants…). Voilà un mandat pour madame Elchacar.

Être répondu ! (2022)

2022.12.31. Un ami me transmet le courriel d’un correspondant d’une station de télé (30 décembre). La note est méchante. Je la divulgue quand même : «… le gouvernement de la CAQ essaie de nous faire croire que la langue française est importante pour lui. La preuve ? Un extrait d'une déclaration de […] M. Bonnardel, : «... les erreurs produites devront être répondues ». Le correspondant note qu’on massacre le français. Il a raison. «être répondu» est un calque syntaxique classique en français québécois. Mieux eut fallu dire : «on corrigera les erreurs». Chose sûre : on ne répondra pas aux erreurs.

Exclamations: Fuck!

2024.03.01. La chroniqueuse Josée Blanchette aime bien parsemer ses textes de mots anglais. L’habitude fait partie de son style. Dans le Dev...