dimanche 29 novembre 2020

Place ? Centre d'achat? (2020)

 2020-11-26. Il n’est pas facile de mettre aux ordures des formes fautives classiques. Mathieu Bock-Côté connaît bien le sens des mots «place», «centre commercial» et centre d’achat» et leur valeur. Habituellement, une place est un espace public découvert et bordé de voies de circulation. Une place n’est donc pas un centre commercial. Il écrit cependant «… la Place Rosemère, un centre commercial…» (Le J. de Qc, 26 nov., p. 25). Le barbarisme n’est pas le sien. L’appellation vient des propriétaires du centre. À la fin de sa chronique, il emploie l’expression «centre d’achat», laquelle est toujours déconseillée. Elle serait simplement une traduction malhabile de «shopping center». On lit dans le classique Langage et traduction (P. Daviault) : «On emploie trop souvent Centre d’achats, expression qui… n’a aucun sens dans cette acception». Un jour, espérons-le, nous parviendrons à oublier la traduction malhabile et la désignation d’un centre commercial par le générique «place».

Vidanges ou Ordures? (2020)

 2020-11-25. Guy Fournier est peut-être un peu sévère, qui écrit : «Dans les années qui ont suivi la création du Canal 2 de Radio-Canada, le vocabulaire des Québécois… a fait des pas de géant. Puis la loi 101 et l’Office de la langue ont fini de ‘franciser’ le Québec….. / Pendant des décennies, chef de file du ‘bon parler français et modèle pour tous les autres médias, Radio-Canada est devenu le premier fossoyeur de la langue française» (Le Journal de Québec, 24 novembre 2020, p. 37). Mais il est vrai que les médias «entérinent» trop souvent les formes fautives de la population. Un exemple : un collaborateur de Première heure parle des «vidanges» au lieu des «ordures» (25 novembre, 8 h 55). On pardonnerait à un simple locuteur de corrompre un professionnel de la langue, mais il est inacceptable que ce dernier corrompe des milliers d’auditeurs. Surtout que le conseiller du réseau met des fiches sur le sujet à la disposition des journalistes.

Black Friday, Vendredi noir ou Vendredi fou (2020)

 2020-11-25. «Vendredi fou» balaie ses concurrents «Black Friday» et «Vendredi noir». Deux relevés rapides confirment sa victoire dans la région de la capitale nationale. Au cours des derniers jours, six annonces ont été publiées dans le Journal de Québec. Les six se servent de l’expression. Le sac publicitaire distribué aux portes cette semaine contient dix-neuf prospectus. Pas un seul n’utilise «Black Friday» ou «Vendredi noir». Treize d’entre eux se servent de «Vendredi fou», trois le mot fou liés à d’autres substantifs (prix, jours et soldes) et trois ne font pas allusion au jour d’aubaines. Ce résultat ne signifie pas le français progresse au Québec, mais bien qu’il est possible de remplacer des expressions américaines ou canadiennes et même des traductions littérales. Il faut cependant que toute la société (Office de la langue, citoyens, journalistes, entreprises, publicitaires) rame dans la même direction.

Chez la concurrence? (2020)

 2020-11-24. L’animateur officiant en direct ou le journaliste de la presse écrite n’ont pas toujours le temps de tout peser avant de lancer une expression. L’auditeur ou le lecteur, si. Ce fut mon cas à la lecture de la phrase «Jean-Philippe Pineault a dérobé plusieurs noms chez la concurrence» (du service d’information de Noovo; Le Soleil, édition numérique, 24 novembre). Chez la concurrence? On va chez le médecin, on va à la bibliothèque ou au centre commercial. On va chez quelqu’un ou à un endroit quelconque. Pourrait-on dire «chez le syndicat»? «chez l’association»? «chez la compétition»? Poser la question, c’est presque y répondre. Dans l’extrait relevé, le mot « concurrence » désigne l’ensemble des concurrents. À la réflexion, si le temps nous en laisse le loisir, nous opterions pour «… a dérobé plusieurs noms de la concurrence» ou, peut-être, «… plusieurs noms chez les concurrents». De fait, le choix de la préposition «chez» au lieu de ses «concurrentes fait l’objet de remarques depuis longtemps

Abréviation: St- ou St.? (2020)

 2020-11-23. On voit une photo de la camionnette d’une entreprise de Saint-Émile dans le Journal de Québec (23 nov., p. 3). On y lit : «Traiteur Buffet St. Émile». L’abrègement du mot «saint» par «st.» est la manière anglaise de faire. Cela peut être reconnu comme un symbole de la profonde anglicisation des Québécois au même titre que nombre d’interjections, d’expressions calquées, de mots anglais. L’unique raison de conserver l’abréviation est qu’elle tient lieu de relique du passé (comme «fun», «char», «blvd.» ou «no.». De fait, on l’aperçoit rarement de nos jours. Les usuels et les répertoires correctifs la critiquent (Le Multi dictionnaire…, Le français au bureau, Le Ramat de la typographie). C’est dire que le traiteur devrait corriger l’abréviation à la première occasion par «st-» ou, tout au moins, ne pas la répéter la prochaine fois. À moins qu’il veuille conserver la relique!

Abréviation Dr ou Dr. (2020)

 2020-11-22. Un article d’opinion du Soleil (22 novembre) est signé par deux professeurs dans la forme qui suit : «Dr. Réjean Hébert… ». Il porte sur l’âgisme systémique révélé par la covid. Pourquoi abréger le titre du docteur par «Dr.»? Normalement, les règles d’écriture du français prévoient la façon de faire. Le Multi dictionnaire en aligne deux : Dr, Dre, toujours sans point abréviatif et avec la possibilité de placer les lettres finales en exposant. Le Français au bureau va dans le même sens. On serait porté à dire que l’abréviation dans la forme utilisée par le journal est le résultat de l’anglicisation systémique. Ce serait céder au psittacisme courant. Chose sûre, on l’utilise sans savoir qu’on suit, ce faisant, les règles de l’anglais. Gérard Dagenais écrit, c’était en 1959, «Les Anglais n’abrègent jamais de la même façon que nous». Il illustre son observation à l’aide de Mister, abrégé «Mr.» alors qu’on écrit «M.» en français. La faute est vénielle. Mais les guides de rédaction des journaux francophones devraient la noter et proposer la bonne pratique à suivre.

Fatbike, véloneige (2020)

 2020-11-19. Madame Pelletier (Cyclo Services). Le journaliste Jean-François Lépine consacre un article à la chance qui fut la vôtre de retrouver le vélo que l’on vous avait dérobé (Le J. de Qc, 18 nov., p. 17). Vous avez peut-être employé l’expression «vélo d’hiver», mais il s’est servi du mot anglais «Fatbike» à deux reprises dans son reportage. Votre site web, fort bien présenté, ne contient pas le mot «fatbike». Il est vrai qu’il est facilement remplaçable par les mots «vélo d’hiver» (que vous connaissez), par véloneige, par VPS (vélo à pneus surdimensionnés). C’est dire que les mots pour désigner ces vélos dans votre site internet ou dans vos messages publicitaires ne manquent pas. Nous avons une belle ville, le Cap-aux-Diamants, le Saint-Laurent, la Petite rue Champlain, la rue Saint-Jean) . Des mots français se marient facilement avec le décor.

Raisons sociales (2020)

 2020-11-17. Olivier Primeau, le propriétaire des restaurants Beachclub, Kampai, Slice Gang Pizza et des casse-croûtes Pause Pizza Time, défend ces appellations et passe à l’attaque : «Le monde qui chiale fait douze fautes par phrase en français» (Le J. de Qc, 17 nov., p. 4). Son observation correspond peut-être à la réalité. Mais ses choix et ceux des propriétaires des entreprises visitées quelques jours plus tôt par une journaliste de Québecormédia plantent le décor des difficultés à bien parler et surtout à y voir des raisons de faire des efforts. Les exemples recensés montreraient que les entreprises doivent avoir des noms anglais pour percer le marché québécois. S’il en va de même pour le cheminement professionnel, la qualité du français restera un souci secondaire. Un monde économique franglais ne peut que susciter le relâchement en matière de langue. Dire, comme le fait Olivier Primeau, «Je suis 100 % pour la préservation du français au Québec» est pour le moins exagéré. Ses choix n’illustrent pas un tel engagement.

jeudi 26 novembre 2020

Black Friday (2018)

 2018.04.29. À monsieur Marc Allard. Vous écrivez dans un journal de Québec, mais vous ignorez un néologisme en émergence ici : «Vendredi fou». Vous écrivez, dans l’édition du 28 avril du Soleil (p. M5, 5e col.) : «… les gens se battent pour un téléviseur au Black Friday». Le 27 novembre dernier, votre quotidien publiait treize annonces utilisant «Vendredi fou», trois, Vendredi noir, et pas un seul Black Friday. À la même date en 2015, les chiffres étaient, dans le même ordre, 12, 5 et 2 (L’Expression juste / Asulf, mars 2018, p. 1). La formule «Vendredi fou » semble s’imposer contre l’anglicisme et contre le calque «vendredi noir». L’OQLF favorise le néologisme. Sans doute, participerez-vous au mouvement en faveur de l’amélioration du français québécois grâce à son dynamisme interne. Les entreprises françaises n'y sont pas encore parvenues qui lancent «French Days» (sic) ces jours-ci pour contrer «Black Friday ».

Centre d'achats (2018)

 2018.01.15. Les titreurs du Soleil ont de la difficulté à tenir compte de la francisation de certaines expressions. Le journaliste B. Ricard-Châtelain fait un reportage sur les nouveaux comptoirs de Loto Québec destinés aux centres commerciaux. Il n’écrit pas une seule fois «centre d’achat». Il répète à quatre reprises l’expression française et on la place aussi dans la légende de la photo du nouveau comptoir. Qu’à cela ne tienne, le titreur ignore l’expression correcte et impose le calque de l’anglais dans les manchettes (1e page et p. 14, Le Soleil, 15 septembre). On ne peut faire pire. Le réputé grammairien Charles Bruneau, en 1940, avait mis en garde les auditeurs de Radio-Canada contre l’invasion des mots anglais. Mais il ajoutait un second conseil : «Résister à cette invasion est faire de bonne besogne, mais à condition de ne pas forger des vocables monstrueux, inintelligibles à la fois pour le Français et pour l’Anglais…. Le mot anglais déguisé est plus dangereux mille fois que le mot anglais tout cru» (Grammaire et linguistique; Causeries prononcées aux postes du réseau français…, 1940). Il faut rappeler au titreur que « shopping center » se traduit par «centre commercial », non par le persistant calque.

Centre d'achat ? (2020)

  2020-03-22. On aurait pu accuser le premier ministre Legault de saboter les services linguistiques de l’État. La crise actuel du coronavirus l’a amené à parler des «centres d’achats» (R..C., 22 mars, 18 h 2). L’Office de la langue a décidé il y a quarante ans d’officialiser l’expression «centre commercial» contre le calque «centre d’achats». Depuis quatre décennies, tous ont favorisé l’équivalent français (C. Chouinard, P. Cardinal, Le Multi dictionnaire, le Colpron, le Guide de rédaction de la P.C. , etc.). Mais l’Office a fait marche arrière : «Le terme centre d'achats … construit sur le modèle de l'anglais … s'intègre au système linguistique du français. Les réserves déjà émises sur l'usage de ce terme n'ont pas lieu d'être…» (BDL). L'Office recommande quand même «centre commercial». C’est dire que le premier ministre peut exciper de la valse-hésitation de l'Office et de la bonne cause qu’il défend depuis deux semaines

mercredi 25 novembre 2020

Vidanges? (2020)

 2020-01-14.  Les lecteurs du Soleil auront lu la manchette qui occupe les deux tiers de la première page de la livraison du 14 janvier («Cure minceur pour vos vidanges») et la première phrase du journaliste en page 3 («Québec impose une cure d’amaigrissement à vos vidanges») . Le mot «vidange» est considéré comme une impropriété. Il signifie d’abord et avant tout l'opération par laquelle on vide une fosse. Le Robert note qu’on l’utilise au Canada, mais que son usage est critiqué. Effectivement, le Multi dictionnaire (2018), Guy Bertrand (Radio-Canada, 1999), la Presse canadienne (Guide de rédaction, 2006) et Gérard Dagenais (1967) conseillent de le remplacer par «déchets» ou «ordures» . Sept ans plus tôt, Dagenais écrivit: «Vidanges, au pluriel, n’a qu’un sens : ordures retirées des fosses d’aisance. Il y a belle lurette que cela n’existe plus dans nos villes» (Le Devoir, 4 juillet 1960). Cela fait soixante ans. Et le Soleil ne réussit pas à éviter l’impropriété. Espérons qu’il y parviendra sous son prochain régime.

 

Items ou articles ? (2018)

2018.03.10. Le prospectus des épiceries Metro (sans accent), distribué par internet à 6 h 4 le 10 mars, annonce «Tous les items dont vous avez besoin…». Le mot «item » est un mot d’origine latine, mais il est aussi un anglicisme. Qu’on fasse un détour par le Petit Robert. Il y apparait, mais pas dans le sens de produit ou d’article de consommation. Il y est qualifié de «mot anglais ». Qu’on consulte un dictionnaire de traduction de l’anglais vers le français. On le traduit par article, question , etc., mais pas par item. Robert Cardinal (Le VocabulAide, 2009) observe qu’on l’utilise ici «sous l’influence de l’anglais … ». Jean Darbelnet (Dictionnaire des particularités…, 1986) donnait quant à lui le conseil suivant : «Pour ceux qui refusent cet emploi anglais d’un mot latin, la solution est de dire article ou élément». Les auteurs de la Banque de dépannage de l’OQLF vont dans le même sens. En somme, Metro et ses publicitaires devraient profiter de la FrancoFête (12-25 mars) pour s’engager à consulter les répertoires correctifs. Cela leur éviterait des dérapages. 

mardi 24 novembre 2020

Tournures: Retourner un appel (2017)

 2017.10.09. Dans la même livraison du Soleil, on lit «Ses courriels et ses appels n’ont pas été retournés» (8 oct. p. 5, 3e col.) et, quelques pages plus loin, «Aussitôt l’appel logé au 9-1-1…» (p. 9, légende de la photo). Les deux expressions sont celles de deux journalistes d’expérience, Patricia Cloutier et Jean-Frédéric Moreau. En français, on dit : «on ne l’a pas rappelé » et «on a appelé au 9-1-1». Les deux expressions calquées sont épinglées dans le Multidictionnaire, dans la Banque de dépannage, sans doute dans Antidote 9, annoncé tous les jours dans le Soleil. La question se pose : les journalistes utilisent-ils les répertoires correctifs qu’ils ont à portée de clavier? Ces outils devraient pourtant être leur code de sécurité routière, mieux linguistique. On pourrait même croire que brûler les feux rouges qui y sont annoncés devrait comporter avertissements et points de démérite.

Chez Aluminerie Bécancour? (2020)

 2020-06-28. Les abonnés du Journal de Québec ont eu l’occasion de lire et peut-être de tiquer en lisant «… le lock-out chez Aluminerie Bécancour» (27 juin, p. 3) et «C’est… chez Boulangerie MariePain…» (28 juin, p. 14). On semble confondre les prépositions «chez» et «à». On va chez quelqu’un, mais on va à un endroit. L’Académie précise : «Chez…. ne se dit qu’en parlant de personnes et, par extension, d’êtres animés ou d’êtres personnifiés» . Ainsi, on va chez le médecin, chez un oncle. Mais peut-on aller «chez Aluminerie» et «chez Boulangerie»? Non. On pourrait le faire si on avait affaire à un nom de personne (chez Laliberté) ou à un nom de chose vu comme telle (chez Canac). En somme, les journalistes auraient dû écrire : «… à l’Aluminerie… » et «… à la Boulangerie…». Le professeur Cerquiglini écrit : «Avec les établissement, les boutiques, on utilise la préposition de lieu ordinaires 'à' : on passe à la boulangerie». Et il aurait pu écrire : «lockout à l’aluminerie…». Les correcteurs ou réviseurs devraient sensibiliser les journalistes à ce petit problème de grammaire.

lundi 23 novembre 2020

Wake-up call et Additionnel (2020)

 2020-11-16. Le premier ministre du Québec emploie le mot anglais «tough». L'écart va à l’encontre des efforts des services linguistiques de l’État. On peut affirmer que le premier ministre Trudeau se permet des écarts du même ordre. Il veut défendre les droits des francophones de l’extérieur du Québec, mais il ne réussit pas à rendre l’idée du «wake-up call» (J. de Qc., 14 nov., p. 29) que devrait constituer le nombre élevé de cas de covid : avertissement, alarme, alerte, etc. L’expression est facilement identifiable cependant. Il y a pis : «des mesures additionnelles». L’adjectif est bien français, mais on en multiplie l’usage au détriment de «supplémentaire» en raison de la présence dans le voisinage du mot anglais. Et il est évident qu’on annonce des mesures, mais on ne le fait pas pour obtenir un total. Tout ça pour illustrer le fait que des dirigeants ne tiennent pas compte des conseils ou avis des services qu’ils financent. 

Tough (2020)

2020-11-15. Le premier ministre met les citoyens en garde contre le coronavirus. Il a raison. Le COVID est si envahissant qu’il cause de nombreuses morts. On en a peur et on n’ose même pas écrire «covid» en minuscules. Mais il est d’autres virus qu’un professeur de l’Université de Sherbrooke, Jean Forest, qualifie de «virus gloutons». Font partie de sa liste des anglicismes comme «brown», «lousse», «rough», «shift», …et «tough» (Les Anglicismes de la vie quotidienne... ; 2006). «Tough», comme ses compères, se transmets par l’écrit et la parole. Il entre dans les cerveaux par les yeux et par les oreilles. Quand les citoyens lisent «Les prochaines semaines vont être tough pour les Québécois» (Le Journal de Québec, 13 novembre, p. 9), ils sont tous affectés. Les uns essayaient d’oublier le mot et de le remplacer par «dures», «pénibles», «éprouvantes», «difficiles». D’autres l’attraperont sans s’en apercevoir. Le laxisme est contre-indiqué tant pour les virus langagiers que pour le covid.

Black Friday (2016)

 2016.12.28. En matière de langue, il est encore des citoyens félons. Celui qui a rédigé le chapeau suivant en est un : «Les soldes du populaire Black Friday en voie de damer le pion à ceux de l’Après-Noël». Pourtant la manchette elle-même dit : «Dans l’ombre du Vendredi fou» (Le Soleil, 27 décembre, p. 5). L’auteure de l’article a, pour sa part, multiplié le néologisme «vendredi fou» (six occurrences, dont trois dans les deux premiers paragraphes). Le rédacteur du chapeau est allé repêcher au deux-tiers de l’article l’expression américaine, que la journaliste a employée… sans doute afin ne pas avoir l’air de corriger les citations de deux marchands ignorant encore l’expression française. Les rédacteurs et les locuteurs félons ont douze mois devant eux pour apprendre à dire et à écrire « Vendredi fou » (et, par la même occasion, «Après-Noël») l’automne prochain. On peut enrichir sa langue à tout âge.

Black Friday, Boxing day (2014)

2014.12.20. Dans sa chronique hebdomadaire (Le Devoir, 20-21 décembre, p. B 5), David Desjardins choisit de nommer deux journées de solde annuelles par leur appellation anglaise (Black Friday, Boxing day) plutôt que par leur équivalent français (Vendredi fou, Après-Noël). La faute n’est pas très grave ni très dommageable pour le français. Elle constitue cependant l’illustration d’une mentalité. Le poète Alain Borer dit de la manie d’employer des mots anglais alors qu’il existe des expressions françaises équivalentes que ce sont tout au plus des fredaines. Ces fautes seraient moins graves que les métaplasmes (fautes de syntaxe). Mais il interprète de tels choix courants en France : « L’adoption de mots anglais sans transformation signifie : ‘Nous préférons la langue du maître’. Courriel ni pourriel ne prennent pas, précisément parce qu’ils sonnent trop français » (De quel amour blessé, 2014, p. 61). En serions-nous là ici aussi? 

Black Friday (2013)

 2013.11.05. L'influence sinon le poids linguistique des États-Unis et du Canada sur les Québécois est indéniable. Il est très aisé d'adopter les mots crowdfunding, show, boxing day ou black friday. Outre-frontières, ce dernier désigne une journée de soldes le dernier vendredi de novembre. Peut-on adopter le phénomène sans prendre l'expression? On a suggéré un équivalent. Le Mouvement Québec français des Laurentides a proposé le 31 octobre aux marchands de la région d'adopter Vendredi fou. L'initiative devrait devenir le réflexe de tous les locuteurs: nommer dans sa langue, autant que faire se peut, l'ordinaire de la vie quotidienne. En la matière, l'OQLF ouvre la voie, qui propose quatre ou cinq solutions de rechange à l'expression américaine.

Black Friday, Vendredi noir, Vendredi fou (2020)

 2020-11-15. Les jardiniers de la langue critiquent les formes fautives. À l’occasion, des succès couronnent leurs interventions. Ainsi, depuis quelques années, l’expression «Vendredi fou» a pris la place de «Black Friday» et de sa traduction littérale «Vendredi noir» (donc un jour catastrophique). L’Office québécois de la langue l’a proposée il y a trois ans. Les membres de l’Asulf sont intervenus auprès des marchands et des publicitaires qui utilisaient l’expression anglaise ou sa traduction malhabile. Les consommateurs peuvent lire ces jours-ci les messages de la Galerie du Meuble et des magasins Latulippe (Le Soleil, 14 nov., p. 7 et 13) et ceux des consoles intérieures des magasins Simons : «Vendredi fou». Il semble bien que la victoire en soit assurée en sol québécois. Ce qui n’est pas encore le cas en France

État et langue (2020)

 2020-11-14. La situation du français retient l’attention des médias depuis quelques semaines. On a proposé beaucoup de mesures depuis les années 1960. Antérieurement, la Société du bon parler a mené des combats constants. Il faudra continuer dans cette veine (affichage, enseignement, langue commune, langue officielle de l’État, etc.). Mais des personnalités ont déjà observé que ces interventions ne donnent pas toujours les résultats attendus. Le contexte général joue contre le français. Retenons une citation de Gaston Miron (1987) : « Je suis né dans une situation de domination d’une langue par une autre, résultat et caractéristique d’une domination plus globale… Nous avons certes fait beaucoup de chemin, d’immenses progrès… Je ne vois cependant pas… que la situation ait fondamentalement changé, parce que nous n’avons pas été jusqu’au bout. La solution est politique. Point » (L’Homme rapaillé; : Éditions Typo, 1998, p. 242).

Abréviations: Saint-Émile ou St.Émile? (2020)

2020-11-23.  On voit une photo de la camionnette d’une entreprise de Saint-Émile dans le Journal de Québec (23 nov., p. 3). On y lit : «Traiteur #Buffet St. Émile». L’abrègement du mot «#saint» par «#st.» est la manière anglaise de faire. Cela peut être reconnu comme un symbole de la profonde anglicisation des Québécois au même titre que nombre d’interjections, d’expressions calquées, de mots anglais. L’unique raison de conserver l’abréviation est qu’elle tient lieu de relique du passé (comme «fun», «char», «blvd.» ou «no.». De fait, on l’aperçoit rarement de nos jours. Les usuels et les répertoires correctifs la critiquent (Le Multi dictionnaire…, Le français au bureau, Le Ramat de la typographie). C’est dire que le traiteur devrait corriger l’abréviation à la première occasion par «st-» ou, tout au moins, ne pas la répéter la prochaine fois. À moins qu’il veuille conserver la relique!

samedi 21 novembre 2020

Rue Gilford ou rue Guibord? (2014)

 2014.08.30. La toponymie peut-elle faire l’objet d’amélioration tout court ou même d’une meilleure qualité? La question se pose au moment où on apprend qu’une partie de University Street à Montréal devient boulevard Robert-Bourassa (28 août). Ne faudrait-il pas corriger l’appellation rue Gilford et écrire rue Guibord? Gilford désigne un fantôme. Le nom est là parce qu’un employé a mal transcrit le patronyme Guibord. Ce dernier, contrairement au fantôme, a existé. Il fut typographe, fit partie de l’Institut canadien, fut excommunié. Il repose dans un espace religieusement neutre du cimetière de la Côte-des-Neiges. On écrit pudiquement dans le répertoire toponymique de Montréal que le nom Gilford rappelle Joseph Guibord. Seul un historien s’en souviendra. Mieux vaudrait agir au nom de l’exactitude historique et, simultanément, au nom de l’exactitude patronymique.

jeudi 19 novembre 2020

Fatbike? Que peut-on dire en français? (2017)

2017-01-17. Les efforts du Soleil pour utiliser un mot français à la place de «fatbike » se réduisent à peu de chose. Attardons-nous à un reportage récent, celui préparé par J.F. Néron (16 janvier 2017, p. 15). On y écrit le mot anglais à sept reprises (en manchette, dans la légende des photos et cinq fois dans le corps de l’article) dont deux sont tirés du témoignage d’un organisateur. On y lit « vélo à pneus surdimentionnés » à trois reprises et son abréviation (VPS) une fois. Une telle répartition des mots employés contribuera à ancrer chez les Québécois le recours instinctif à l'expression anglaise. Cela est acceptable quand on se trouve dans une impasse langagière. Ce n’est pourtant pas le cas ici. Le journaliste aligne quelques solutions de rechange. Il pourrait penser à d’autres (vélo à neige, véloneige…). Écrire dans une langue implique aussi de participer à l’effort de nommer les réalités avec des mots du lexique ou même avec des mots formés selon la logique de la langue. Espérons que VPS, vélo à neige ou véloneige gagneront en popularité dans les mois et années à venir.

Fatbike? Pourquoi pas ... ? (2018)

2018-10-28. Les Québécois ont quand même de la chance. Ils n’ont pas à faire la chasse qu’à des anglicismes camouflés (« prendre une marche », « filière » (au sens de classeur), « voûte » (au sens de chambre forte). Les anglicismes francs sont plus visibles: par exemple « fat bike » que Performance Bégin publicise dans le Soleil (26 octobre, p. 2). Les correcteurs informatiques ne détectent pas toujours les anglicismes camouflés. Il est plus aisé de repérer les mots anglais, les anglicismes francs, mais les solutions de remplacement ne s’imposent pas d’elles-mêmes. Il faut que les locuteurs les fassent mousser. C’est le cas de « Vendredi fou », d’«Avant-match »… et de «véloneige ». Pourtant de confection française, ce dernier, élaboré sur le modèle de « motoneige » ou d’« autoneige », ne retient pas pour le moment les faveurs des publicitaires ni de l’Office. On lui préfère « vélo à pneus surdimensionnés » ou VPS, une expression plus englobante. Mais les locuteurs peuvent voter en sa faveur!

dimanche 15 novembre 2020

Snowbirds! les Québécois? (2020)

 2020-11-13. Les «snowbirds» fuient la neige et le froid (Un pont aérien est même prévu; Le J. de Qc, 13 nov., p. 20). Six mois par année, ils se réfugient au sud des États-Unis. C’est dire qu’ils ne sont pas les oiseaux des neiges qu’on imagine. Ils s’envolent et migrent à l’annonce des flocons, du blizzard et du froid. Ils reviennent en pays tempéré en avril ou mai. Le mot est inapproprié. Il devrait plutôt désigner les quelque braves Floridiens, Louisianais ou Texans qui viennent vivre ici de novembre à avril afin de profiter de la luminosité hivernale exceptionnelle, des longues nuits et des pentes de ski à nul autre pareils. En plus, le mot anglais fait partie de la langue qu’ils parlent. Ce qui n’est pas le cas pour un Québécois francophone qui fuit la neige. Il faudrait donc lui trouver un substantif qui lui convienne. Est-ce le moment de lancer un appel à tous?

Les banlieues vs la banlieue (2020)

 2020-11-10. Tant l’animateur du Téléjournal-Québec, qu’une députée et qu’un ministre ont parlé «des banlieues» de Québec» sans se demander combien la ville en aurait (10 novembre). Selon les dictionnaires, la banlieue est l’ensemble des villes qui entourent une grande ville. Pourquoi a-t-on besoin de multiplier les banlieues? Jean Darbelnet, en 1965, donnait le mot en exemple, à la Commission fédérale Laurendeau-Dunton, d’anglicismes causés par l’emploi du pluriel au lieu du singulier. En 1999, le professeur L. Meney commentait le phénomène : «En français standard, le mot ‘banlieue’ désigne normalement l’ensemble de la partie construite en périphérie d’une grande ville;… cependant on note une tendance à dire… «les banlieues» … ; par ailleurs, l’angl. dit «suburbs». Jean Forest inscrit le mot dans son Grand glossaire des anglicismes (2011). L’animateur et les deux élus auront l’occasion de se reprendre. Ils parlaient du projet de tramway pour la capitale

jeudi 12 novembre 2020

Majeur ? (2017)

 2017.07.04. On souligne rarement l’abus que l’on fait de l’adjectif majeur. Il est français. Il signifie «très important ». Le professeur Benoît Melançon a noté un glissement de sens à son propos en 2004 : « Important, au moins localement ». Pour sa part, Jacques Capelovici a souligné, il y a plus de vingt-cinq ans, que l’on avait trop souvent tendance à traduire littéralement le mot anglais «major ». Quelques remarqueurs ou chroniqueurs langagiers ont dénoncé la concurrence éhontée (!) de «majeur » et du monopole qu’il semble en voie de réaliser. P. Bénard constate qu’il a vaincu « grand » et «maître » (C’est la cata, 2002). A. Bladuche-Delage écrit : « … il n’y a plus d’œuvres capitales, il n’y a que des œuvres majeures, il n’y a pas de questions importantes, il n’y a que des questions majeures » (Petit traité des finesses…, 2006). De telles observations semblent à propos à la lecture d’un surtitre du Soleil «Projet majeur à Weedon » et de deux passages de l’article («… lieu majeur de production »et «C’est vraiment majeur ») publié le 27 juin (p. 7).

mardi 10 novembre 2020

Party et partys (2013)

2013-12-23. La première phrase d'un message diffusé par la poste électronique dans la fin de semaine du 21 décembre se lit ainsi: « Les partys de famille s'en viennent, et il y sera sans aucun doute question, à un moment ou à un autre, de la charte des valeurs québécoises ». Pourquoi les « partys »? Aurait-on compris, par exemple, les rencontres, les fêtes, les réunions ou même les parties de famille? On connait les parties d'érablière ou de sucre, les parties de campagne, les parties de plaisir, etc. Il y a probablement derrière l'anglomanie une part de snobisme, une part de psittacisme, une part d'indifférence et une part d'ignorance, tous facteurs qui conduisent à l'utilisation inutile d'expressions anglaises. 

Les banlieues ou la banlieue? (2017)

2017.06.13. Quand on aborde la question du transport en commun dans la capitale nationale, doit-on parler de « la banlieue » ou « des banlieues »? Les dictionnaires s’entendent sur une définition du mot: « Ensemble des agglomérations qui entourent une grande ville… ». M.É. de Villers (Multi Dictionnaire…), ajoute une note à l’article : « … collectif qui désigne la totalité des agglomérations qui entourent une grande ville : il est donc utilisé au singulier». En somme, le titreur du Soleil ignorait cette pratique du français, mais il se laissa influencer par le mot anglais «suburbs ». De là la manchette : « Trois options de transport pour les banlieues » (13 juin 2017, p. 2). Sans doute profitera-t-il de la remarque pour ajouter une note à son répertoire correctif. Il lui reste cependant la possibilité de réserver le mot au pluriel pour les banlieues de plusieurs villes et pour les villes nouvelles limitrophes vivant des problèmes sociaux (c’est le cas en France).

lundi 9 novembre 2020

Party ou Parté ? (2020)

2020-11-03. L’attention est tournée vers les États-Unis. Il faudra un immense effort pour que les projecteurs soient orientés sur la façon d’écrire «parté» puisque c’est ainsi qu’on prononce le mot «party». Le Courrier du soir du Devoir (3 novembre) reproduit une déclaration du premier ministre : «Il s’agit d’avoir quelques partys, puis…». Le journal écrit «partys», mais le chef de gouvernement a prononcé «parté», à la française, mieux : à la québécoise. C’est la prononciation notée par Léandre Bergeron (Dictionnaire de la langue québécoise). Par le passé on a fait quelques efforts pour adapter la graphie de mots à leur prononciation : baguel, iglou, coquetel, paquebot… Il reste des efforts à faire surtout si on ne trouve pas de synonymes pour remplacer «party». La presse écrite fait parfois de belles manchettes avec «toune». Espérons que «parté» aura un jour la même chance. L’observation aura-t-elle réussi à masquer, ne fut-ce qu’une minute, les résultats partiels des élections étatsuniennes?

Deux juridictions ? Deux pays? (2020)

2020-11-08. À Christian Noël (Radio-Canada). Parlant des États-Unis et du Canada ce matin (8 nov., 8 h 2), vous avez désigné les deux pays par l’expression «les deux juridictions». On peut employer la formule en anglais. Mais pas en français. Normalement, il faut dire : les deux pays, les deux États... Je suis sûr que le service linguistique de Radio-Canada a publié des fiches sur le sujet. Si ce n’est pas fait, n’hésitez pas à solliciter un avis. Pour sa part, le Presse Canadienne y consacre cinq lignes dans Guide de rédaction (5e éd. 2006). Il me semble que vous devriez éviter de publiciser cet anglicisme. Journaliste, vous êtes un professeur pour un grand nombre de personnes.

Versus ou contre?

 2020-11-08. Les titreurs du Soleil distinguent souvent mal les abréviations latines intégrées au français de celles qui le sont à l’anglais ou les sens différents qu’elles ont pris. Une manchette de l’édition virtuelle (8 novembre) en est la preuve : «Océanic vs Drakkar : match annulé…». En français, la préposition latine indique une idée de comparaison. Le Petit Robert donne l’exemple Vx vs neuf. En anglais, versus signifie contre. Quand deux équipes s’affrontent, elles jouent l’une contre l’autre. Le Guide de rédaction (2006) de la Presse Canadienne ignore le premier sens de versus, mais on y écrit : «Versus. – À éviter. Il faut dire : contre ou c. en abrégé. Ex. : les Canadiens contre les Rangers au lieu de versus». Il faudra donc ajouter une note à la marche du Soleil.

«Veste de cuir» (2020)

 2020-11-07.  Madame Moisan (Le Soleil), En voici une vieille : «… veste de cuir». Je cueille l’expression dans votre article ( Le 3 ¾, 7 novembre, p. 5). Au tournant de 1960, le linguiste Gérard Dagenais a noté qu’on éprouvait de la difficulté à traduire «leather jackets». On s’était rabattu sur «veste de cuir» (Le Devoir, 11 mai 1959). Dagenais ajouta, sourire en coin sans doute , «… il n’eut pas été besoin de traduire si l’on avait su le mot français». Et le mot français était, et est toujours, «blouson», «blouson de cuir» ou «blouson noir». Le linguiste précise son aspect : «vêtement, sportif ou militaire, léger et bouffant, s’arrêtant aux hanches…. serré à la ceinture et, le plus souvent, en tissu imperméable». Dans le dictionnaire qu’il a publié huit ans plus tard, il précise : «Le bas d’un blouson est serré, tandis que celui d’une veste ne l’est pas». La distinction vaut toujours et on peut en tenir compte.

«Déployer» un autobus rue des Ramparts (2020)

 2020-11-06. Faut-il oser consulter les dictionnaires s’ils nous rappellent à la réalité?  Il est difficile de concevoir comment on s’y est pris pour «déployer» un autobus rue des Remparts après la tuerie de la dernière semaine. On sait comment déployer une mappemonde sur une table, on sait comment déployer une équipe de pompiers ou même un drapeau. On pourrait déployez une flotte devant le Cap-aux-Diamants, mais irait-on jusqu’à déployer un (seul) vaisseau? Les auditeurs de C’est encore mieux l’après-midi comprendraient qu’on déploie dix autobus. Mais en déployer un seul, comme on nous l’apprend (17 h 30, 6 novembre), ce serait une entreprise gigantesque. Cela fait rêver. Faut-il gâcher son plaisir et consulter un dictionnaire?

samedi 7 novembre 2020

Coaching (2016)

 2016.09.16. L’amélioration du français au Québec, en Amérique et en Europe prend bien des formes : néologismes, mots inconnus mais encore dans les dictionnaires, mots oubliés et expulsés des dictionnaires. A-t-on déjà essayé de remplacer le mot « coaching »? présent dans la première chronique de Fabrice Vil publiée dans le Devoir (16 septembre, p. A 9). F.B. nomme un organisme qui « transforme les coachs sportifs en coachs de vie » et énumère quelques-unes de ses préoccupations : « l’éducation, le coaching, la philanthropie ». Il aurait pu remplacer facilement « coachs de vie » par « guide de vie ». Mais coaching? L’OQLF suggère « accompagnement », « entraînement ». L’Académie y va de « conseiller », de «tuteur», etc. Il y a aussi un vieux mot français que l’écrivain Michel Tournier a exhumé : « guidance ». Le mot a été sauvé par l’anglais (Trois cents mots propres, 1994). Ne pourrait-on pas l’utiliser dans l’énumération « l’éducation, la guidance, la philanthropie »? Son intégration semble chose aisée! On le prononce trois fois et il devient familier.

Salle de montre ? (2013)

 2013.08.27. Une compagnie de portes et fenêtres dont le siège social est situé à Montmagny vient de faire distribuer aux foyers de la capitale un carton publicitaire. On y donne l'adresse de quatre « salles de montre ». Il serait préférable d'écrire « salles d'exposition ». Les dictionnaires notent que l'expression « salle de montre » est vieillie. Il est probable qu'elle survit en territoire québécois en raison de la proximité du mot anglais « showroom » et de la traduction littérale qu'on en fait. On peut affirmer que voilà un exemple qui permet d'affirmer que l'anglais contribue parfois à freiner la modernisation et l’amélioration du français chez nous.

Coaching, councelling, guidance (2013)

 2013.08.28. Une travailleuse sociale de la capitale a fait inscrire sur sa carte professionnelle, à la suite de son prénom et de son patronyme: Guidance familiale. Elle note que ses clients potentiels ne tiquent pas face à l'expression et qu'ils devinent aisément qu'elle remplace « coaching » ou « counselling ». Le vieux mot français « guidance » aurait été sauvé par l'anglais selon Michel Tournier (Le Pied de la lettre). Les récentes éditions du Petit Robert reproduisent le mot et ses définitions. L'édition de 1968 l'ignorait. Souhaitons que le mot, à la longue histoire (oubliée), ait encore de beaux jours devant lui et que d'autres repêchages semblables se produiront.

Disponible (2020)

 2020-11-05. Il faut constamment faire preuve de doutance quand on veut choisir l’accroche d’un message publicitaire. On aura sans doute lu celle de Lavue.ca : «Examen de la vue disponible» (J. de Qc, 5 novembre, p. 15). Dirait-on «entrevue disponible», «rencontre disponible», «visite…», «consultation disponible? C’est loin d’être certain. Sont disponibles, en français, les objets dont on peut disposer et les personnes qui sont libres. Quand on dit qu’un article est disponible en magasin, on fait du «traduidu» en adoptant les significations du mot anglais «available». Il en va de même dans l’exemple relevé alors qu’on devrait dire : «Examen gracieux de la vue», «Examen offert à titre gracieux», «Examen gratuit», «Examen de la vue au besoin», etc. Le calque utilisé et son sens de service offert gratuitement semblent un élargissement du domaine du mot «traduidu».

lundi 2 novembre 2020

Tournures ǬCa regarde mal (2020)

2020-03-09 À l'équipe du Téléjournal Québec. Je tiens pour acquis que la collaboratrice du Téléjournal, Marie-Pierre M., n’a pas de réticences à améliorer son français. Aussi lui fais-je une recommandation : consulter les linguistes de Radio-Canada à propos de l’expression «Ça regarde mal» qu’elle a utilisée en ondes (9 mars, 18 h 2). Un ancien conseiller du réseau écrit «Il faut éviter de dire : Ça regarde bien, Ça regarde mal. Ces expressions sont des anglicismes. On les a calquées sur 'to look well'… Les équivalents en français sont : Ça s’annonce bien ou mal…(Camil Chouinard, 2007). Deux universitaires partagent une position semblable (Michel Parmentier et Lionel Meney). Des répertoires correctifs font de même. Il va de soi qu’on peut adorer la forme fautive. Mais il me semble que les professionnels de Radio-Canada doivent privilégier le bon usage.

Tournures : Faire sortir le vote (2020)

2020-03-05. Le français parlé en pays québécois s’inspire souvent davantage des façons de dire du voisinage anglo-saxon que de celles de la francophonie. Prenons une citation d’un spécialiste des États-Unis : «Bernie Sanders…. a au moins le mérite de faire sortir le vote des jeunes» (Le J. de Qc, 5 mars, p. 15). En France, on aurait dit, 99 fois sur cent au cours de la dernière décennie, «…a le mérite de mobiliser les électeurs». L’observation est du professeur Lionel Meney. D’autres solutions de rechange sont possibles : «… a au moins le mérite d’inciter les électeurs à se rendre aux urnes», «… d’inciter les électeurs à voter» ou «… de stimuler la participation». Il serait surprenant que les expressions françaises finissent par s’imposer face à la tournure absurde calquée sur l’anglais. On peut bien convaincre les votants à sortir de leur maison et d’aller voter, mais il ne faudrait pas «faire sortir le vote». Un remarqueur a déjà écrit : «… le vote ne sort pas, ce sont les électeurs qui sortent (Camil Chouinard).

dimanche 1 novembre 2020

On m'a «déployé» en Côte d'Ivoire! (2019)

 2019-10-14. Monsieur Tremblay, J’ai envie de vous révéler une grande nouvelle! Pour le faire, je m’inspire d’une formule que vous utilisez : «En 1975, on m’a déployé (?)  à la bibliothèque nationale de Côte d’Ivoire ». De votre côté, vous nous rappelez que K. Domon-Grenier a été déployé en Afghanistan il y a une dizaine d’années (J. de Qc, 14 oct., p. 2). Le verbe ne poserait pas de problème selon les répertoires correctifs. Mais les exemples donnés dans les dictionnaires d’usage sont les suivants : «Déployer une troupe» (Quilllet, 1948), «Le général déploya ses troupes» (Girodet, 1997), « Déployer une armée» (Littré, 2004), «Déployer des troupes, une armée» (Robert, 2007). Bref, on ne déploie jamais un individu, qu’il soit pompier ou policier. On déploie une brigade ou une escouade. Et pour cause : déployer un homme, c’est le disposer sur une plus grande étendue! Les répertoires correctifs devraient étudier un tel usage

Exclamations: Fuck!

2024.03.01. La chroniqueuse Josée Blanchette aime bien parsemer ses textes de mots anglais. L’habitude fait partie de son style. Dans le Dev...