mardi 1 novembre 2022

Mettre la tête dans le sable (2022)

2022-10-02. Un auditeur alerte de Radio-Canada fait part au journaliste Alexandre Duval que l’expression «mettre la tête dans le sable» est un anglicisme. Nombre de Québécois seront portés à soutenir qu’elle est française. Vérification faite, on ne la trouve pas dans les répertoires de locutions françaises, ceux de Maurice Rat (1957), de Mahtab Ashraf (1995), d’André Couture (Sur le bout de la langue; 2006). Mais, elle se trouve dans le Dictionnaire québécois-français (L. Meney;1999) et dans le Dictionnaire des expressions et tournures calquées sur l’anglais (M. Parmentier; 2006). Dans ces deux usuels, on note qu’elle est une traduction de l’anglais. De fait, on traduit «he’s got his head in the sand» par «il pratique la politique de l’autruche» dans le Grand Robert & Collins. Meney et Parmentier, quant à eux, proposent «faire l’autruche». En somme, faute de connaître l’expression française, nous traduisons l’anglaise.

Comté ou circonscription ? (2022)

2022-10-03. Les médias utilisent encore le mot «comté». Ainsi, on lit dans le Journal de Québec (2 octobre, p. 10) : «… son père ( le père de la candidate) se déplace dans le comté…». Les titreurs ont poussé le mot dans le titre : «Se présenter dans un comté perdu … ». «Comté» est un calque de l’anglais descendant de l’ancien français. Il désignait un domaine dont le possesseur prenait le titre de comte. Le calque a eu une longue carrière ici. Mais il ne devrait plus être utilisé. On lit dans le Français au bureau : «… les municipalités de comté […] n’existent plus depuis leur remplacement par les municipalités régionales de comté […] que la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme a établies». Espérons que les médias consulteront les dictionnaires correctifs ou leurs guides de rédaction quand le mot se présentera à leur esprit et qu'on écrira «circonscription électorale»...

La preuve est dans le pudding (2022)

2022-10-04. Sébastien Bovet, présent sur le plateau de Radio-Canada lors du dévoilements des résultats des élections législatives, nous a enseigné un proverbe anglais : «the proof of the pudding is in the eating». Il a eu la gentillesse de le traduire de manière littérale : «La preuve est dans le pudding»! Le Robert & Collins ne se contente pas d’une traduction aussi ambigüe. On y propose plutôt : «c’est à l’usage que l’on peut juger de la qualité d’une chose». Cela a l’avantage d’être plus clair, mais un peu longuet. Une deuxième solution, plus courte et toujours aussi idiomatique, est «juger sur pièces» (André Couture, Sur le bout de la langue). Une autre suggestion : «on reconnaît un arbre à ses fruits» (Dictionnaire des expression imagées). En somme, les tournures idiomatiques françaises sont à privilégier.

«Cruiser» des caquistes (2022)

2022-10-06. Comment un quotidien, lequel a seriné le slogan «En français s’il vous plaît» à ses lecteurs pendant dix mois, en vient-il à présenter la manchette «Duhaime va ‘cruiser’ des caquistes» ? (Journal de Québec, 5 octobre, p. 3). Il y a d’abord la signification : «Cruiser : Être à la recherche d’une personne avec qui faire l’amour» (Dictionnaire de la langue québécoise; 1980 ). Il y a aussi le fait que le verbe est un mot anglais. On ne le trouve pas dans les dictionnaires français (Le Robert, Larousse. Un usuel québécois le présente en précisant qu’il s’agit d’un anglicisme. Par ailleurs, il est facilement remplaçable. On peut lui substituer «draguer» (… va draguer des caquistes), «recruter», «racoler», «attirer» (veut attirer…), «enjôler» (veut enjôler… ; faire du charme à…), etc. Les voies de contournement sont multiples. Bref, si le leitmotiv a un sens pour les lecteurs du Journal, il devrait d’abord inspirer la titraille du quotidien. 

Un long quatre ans? (2022)

 2022-10-08. On pardonnera facilement à Thomas Mulcair la phrase «Ça sera un long quatre ans à faire du lèche-vitrine…» (Le J. de Qc, 7 oct., p. 23). Il évoquait le sort réservé à Éric Duhaime. La tournure lui est inspirée par l’anglais (a long four years). Lionel Meney relève la formule observée en sol laurentien : «un + syntagme (adj. + numéral) + nom» dans son Dictionnaire québécois-français. Une telle phrase diffère du français. Elle s’explique par la proximité de la tournure anglaise. Le grammairien de Radio-Canada écrit sur le sujet : «Il faut éviter l’utilisation de termes au singulier, comme ‘un bon’, ‘un autre’, ‘un gros’, etc., devant des termes au pluriel» (Capsules linguistiques; 1999). Que faut-il dire alors? C’est simple : «Ça sera quatre ans à faire du…» ou «… quatre longues années…».

Parking et stationnement (2022)

2022-10-09. À l’occasion de l’Action de Grâce, on écrit dans le Soleil (8 octobre, p. 22), «Les stationnements situés devant les parcomètres seront gratuits» et, dix lignes plus loin «Les stationnements munis de bornes de péage seront aussi payants». En France, on aurait écrit : «Les places de stationnement munis d’un parcomètre seront gratuites» et «Les places des parcs de stationnement munis de bornes de péage seront aussi payantes» ou «les places de stationnement des parkings munis de bornes…». On a évité le mot anglais «parking» dans le reportage. Le réflexe est sain et compréhensible. Ce faisant, on ignore le fait qu’en France, on distingue le «parking» (le parc ; sens que le mot n’a pas en anglais) du stationnement (l’action de garer). On n’y cherche pas un «parking» sur la rue, mais une place de stationnement. Au demeurant, l’Office du vocabulaire français a condamné le mot anglais vers 1960 et «parc de stationnement» devrait s’imposer.

«Fausses représentations? (2022)

2022-10-10. À madame Véronique Dubé (TVA Nouvelles). Vous utilisez un anglicisme courant au Québec : «… pour escroquer des donateurs sous de fausses représentations (Le J. de Qc, 9 octobre, p. 20). Il va de soi que la traduction spontanée des expressions anglaises « false pretences» et «false representations» conduit mot pour mot à celle dont vous vous êtes servie . Les expressions idiomatiques françaises équivalentes sont multiples : escroquer par abus de confiance, par des moyens frauduleux, grâce à la tromperie, à des fallaces, à de fausses allégations, à l’aide de prétextes fallacieux, en usant de subterfuges. Le prof L. Meney juge que l’anglicisme en est un de combinaison, soit «une combinaison de mots plus ou moins figée calquée sur une combinaison anglaise». Il faut se méfier de tels calques, nombreux ici («longue distance», «meilleur vendeur», etc.) et tâcher de les remplacer.

Récipiendaire ou lauréate ? (2022)

 2022-10-11. D’abord une nouvelle : «Le prix de l’Association pour le soutien et l’usage de langue... (Asulf) a […] été remis pour le texte s’étant démarqué par la qualité de la langue {…]. Ce prix était assorti d’une bourse de 100$. La récipiendaire est Lily-Soleil Goydadin ... » (Le Soleil, 8 octobre, p. 29). Et puis, une question : Madame Goydadin est-elle une récipiendaire? Une récipiendaire est une personne admise dans un corps ou qui reçoit une décoration. On précise dans le Multi dictionnaire : «Pour désigner la personne qui gagne un prix, un concours, on emploiera plutôt ‘gagnant’, ‘lauréat’». Il est évident que la gagnante du prix en 2022, comme les cinq qui l’ont précédée de 2015 à 2019, sont des lauréats ou des gagnants. `Le dérapage s’expliquerait, selon Pierre Cardinal, par l’influence de l’anglais «recipient» (Le VocabulAide). Pour sa part, François D’Apollonia (Petit dictionnaire des québécismes) en fait un québécisme sémantique, un mot français pris dans un sens qu’il n’a pas.

Chez Revenu Québec (2022)

2022-10-12. Un communiqué portant Rémunération de l’État (diffusé à 8 h le 11 octobre) annonce qu’un haut fonctionnaire, auparavant directeur principal «chez Revenu Québec», reçoit une promotion. «Chez» Revenu Québec? Le chroniqueur Bernard Cerquiglini rappelle qu’un de ses professeurs à la pédagogie virile avait coutume de dire : «Messieurs vous irez au bordel, mais auparavant vous passerez chez le coiffeur». Il voulait illustrer de la sorte une règle fondamentale de la grammaire française : «Avec les établissements, les boutiques, on utilise les prépositions de lieu ordinaires ‘à’ ou ‘dans’». Donc : on va à la poste, on passe à la fromagerie. Et Cerquiglini poursuit : «En revanche, si l’on veut désigner le propriétaire ou le gérant de ces établissements, on doit alors utiliser la préposition ‘chez’» En somme, on aurait dû écrire : «à Revenu Québec» ou «au ministère du Revenu» et réserver «chez» au ministre et aux sous-ministres.

Un cabinet «fantôme» (2022)

 2022-10-13. Cherchons ensemble la définition ou un synonyme du mot «fantôme». Vous consultez le Multi dictionnaire. Vous trouvez : Revenant. J’ouvre le Robert. J’y lis : Apparition surnaturelle, personnage ou chose du passé. Le Robert propose un renvoi à qui cherche ce qu’est un gouvernement fantôme : consulter le mot «inexistant». Le chef de l’opposition conservatrice à Ottawa vient de dévoiler un imposant «cabinet fantôme» (Le Devoir : courrier du soir, 12 octobre). Le journal met, avec raison, l’expression entre des chevrons. Pris au sens français, l’expression signifierait un cabinet qui n’existe pas l L’anglais dit «shadow cabinet», littéralement «cabinet de l’ombre». La traduction «cabinet fantôme» est généralisée. Même le Robert & Collins la propose. Il existe une solution de rechange en français : contre-gouvernement. Ce sera peut-être l’expression que madame Anglade choisira!

Méga vente (2022)

2022-10-13. Escale VR, spécialisé dans la vente de roulottes, aurait tout avantage à recruter un correcteur. On relève nombre d’erreurs dans un placard publicitaire publié dans le Journal de Québec (13 octobre, p. 21) : «Dernière chance se poursuit», «Méga vente», «Anti-sway», «Kit de départ», «plus de 60 unités». Au cours de l’été, Escale VR annonça une «grande vente». C’étaient des grands soldes. Maintenant, on passe à «Méga vente» , Une méga vente pourrait être la vente inimaginable d’un réseau panaméricain de construction,  d’entretien et de réparation de roulottes. Si Escales VR offre des rabais de 15 000 $, il ne s’agit pas d’une prétendue méga vente mais bien davantage de «Méga soldes», ou «de vente au rabais». Il peut arriver que des ventes, à la suite de campagne publicitaire et de l’escompte offerte, des méga soldes soient un grand succès. En somme, passer de «grande vente» et de «méga vente» à «grands soldes» serait un exploit annonciateur d’autres corrections. 

On n'est pas sorti du bois (2022)

2022-10-14. Le Soleil reproduit une citation du président du Groupe Restos Plaisirs et la met en manchette (Le Soleil, 1er octobre, p. 26). C’est «on n’est pas sortis du bois». L’expression n’est pas française. Elle est une traduction littérale de l’anglais «We’re not out of the woods» . Telle est l’observation de Lionel Meney, de Michel Parmentier et de l’éditeur de la base 'Expressio.fr'. Les répertoires français l’ignorent. Cependant, on présente plusieurs équivalents : ne pas être sorti de l’auberge, ne pas être au bout de ses peines, ne pas être tiré d’affaires, ne pas voir le bout du tunnel, ne pas avoir réglé tous ses problèmes, ne pas en avoir fini avec les difficultés… La popularité de la traduction plutôt que des locutions françaises illustre le poids de l’anglais sur le français en Amérique du Nord.

Je, A.B.... (2022)

2022-10-16. Le chroniqueur Jean-François Lisée dénonce le serment d’allégeance imposé à la représentation nationale. Il se fonde sur l’histoire et ses coups fourrés depuis la Conquête. Il en néglige l’aspect linguistique (Le Devoir, 15-16 octobre, p. B12). En anglais, on déclare : «I, A.B., do swear, that I will…». À Québec, on se contente depuis belle lurette de répéter une traduction plus que littérale : «Je, A.B., déclare sous serment que…». Pourtant, on ne dirait pas «Tu, A.B., tu déclares sous serment que…». On a l’habitude de dire : «Toi, A.B., tu déclares…» ou «Moi, A.B., je déclare…». Cela vaut au moins pour les pronoms personnels multiples (Je, moi; Tu, toi..). Espérons que Paul Saint-Pierre Plamondon, ses deux collègues et ceux de Québec Solidaire en profiteront pour corriger, à la lecture tout au moins, le serment devenu secondaire en territoire laurentien. 

Ski in, Ski out (2022)

2022-10-17. On comprend bien la sensibilité des Québécois face à l’anglicisation du milieu et des locuteurs. Ils sont continuellement bombardés de néologismes américains ou anglais. Le Devoir publie une page publicitaire de Tremblant. On y lit «L’ultime expérience ski-in ski-out» (15-16 octobre, p. A11). Dans quelques années, on aura sans doute trouvé une expression française pour signifier que les skieurs peuvent louer un appartement ou une maison à proximité des pentes. Donc : Pentes à la porte, Pentes à deux pas, Pentes en face, Ski au saut du lit, Devant les pistes, etc. Pour l’heure, l’accroche confirme, s’il en est besoin, la prégnance de l’anglais, la fierté ou la satisfaction d’une ville et de ses partenaires de publiciser non seulement une entreprise mais aussi une expression anglaise. Nul effort de leur part pour trouver un équivalent n’est perceptible. Espérons que ce n’est pas vraiment une «ultime» expérience et qu’il y aura quelque chose de mieux la prochaine fois.

Paver la voie à... (2022)

2022-10-18. Nos compatriotes et les francophones sont fiers de l’apport québécois à l’enrichissement et à l’évolution du français. Il arrive souvent cependant que les créations québécoises sont des calques de l’anglais. Le chroniqueur Michel David écrit : «… paverait la voie à…» (Le Devoir, 18 octobre, p. A3). Il traduit mot à mot l’expression anglaise «To pave the way». Ce n’est pas sans raison qu’on dit que nous sommes un peuple de traducteurs! Mais, au même moment, on néglige et on oublie les expressions françaises : «ouvrir la voie», «préparer le terrain», «frayer un chemin», etc. Ces tournures, l’anglaise et les françaises, sont considérées comme des idiotismes qu’on ne traduit pas littéralement mais qu’on rend par un idiotisme de l’autre langue. 

Dre, Dr (2022)

2022-10-19. Douze mois ont passé et l’IUCPQ reproduit la faute : «… je suis […] pris en charge par #Dre Catherine ...» (Témoignage d’un patient, lettre circulaire, octobre 2022). En français, il faudrait écrire «… par la Dre…». Le 26 octobre dernier, une note sur le sujet a été adressée à l’Institut de cardiologie et de pneumologie, car une lettre semblable portait «… l’accompagnement … de Dre Catherine … et Dr Philippe…». J’ai alors acheminé à l’Institut un commentaire de Lionel Meney sur la règle d’écriture : «… en français standard, le mot ‘docteur’ employé … dans une phrase complète, est précédé d’un article» (Dictionnaire québécois français). La tournure relevée serait un calque de l’anglais selon le linguiste. Faudra-t-il féliciter l’Institut, éditeur du témoignage, de marquer l’anniversaire de l’erreur de 2021? par sa répétition en 2022.

Tournures : By the book (2022)

2022-10-20. Le 15 octobre, une femme d’affaires, Laurence Vincent, déplorait le grand nombre de mots anglais qu’on utilisaient dans son entreprise et elle illustrait les efforts consacrés à leur éradication. Hier, le Devoir publiait un reportage mettant en vedette une nouvelle élue à l’Assemblée nationale, Madwa-Nika Cadet (20 oct., p. A4). L’entrevue est exemplaire. La nouvelle élue glisse cependant dans la conversation : «… j’ai une personnalité un peu plus  ‘by the book’» (que celle de la collègue Marwah Rizqy). La chose est courante : la tournure anglaise se retrouve spontanément sur le bout de la langue et la française tarde à y apparaître. Pourtant, il en existe quelques-unes : «Selon les règles», «appliquer ou suivre (strictement) les règles, les «respecter», etc. Heureusement, la nouvelle députée n’a pas employé le calque «jouer le livre», lequel aurait pu passer pour un québécisme de bon aloi! 

Journalier «régulier»? (2022)

2022-10-21. L’adjectif «régulier» est un anglicisme polyvalent en français québécois. On a des clients, des formats, des membres, des modèles, des prix et des salaires réguliers de même que des assemblées, des heures et de l’essence régulières. Un correspondant se demande si on peut écrire «on recherche un journalier régulier». Oui si on veut recruter un journalier réglé comme une horloge! Non si on vise un employé qui travaillera à temps plein, c’est-à-dire une trentaine d’heures par semaine. Non également si le poste à pourvoir est officialisé et reconnu comme un poste permanent. En ce sens, «journalier régulier» se veut l’opposé de temporaire, d’occasionnel ou d’intérimaire. En somme, le «journalier régulier» recherché sera, selon le besoin, un «journalier plein-temps» ou un «journalier permanent» (même avec une période d’essai).

Joindre Beneva ! (2022)

 2022-10-22. La compagnie d’assurances Beneva (ce n’est pas facile à prononcer en français!) souhaite recruter des employés. Son invitation se décline ainsi : «Joindre Beneva, c’est :…» (Le J. de Qc, 22 octobre, p. 44). Le nom de l’entreprise montre déjà un parti-pris en faveur de l’anglais : on a négligé les accents qui lui auraient donné une allure française. La compagnie semble poursuivre son travail de sape. Le verbe «joindre» est intransitif en français. En anglais, il est actif. Les répertoires correctifs, dont le Multi dictionnaire (2021), le souligne. Une note du traducteur Pierre Daviault, rédigée il y a au moins 40 ans, met en garde : «On ne doit pas traduire par joindre un cercle, mais par ‘se joindre à un cercle, en devenir membre; adhérer, donner son adhésion, etc.’» (Langage et traduction; 1981). On sait que les dirigeants de Beneva méprisent les accents diacritiques. On peut penser aussi qu’ils font de la mauvaise traduction!

Bucket list (2022)

2022-10-24. La journaliste Léa Harvey présente un court reportage sur Stéphane Rousseau à l’occasion de la parution de son livre Famille royale (le Soleil numérique, 23 octobre). L’incipit de son texte est «Le temps n’est plus aux ‘bucket lists’». Les traductions proposées jusqu’à maintenant peinent à s’imposer : liste de vie, liste de cœur, liste de chose à faire avant la mort. Les premières définitions notent qu’il s’agit de choses auxquelles une personne a toujours rêvé et qu’elle veut faire en fin de vie. Il semble bien que l’expression, employée dans le contexte de la publication, est inadéquate. Le biographe ne semble pas avoir être candidat à une mort annoncée. Seule la notoriété de l’anglicisme explique sa présence. Il aurait été plus clair d’écrire : «Le temps n’est plus aux rêves», «… n’est plus à la procrastination», «… à une remise aux calendes grecques»... si on veut s’en remettre à des formules identiques.

Nombre: en chiffres ou en lettres? (2022)

2022-10-25. Une règle d’écriture veut qu’on écrive en lettres certains nombres dans un texte. On lit dans le Français au bureau «Dans le corps d’un texte, on écrit généralement en toutes lettres ce qu’on appelle {…] les nombres ronds» (trois cents personnes par exemple). On précise également : «On écrit aussi en lettres les nombres inférieurs soit à dix-sept, soit à vingt et un […] il existe un flottement dans l’usage […] L’important est d’adopter une règle et de s’y tenir» (7e édition, 2014, p. 384). On ignore habituellement ces conseils. La Faculté des sciences sociales vient de distribuer une infolettre à ses anciens dans laquelle on écrit : «… ce sont 8 épisodes […]. Découvrez les constats de nos 8 professeurs» (diffusée en matinée le 24 octobre). La pratique suggérée par l’Office n’est pas un absolu. Mais son usage semble moins cavalier et moins expéditif que de simples chiffres.

Développement «durable» (2022)

2022-10-26. L’expression «développement durable» s’est imposée. On ne réfléchit pas à son sens exact. Une section publicitaire du Soleil présente la manchette : «L’innovation au service du développement durable» (cahier La Vitrine, inséré dans la livraison du 22 octobre). Le linguiste Alain Rey a noté dans une de ses chroniques radiophoniques que ce mot en ‘-able’ exprime une simple possibilité. Donc, ‘de nature à pouvoir durer’, sans certitude d’une durée effective ou permanente. Rey proposait même une solution de rechange : développement vivable (Encore des mots à découvrir; Le Point, 1920). Dans une note en bas de page, il fait part de l’observation de son correcteur : la traduction française serait la traduction calamiteuse de l’anglais ‘sustenable (sic) development’, car ‘to sustain’ se traduit par ’soutenir’ (de manière à faire durer) et non par «durer’».

Datation: du oct. 28, 2022...

2022-10-28. Aux premières lueurs du jour, les éditeurs des quotidiens de Québecor annoncent la parution et les manchettes des Unes à leurs abonnés. En objet du courriel, on lit : «Le Journal de Québec du oct. 28, 2022 vient d’être publié». La formule est répétée jour après jour depuis plusieurs années. Elle constitue un anglicisme typographique dénoncé par le Comité de la normalisation et de la qualité du français de l’Université Laval en 1990 et par les rédacteurs du Français au bureau (2021). En gros, dans un texte, l’indication de la date dans un texte suit l’ordre croissant : «le vendredi 28 octobre 2022». La phrase répétée devraient devenir : «Le Journal […] du 28 octobre 2022 vient d’être publié». La correction irait dans le sens du leitmotiv souvent utilisé par les journaux de Québecor à l’intention des tiers: «En français s.v.p.!»

Saison «régulière»? (2022)

2022-10-29. J’ai noté l’expression «saison régulière» il y a quarante-huit heures. Sans doute à la suite d’un reportage de la radio. L’expression m’a toujours semblé douteuse. Une saison régulière suppose la possibilité de saison irrégulière. Mais on n’en a pas. On a cependant des éliminatoires, lesquels suivent la saison de hockey, de baseball ou de soccer. Cela explique peut-être que Pierre Cardinal explique l’existence de «calendrier régulier», expression synonyme, par l’influence de «regular schedule» dont il propose les traductions «calendrier officiel» et «saison». Pour sa part, Pierre Dallaire (Lexique de termes de hockey; 1983) traduit tout simplement «regular season» par «saison». Il faut souligner, par ailleurs, que l’expression jugée fautive ne fait pas partie des nombreux exemples alignés par les répertoires correctifs courants (Banque de dépannage linguistique, Multi dictionnaire…). 

Stock ou inventaire ? (2022)

2022-10-30. Remarque transmise à Bijouterie Roy (Montmagny). Vous annoncez une vente de fermeture (Le J. de Qc, 27 octobre, p. 15). Cela est sans doute justifié si la vente n’est pas une vente au rabais. Il est fort possible par contre qu’on ait affaire à des soldes puisque vous précisez « jusqu’à – 50 % sur les bijoux […] - 30 % sur les montres ». Le moins que l’on puisse dire c’est que le message n’est pas limpide. Par ailleurs, un deuxième passage révèle un anglicisme classique : «liquidation d’inventaire». Vous donnez au mot «inventaire» un sens qu’il n’a pas en français, celui de «stock» ou de «marchandise en magasin». En français, l’inventaire est le dénombrement et le relevé détaillé des marchandises de l’entreprise, rien de plus. Bref, à l’avenir, distinguer «vente» et «soldes» de même que «stock» et «inventaire»! 

Exclamations: Fuck!

2024.03.01. La chroniqueuse Josée Blanchette aime bien parsemer ses textes de mots anglais. L’habitude fait partie de son style. Dans le Dev...