mardi 28 avril 2020
Médecin «international»
2020-04-22. Au cours des dix-neuvième et vingtième siècles, nos universités invitaient des professeurs français, belges ou canadiens à venir enseigner dans les universités québécoises. Des communautés étrangères venaient s’installer ici. Personne n’a pensé à ce moment-là qu’on recevait des professeurs, des prêtres ou des religieuses internationales. Le Devoir nous apprend que l’Ontario accorde présentement des permis de pratique à des médecins internationaux (22 avril, p. A-3). On peut supposer que la province avait essayé de recruter, dans un premier temps, des médecins intermunicipaux, interrégionaux et interprovinciaux. Petit à petit, on multiplie les qualités souhaitées. Il arrivera sans doute un moment où on visera plus haut encore et qu’on invitera les candidats intercontinentaux à entrer en lice et à poser leur candidature. Pour le moment, va pour les médecins internationaux! (Texte publié dans le Devoir, 27 avril 2020, p. A 6).
lundi 27 avril 2020
Appointer quelqu'un ou le nommer à un poste? (2020)
2020-04-27. Un
téléspectateur ami de l’Association pour le soutien et l’usage de la langue
française (www.asulf.org) a expérimenté un court duel linguistique amical avec
le journaliste de Radio-Canada en poste à Washington. Il avait signalé au
journaliste la forme fautive «avoir appointé» la docteure Birx à un poste
stratégique. Il allégua que le verbe français «appointer» signifie «payer». Si
on lui fait signifier «nommer», c'est lui donner un sens qu'il prend en
anglais. De fait, Gérard Dagenais (Dictionnaire des difficultés…) écrit:
«Appointer ne veut pas dire 'nommer' mais 'verser des appointements': il ne
faut pas dire le chef de service a appointé un nouvel employé mais... a engagé
un nouvel employé» En somme, on pourrait dire que le président étasunien a
nommé madame Une Telle … et qu’elle sera appointée par le ministère de la Santé.
samedi 25 avril 2020
Compétences ou «juridiction»? (2018)
2018-02-10. Le mot «juridiction»
est mal compris. À une émission animée par Michel C. Auger (1e chaîne,
9 février 2018 vers 12 h 15), on a parlé de deux «juridictions » alors qu’on
parlait de deux pays. Je viens de découvrir une chronique d’André Racicot. J’en
reproduis ici la substantifique moelle. « … un État ne peut être une
juridiction. / Ce mot relève strictement du domaine judiciaire. Il désigne le
domaine de compétence d’un tribunal … / Le mot ...devient erroné lorsqu’il est
employé pour désigner une autorité administrative, comme un État, un
gouvernement… / ... les gouvernements ont des compétences, et non des
juridictions... / Dans le contexte canadien, juridiction est souvent employé à
tort pour désigner les provinces et les territoires… / Deux conclusions
s’imposent : 1) Une juridiction est ... un tribunal, pas un gouvernement. 2)
Les États fédératifs, provinces, cantons, Länder ... n’ont pas de juridictions,
mais des pouvoirs...Ils ont autorité dans tel domaine, et non pas juridiction».
Je recommande à tous de visiter le site internet du journaliste et professeur
retraité (http://andreracicot.ca/).
mercredi 22 avril 2020
Étudiant international (2020)
200-03-27. Le Devoir du 27
mars 2020 (p. A-6) propose à ses
lecteurs un texte d’Agnès Berthelot-Raffard (Uqam). Il est intitulé «Les étudiants
internationaux… ». Un «étudiant international»? Sans doute suit-il des
cours dans plusieurs pays. Exactement comme on le dirait d’un médecin, d’un
scientifique ou d’un négociateur qui parcourt le monde. Les étudiants seraient
des étudiants globe-trotters : cours un jour à l’U. de M., le lendemain à
Paris, le surlendemain à Londres! Le rare phénomène ne justifie pas le
dérapage. Michel Mourlet, un essayiste français, a expliqué il y a une douzaine
d’années qu’on pouvait l’expliquer par la crainte d’utiliser le mot «étranger».
On peut lire dans un livraison récente de Défense de la langue française (3e
trim. 2019) : «… n’est pas international un étudiant…qui vient en France…,
c’est un étudiant… étranger». Peut-être serait-ce politiquement incorrect,
xénophobe même, d’écrire cela!
dimanche 19 avril 2020
Change? Petit change? (2020)
2020-04-18. L’Asulf (www.asulf.org) a fait nombre de démarches par le passé pour qu’on remplace l’inscription «change» sur les changeurs de monnaie par le mot… «monnaie». Les fabricants des appareils, réticents au départ, ont fait la correction. Mais l’expression «petit change» (small change) survit. L’ancien ministre québécois Joseph Facal, chroniqueur des quotidiens de Québecor, parlant des crédits envisagés dans la foulée de la pandémie du covid-19, écrit: « … les aides annoncées … se chiffrent à plusieurs trillions. / Les sommes investies dans la relance après 1929 et 2008 sont du petit change en comparaison » (Journal de Québec, 18 avril, p. 8). Les locuteurs québécois connaissent bien l’expression recensée par Victor Barbeau en 1939. Ils apprendraient à la remplacer si on leur proposait des solutions de rechange : «… des grenailles en comparaison»,« … rien en comparaison», «… trois fois moins que rien…»,« …sont peu…», «…sont sans commune mesure…». Employer des formules française serait, en fin de compte, presque «acheter local»!
vendredi 17 avril 2020
Bénéficiaire (2020)
2020-04-15. La chroniqueuse Francine Pelletier relève le mot «bénéficiaire» appliqué aux patients, locataires, résidants ou pensionnaires des CHLSD. Elle pose la question : «qui a eu l’idée d’une telle formule? (Le Devoir, 15 avril, p. A7). Sans doute un comité! On emploie le mot mais les justifications sont rares. Le Grand dictionnaire terminologique présente dix-huit fiches du mot mais pas une ne le relie au domaine de la santé. Usito note, selon la phrase convenue : «.. dans l’administration de la santé… l’emploi de bénéficiaire est parfois critiqué». De son côté, Benoît Melançon, pensant au domaine hospitalier, écrit : « bénéficiaire. Dans les hôpitaux, patient. A besoin de l’être. Bénéficie de moins en moins » (Dictionnaire québécois instantané). Pour l’heure, le sens québécois du mot rayonne ici. Le Robert ne le retient pas encore et les synonymes alignés (allocataire, affectataire, attributaire) sont éloignés de la réalité québécoise visée. L’administration gouvernementale devrait demander à l’OQLF de se prononcer.
Médecin de famille (2020)
2020-04-12. Le professeur Jean Forest juge que l’expression « médecin de famille » est un anglicisme (2008). Diane Lamonde ne dit pas autrement et poursuit «En français, médecin de famille n’est pas un simple synonyme de généraliste : le médecin de famille est un médecin… de famille! Ce que Le Trésor de la langue française informatisé définit… comme le médecin qui traite habituellement une famille, qui la suit dans son évolution au cours des générations. Diane Lamonde écrit: «Rien à voir avec le généraliste des … Groupes de médecins de famille, qui peut parfaitement refuser de suivre le nouveau-né d’une de ses clientes – dont il peut en outre tout ignorer de la situation familiale (Français québécois… »(Montréal : Del Busso, 2018, p. 177). Anglicisme? Ne serait-ce pas plutôt une impropriété? Ne devrait-on pas dire «médecin personnel»?
jeudi 16 avril 2020
Circulaire (2018)
2018-05-22. Quel coup de pouce pour le français ce serait
si Transcontinental et Publisac corrigeaient leur publicité et écrivaient :
«Sortez les prospectus du sac... » et «Plus de 100 prospectus par semaine en
ligne» ! (publisac du 21 mai 2018). Le mot «circulaire» constitue une impropriété. Une
circulaire est, en français, une lettre commune, de nature administrative,
envoyée au personnel d’une entreprise ou d’une administration. Aussi le mot
est-il critiqué. Les auteurs d’Usito écrivent : «… critiqué
comme synonyme non standard de cahier publicitaire, feuillet publicitaire, prospectus».
Pierre Cardinal (VocabulAide) précise la signification des équivalents et observe que
«circulaire» est employé en sol laurentien sous l’influence du mot anglais
(«circular»). Il constate que «prospectus» est le terme employé en français
européen. Le moment est venu de troquer les prétendues circulaires pour des
prospectus (Billet publié le 22 mai 2018).
mercredi 15 avril 2020
Un sigle, CARE (prononciation) (2020)
2020-04-14. Les Français font les mêmes dérapages que les Québécois. Ces derniers utilisent des sigles qui ressemblent à des mots anglais. On a eu le CUSM (Centre universitaire de santé McGill) et le (sic) SPOT (Sympathique place ouverte à tous). Les locuteurs étaient portés à les prononcer à l’anglaise : Kuzum et «spote». L’État français vient de mettre sur pied le «comité analyse, recherche, expertise» (24 mars 2020). Le sigle en est CARE, homographe du mot du verbe «to care» ou du nom qui en dérive. Il est tentant de le prononcer à l’anglaise et cela arrive aux employés de la médiasphère et au personnel politique. En France, même la ministre Vidal (Enseignement supérieur, Recherche et Innovation) et la lectrice de nouvelles A.S. Lapix de TV5 donnent dans le panneau, assimilent l’acronyme au mot anglais et n’arrivent pas à le prononcer comme s’il était un mot français. Il faudrait conseiller aux cousins de ne pas suivre nos brisées à l’aveuglette!
mardi 14 avril 2020
«Pole position» ou position de tête? (2020)
2020-04-13. L’Université Laval est encore et toujours
un établissement de langue française. À ce titre, on peut supposer qu’on y fait
la distinction entre une expression anglaise et une expression française. On
lit dans un cahier spécial du Devoir (11-12 avril 2020, C 2) : « L’Université
Laval en pole position ». Le Service des communications de l’Université peut
exciper du fait qu’on trouve l’expression dans le Petit Robert. Mais ce
dictionnaire fait part de l’usage. On ne conseille pas l'utilisation d'un mot
plutôt qu'un autre. Au demeurant, on précise à l'article Pole position : «
Anglicisme, sport automobile ». Le reportage du Devoir porte sur l’intelligence
artificielle. C'est fort éloigné. L’auteur du titre aurait pu consulter le
Grand dictionnaire de terminologie (OQLF) et même Termium (Ottawa). Les deux
usuels correctifs conseillent « position de tête » et « position de pointe ».
Or une université de langue française devrait utiliser les expressions
françaises quand elles existent ou tâcher d'en forger une s'il n'y en n'a pas.
dimanche 12 avril 2020
Funérailles officielles ou funérailles civiques? (2020)
2020-04-11. Émile Loranger, le maire de L’Ancienne-Lorette, est mort le 2 avril 2020. La ville annonce qu’on lui rendra hommage et qu’on lui fera des funérailles «civiques» ultérieurement en raison de la pandémie du covid-19 (Le Soleil, 11 avril, p. 18). On lit dans un répertoire correctif « funérailles civiques. Calque de ‘civic funeral’¸ pour ‘funérailles nationales', ‘funérailles officielles’». Le professeur Pierre Cardinal (Université du Québec en Outaouais) note qu’on utilise l’expression «sous l’influence de l’anglais ‘civic funerals». Le mot français «civique», contrairement au mot anglais, n’a pas le sens de «municipal» ou d’«officiel». L’ajournement des obsèques du maire laissera le temps à l’administration municipale de remplacer l’anglicisme et de lui faire des funérailles officielles.
mercredi 8 avril 2020
Bref / «Faire une histoire courte» (2020)
Il serait de mise que les animateurs ou chefs d’antenne de la première chaîne, la radio de référence, tiennent compte des remarques rédigées par leurs services linguistiques. Ces derniers en ont sans doute rédigées des milliers depuis la création des services en 1960. Les auditeurs ont entendu l’expression «Pour faire une histoire courte » lors de l’émission Dessine-moi un dimanche (5 avril, 9 h 15). Vérification faite, à droite ou à gauche, on note qu’elle est une tournure calquée sur l’anglais. Tel est l’avis de Bruno Colpron (1982), de Michel Parmentier 2006), de Marie-Éva de Villers (2018). Et c’est aussi l’avis des grammairiens du réseau. D’abord de Camil Chouinard (1500 pièges…; 2007) et surtout des contemporains, Guy Bertrand et ses collègues du Français au micro, lesquels écrivent: «Il vaut mieux dire, selon le contexte, en somme, pour abréger, pour résumer, en un mot, pour en venir aux faits, et même, ajoutent-ils, bref’.
vendredi 3 avril 2020
Dépanneur (2020)
2020-04-02. Le mot «dépanneur», au sens de «petite épicerie», est aujourd’hui généralisé. La recommandation officielle de l’Office remonte à 1983. Le mot est source d’ambigüité : Le Devoir présente la manchette «Les dépanneurs au front» (2 avril, p. A-8). On peut deviner que ce ne sont pas les petites épiceries qui iront au front, mais plutôt leurs propriétaires. L’auteure du reportage parle heureusement des propriétaires de dépanneurs. Le mot, limité au Québec et peut-être aux zones limitrophes, ne semble pas avoir émigré en Europe. Il porte une tache originelle. Le professeur L. Meney (Le français québécois entre réalité et idéologie…) le qualifie de faux ami (pour la francophonie) et il note qu’il est né sous l’influence de l’anglais qui amène les Québécois à passer de l’inanimé à l’animé (dry cleaner = nettoyeur; best seller = meilleur vendeur; etc.) et donc à dépanneur, un être normalement animé. C’est dire que le propriétaire du dépanneur n’est pas un dépanneur. Mais ira-t-il au front?
jeudi 2 avril 2020
Etc.? les préalables
Le docteur Arruda occcupe le devant de la scène depuis deux semaines. Il est éloquent et convainquant. Il lui arrive d'appuyer trop rapidement la détente des «etc.». Mais il n’est pas le seul. La locution latine vient après une énumération ou à la suite d’une phrase incomplète. C’est la règle proposée par Le Bon usage (2008) de Grevisse. En somme, on ne devrait pas dire «les malades, etc.»). Mais on pourrait très bien dire «les ambulanciers, les infirmières, etc.». Guy Bertrand note : «… on doit toujours faire précéder l’abréviation ‘etc.’ d’au moins deux exemples» (400 capsules… ). Jean-Pierre Colignon fait une observation semblable : «Etc. est employé pour abréger une énumération… C’est… une impropriété que de l’employer derrière un unique terme» (Défense de la langue française, 4e trim. 2016). La faute est vénielle. Il serait déplacé d’en faire la remarque au docteur Arruda. Mais les Québécois devraient en prendre acte et la mettre en pratique.
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