mardi 2 septembre 2025

Mourir ou décéder ? (2025)

2025.08.01. Si l’on se donne la peine d’ouvrir un dictionnaire avant de faire un choix entre les mots «mort» et «décès», on apprendra qu’ils diffèrent légèrement l’un de l’autre. Le vieux Quillet (1948) définit le décès comme une mort naturelle. Le Multi dictionnaire (2021) observe que le mot n’est « généralement pas utilisé en cas de mort accidentelle… ». L’ancien correcteur du Journal de Québec, J. Lafontaine écrit « On dit ‘un tel meurt dans un accident’ et non ‘un tel décède dans un accident’ » (Les Mots dits; 2016; p. 51). En dépit de telles observations, on relève dans le quotidien les passages suivants : « … 25 décès en moins de deux semaines », « Le compteur des décès sur les routes … », «24 décès au total » (V. Desbiens, « Le carnage se poursuit…», Le J. de Qc, 1er août). En somme, le journaliste aurait dû parler « des morts » et devrait réserver «décès» aux morts naturelles.

Liquidation finale ? (2025)

2025.08.02. L’accroche des magasins Latulippe « Liquidation finale d’été » (courriel daté du 2 août, 5 h) aurait du sens en français si la liquidation annoncée était la dernière entreprise semblable de la saison. Le mot « finale » signifierait dans le contexte « qui se trouve à la fin des précédentes liquidations estivales ». Si tel était le cas, l’accroche serait justifiée. L’avis d’un correcteur de la Presse va dans ce sens : «… en français, [final] signifie simplement : qui termine une chose qui vient en dernier » (CamilChouinard, 1500 pièges du français…; 2007). Dit autrement : « qui se trouve à la fin d’un processus ». Ainsi une lettre ou une offre finales s’ajoutent à des démarches antérieures. Quelles seraient les solutions de rechange? Liquidation (ou soldes) de fin d’été, … d’août?

Toponymie: Au Madagascar? (2025)

2025.08.03. Faut-il écrire « à Madagascar » ou «au Madagascar »? L’auteur d'un article publié dans le Devoir des 26 et 27 juillet (p. A5) écrit « …. livraison médicale par drones à Madagascar ». De son côté le titreur modifie la phrase et aligne « … drones médicaux au Madagascar ». Quelles sont les pratiques habituelles dans des cas semblables, donc des îles : Ceylan, Cuba, Haïti, Maurice, Sumatra? À vue de nez, il semble qu’on dit généralement : à Ceylan, à Cuba, à Chypre, à Haïti (souvent en …), à Maurice, à Sumatra. Par ailleurs, on entend «au Japon », «au Groenland », appellations qui font partie de la langue quotidienne. Les politonymes des territoires insulaires énumérés sont considérés comme masculins. Mais on dira « en Jamaïque, en Martinique, en Guadeloupe », politonymes féminins. Et Madagascar? À ou Au …?

Les paramédicaux ? (2025)

2025.08.04. Que penserait-on de la phrase : «… la femme a été prise en charge par les médicaux et soignée…»? On noterait sans doute que le mot «médicaux» est un adjectif et qu’il faudrait le remplacer par le substantif «médecins». Ce serait tout à fait justifié. Par ailleurs, les journalistes de l’Agence QMI écrivent la phrase suivante sur le même modèle : «… [la] femme… a été prise en charge par les paramédicaux et transportée…» (Le Journal de Québec, 4 août, p. 13). Si l’on juge que la phrase est correcte, on pourra, en principe, la modifier et la compléter : «… et soignée par les médicaux »! Donc : «… prise en charge par les paramédicaux et soignée par les médicaux»! Il serait plus simple d’opter pour «médecin» et surtout, si on veut contourner l'adjectif «paramédicaux» : infirmiers, aide-infirmiers, ambulanciers, auxiliaires médicaux et même : personnel médical…

Un téléphone intelligent ? (2025)

2025.08.05. Monsieur André Cloutier, un membre de l’Asulf, se fait le promoteur du mot « ordiphone » contre l’expression approximative « téléphone intelligent ». Il justifie sa recommandation du fait que l’expression est une traduction littérale et malhabile de l’anglais « smart phone ». Il illustre ainsi sa position : « … si nous disons en anglais ‘he is a smart guy’, nous pourrions traduire cette phrase par : ‘C’est un homme astucieux, débrouillard, habile, rusé, etc., mais pas nécessairement intelligent’ » (Défense de la langue française, 2e trimestre 2025, p. 27). Aussi, André Cloutier suggère-t-il à l’Office québécois de la langue française de placer «ordiphone» en première place des équivalents de l’expression anglaise (smart phone) et non à la dernière.

Cheerleader (2025)

2025.08.06. Il est de nombreux mots américains qu’on a de la difficulté de rendre en français d’une manière simple et courte. Par exemple : « cheerleader » hissé en manchette du Journal de Québec : « La prison pour un cheerleader » (6 août, p. 7) et repris dans la première phrase de l’article. On y emploi aussi le nom de la fonction : « cheerleading ». On connait les « meneuses de claque ». Camil Chouinard écrit (2007) : « Chauffeur, chauffeuse de salle est le terme utilisé en France […] Le terme équivalent proposé au Québec est ‘meneur, meneuse de claque’… » (1500 pièges du français). En Espagne, la Fundación del Español Urgente recommande le mot «animadora» et sa forme masculine. Le mot « animateur » serait sans doute trop neutre ici. Peut-être y aurait-il lieu de parler de « meneur de claque » et donc de « Prison pour un meneur de claque ».

Tattoo (2025)

2025.08.07. Les éditeurs de Vos informations à la source de Québecormédia aurait pu et dû écrire : «… l’industrie du tatouage est en crise ». Malheureusement, ils ont négligé le mot «tatouage». Ou ont-ils simplement oublié qu’il existait! Ils ont plutôt mis en manchette le mot anglais : «l’industrie du tattoo est en crise» (Vos informations à la source, 7 août, 19 h 30). Ce faisant, ils ont épargné quelques lettres, deux en fait. Mais le plus grave, c’est qu’on habitue ainsi les lecteurs francophones à la graphie anglaise du mot et que ces derniers répéteront sans doute un jour l’erreur de Québecormédia. Un petit détour de prudence par le Grand Robert & Collins rappellera au besoin que «tattoo» se traduit tantôt par le verbe «tatouer» et tantôt par le substantif «tatouage».

Tournures: Mettre la pédale douce ? (2025)

2025.08.15. En raison des vacances et du beau temps, je relève avec une semaine de retard l’expression « mettre la pédale douce » utilisée dans une chronique de Joseph Facal, celle des 9-10 août (J. de Qc, p. 42). Par le passé, on notait qu’elle était une traduction littérale de l’anglais «to soft pedal» et qu’elle prenait la place des locutions « mettre une sourdine, ne pas forcer, y aller doucement, ne pas trop insister, mettre un bémol à…». Ces solutions sont maintenant concurrencées par le rendu jugé autrefois comme un anglicisme. Michel Parmentier signale le calque dans le Dictionnaire des expressions et tournures calquées… (2006). Jean Forest fait de même deux ans plus tard dans le Grand Glossaire des anglicismes. Par ailleurs, www.Expressio.fr enregistre l’expression et, somme toute, l’officialise. Le Multi dictionnaire en fait un terme familier. Bref, l’expression est valable, mais les possibilités de choix sont à la portée des locuteurs.

 

Portable ? (2025)

2025.08.16. Il y aurait lieu de faire une distinction entre les adjectifs ou substantifs «portable» et «portatif». Celui-ci est un objet qu’on porte sur soi, dans sa poche ou à la ceinture : un téléphone ou un ordiphone par exemple. Celui-là est un objet que l’on peut transporter : une machine à écrire, une petite table... Mais la distinction n’est pas facile à appliquer ou à imposer : l’anglais aligne un seul mot en la matière : «portable». Cette «pingrerie», si l’on veut, explique sans doute la phrase : «Nous… nous interposons (sic) à la mise en place de la loi qui interdit l’utilisation de téléphones portables» (change.org, 15.08.25, 15 h 9). Il y aurait eu lieu de parler de «téléphones portatifs» ou de «cellulaires». Mais les dictionnaires courants, il est vrai, ne sont pas toujours aux créneaux: le Multi dictionnaire (2021) propose même l’exemple : « une table de piquenique portative »!

Flyé (2025)

2025.08.17. Nos concitoyens sont créatifs quand il est nécessaire d’intégrer des mots anglais au français québécois. Prenons le verbe «flailler» (graphie proposée par Léandre Bergeron) ou la forme laurentianisée «flyé» de «to fly». Une manchette du Soleil le met en vedette : « Un projet ‘flyé’ pour remplacer un stationnement » (17 août, 4 h 1). C’est le titre de l’article et l’auteur l’emploie en début de texte. Les solutions de rechange ne manquent pas s’il faut qualifier le projet : créatif, débridé, éclaté, étonnant, excentrique, extraordinaire, extravagant, fabuleux, farfelu, fou, foufou, folichon, incroyable, inouï, pété...». Le choix est difficile, trop sans doute. Faut-il rappeler une citation de Frédéric Dard : « Entre deux mots, il faut choisir le pire »? Mais s’il y en a une dizaine, le choix du mot anglais s’imposera encore plus facilement! Non?

Training ou entrainement ? (2025)

2025.08.17. Les abonnés et habitués des centres Éconofitness peuvent lire sur les écrans l’expression «Ta destination après ton training». On la répète en boucle. L’entreprise n’a pas réussi à dénicher d’équivalents français. Pourtant, un usuel en aligne cinq : apprentissage; formation; (sport) entraînement; (militaire) instruction, entraînement; (entreprise) formation (Le Grand glossaire… / Jean Forest). Les Français, déjà familiers des mots se terminant par -ing, le connaissent aussi. En 1999, Alfred Gilder l’a inséré dans son dictionnaire franglais-français (En vrai français dans le texte). Bref, les expressions pour dire en français «après ton training» viennent tout naturellement à l’esprit et elles sautent aux yeux : «... après ton entraînement», «après tes exercices», «après ta séance», etc. La correction s'impose.

 

Une inervention fait le boulot (2025)

2025.08.18. On peut toujours exciper du fait que les journaux, les quotidiens avant tout, sont rédigés et publiés à la course, soumis à des heures de tombée et de distribution. Cela peut expliquer le pardon de fautes, de contresens ou de tournures douteuses en dépit de tous les efforts des correcteurs. Mais l’important est que les journalistes découvrent, même après-coup, les passages critiquables et imaginent des solutions améliorées. Un exemple ? Celui-ci : «Le PDG d'Air Canada s'attendait à ce que l'intervention d'Ottawa fasse le boulot » (La Une du soir, Le Journal de Montréal, 18 août). Il est difficile d’imaginer qu’une intervention puisse faire le boulot, littéralement s’entend. Pas plus qu’une déclaration ou une remarque. Il est vrai qu’on pourrait lui donner un sens figuré, celui de « … règle le problème», «… dénoue l’impasse», «fasse l’affaire», …

Retour en classe ? (2025)

2025.08.19. La journaliste Dion-Viens propose (!) aux lecteurs du Journal de Québec le calque suivant : « … lors du retour en classe… » (19 août, p. 11). Il y a un demi-siècle, Louis-Paul Béguin l’avait épinglé qui écrit : « À la vitrine d’un magasin je lis : Retour à l’école. C’est ‘rentrée des classes’ qui est plus français » (Le mot du jour, OLF, 1974). Depuis, le calque est critiqué par les chroniqueurs : par Guy Bertrand en 1999 (« L’expression […] est une traduction littérale de l’anglais »; par Paul Roux (2004), dont on peut retenir l’observation « En français, on parlera plutôt de ‘rentrée des classes »; par Camil Chouinard (2007) : « Il faut dire ‘rentrée scolaire’ ou ‘rentrée des classes’[…] Le terme ‘retour à l’école’ est un calque de ‘back to school’». Les observations plus récentes de Jean Forest (Le Grand Glossaire…; 2008) et de Marie-Éva de Villers (Multi dictionnaire…; 2021) vont dans le même sens. Il y aurait donc lieu que la « marche » des journaux de Québecormédia envisageât la préparation d’une note sur le sujet.

Momentum (2025)

2025.08.20. Le français et l’anglais n’empruntent pas les mêmes mots du latin. Jean Darbelnet donne quelques exemples de mots utilisés en anglais mais non en français: ex officio, per annum, versus, etc. La plupart sont cependant fort répandus au Québec. On peut ajouter à ces exemples le mot «momentum». Le Journal de Québec rapporte la phrase d’un dirigeant de Léger. La victoire du P.Q. dans Arthabaska « contribue à lui donner un ‘momentum’» (20 août, p. 3) . Le Grand Robert & Collins traduit le mot par des expressions et le Petit Robert n’offre pas d’article au dit mot. Alors comment le remplacer dans la phrase ? Sans doute par «… contribue à lui donner un élan », « … une poussée » ou « … une impulsion ».

Combler ? des postes (2025)

2025.08.21. Les journaux et les médias électroniques devraient faire des usuels correctifs québécois des instruments de travail quotidiens et incontournables. Le Multidictionnaire de M.É. de Villers, par exemple, signale environ 900 mots anglais à éviter quand on écrit en français et plus d’un millier de formes fautives. Si le dictionnaire était à la portée des journalistes, ils éviteraient peut-être des calques comme celui relevé dans une manchette : « Plus de 2700 postes […] pas encore comblés » (Le Journal de Québec, 21 août, p. 9). Un simple coup d’œil au Multi aurait appris au titreur que la tournure « Combler un poste » est une impropriété et qu’on devrait écrire « pourvoir un poste » ou encore « pourvoir à un poste ». L’auteure de l’article n’a pourtant pas fait la faute. Mais le titreur a « bafouillé » ou dérapé!

 

Plein d'inventaire ? (2025)

2025.08.22 Les magasins Tanguay publient une page publicitaire dans le Journal de Québec (22 août, p. 9). On y annonce des méga-soldes et « plein d’inventaire » (sic). Il va de soi que l’expression est une impropriété : on lui donne le sens de stock, de meubles ou d’appareils en vente. Or, en français, un inventaire est un exercice de dénombrement et un relevé détaillé des marchandises. Point! Relisons l’extrait suivant : «… le terme ‘inventaire’ ne peut désigner que le dénombrement […] et le document qui en résulte. C’est sous l’influence du terme anglais ‘inventory’, qui, outre les acceptions du français, désigne également les marchandises en magasin, que l’on emploie improprement le nom ‘inventaire’ en ce sens» (Le Multidictionnaire de la langue française; 2021). Alors à la prochaine occasion : stock imposant, … imbattable, … sans pareil… à la place de «plein d’inventaire».

Tournures: Dans le bois (2025)

2025.08.23. Une manchette du Journal de Québec se déroule ainsi : «Il quitte le monde de la finance pour vivre dans le bois» (23-24 août, p. 2). On lit à deux occasions la tournure dans l'article. En France, on aurait plutôt écrit : «… pour vivre dans la forêt» ou «… pour vivre dans les bois». Le professeur Meney note que « le bois» désigne un « espace de terrain couvert d’arbres » (Dictionnaire québécois-français). Ou encore un boisé, c’est-à-dire une parcelle boisée située habituellement à l’extrémité d’une ‘terre’. Le citoyen qui choisit de suivre l’exemple de Henry David Thoreau devrait s’inspirer du titre de son récit «Walden ou la vie dans les bois » . Mais cela mettrait à mal l’expression toute québécoise et calquée sur l’anglais «Ne pas être sorti du bois»!

Toponymie : Aux Grondines? (2025)

2025.08.24. Un journaliste du Soleil écrit : «… un propriétaire fier de ce qu’il a accompli sur ses terres, aux Grondines» (24 août, 4 h 9). Pourquoi «Aux…»? Grondines est une ville comme le sont Trois-Rivières, Sept-Îles ou Les Escoumins. Et quelles prépositions emploie-t-on lorsqu’on veut identifier l’une de ces villes? Sans avoir à réfléchir longtemps, on répondra « à Trois-Rivières », « à Sept-Îles », « aux Escoumins ». Alors, « aux Grondines » serait correct? Peut-être, si le toponyme officiel de la ville comprenait l’article (Les Grondines) comme on le fait pour «Les Escoumins». Mais ce n’est pas le cas. Il faudrait écrire «à Grondines». Il me semble.

Destination Québec cité (2025)

2025.08.25. Destination Québec cité : le nom de l’organisme se termine par une forme fautive et une impropriété. Le dernier mot de l’appellation, cité, désigne seulement la partie la plus ancienne d’une ville. Cela vaut pour de nombreuses villes. Le Multi dictionnaire donne deux exemples : la Cité de Londres et l’île de la cité à Paris. Mais le mot survit ici en raison de la proximité du toponyme anglais «Quebec city» qu’on doit traduire par « ville de Québec ». Ainsi, lorsque le Journal de Québec étale la manchette « Le ménage commence à DQc » (25 août, p. 3), il donne au sigle la signification en clair « Destination Québec cité ». L’organisme devrait raccourcir sa raison sociale, adopter tout simplement «Destination Québec» et conserver l’abréviation DQc ou DQC, Qc et QC tenant lieu de Québec (et non de Québec cité).

Joke (2025)

 2025.08.26. De nouveau une manchette exemplaire : «Sam Hadad est une ‘joke’». Les titreurs du Journal de Québec (26 août) se sont inspirés des propos de Jackie Smith, conseillère municipale à Québec, et de son collègue Claude Villeneuve. Il est courant en sol québécois qu’on utilise un mot anglais quand on veut lui donner un sens péjoratif, comme c’est le cas ici. De fait cependant, on peut affirmer que le mot «joker» aurait été préférable pour désigner une personne (ici Sam Hadad) plutôt qu’une notion. Le mot anglais ferait mouche plus aisément que les nombreux mots français possibles dans l’hypothèse où on souhaite identifier une personne: blagueur, farceur, plaisantin, rigolo ou rigolard. Ou même «jokeur», prononcé «djaukeur (selon Léandre Bergeron). En somme, à l’avenir et en cas de besoin, J. Smith et C. Villeneuve pourront faire appel à des synonymes et à des mots français.

Voir un homme être poignardé (2025)

2025.08.27 Les Québécois et les Canadiens français en général en arriveront sans doute à ne plus sursauter face à une phrase comme : «… une mère voit un homme être poignardé…» (Québecormédia; Infolettre du mercredi 27 août 2025, 18 h 😎. Non pas en raison du drame évoqué, mais plutôt en raison du recours à la forme passive « … être poignardé ». Lionel Meney écrit « Être + part[icipe] : ne s’exprime pas en français standard » et il illustre l’observation par un exemple : « ‘Jocelyn T… [hockeyeur] a vu ses efforts être récompensés par le trophée … », expression qu’il corrige ainsi : «a vu ses efforts récompensés » (Dictionnaire québécois français; 1999). Pour l’heure, la forme passive de la manchette est encore critiquée ou l’était encore en 2017 (Politique de l’emprunt linguistique / OQLF). En somme, « … voit poignarder un homme… » eut été préférable.

Pas de lumière sur un vélo (2025)

2025.08.28. Le disque-jockey Olivier Harvey-Cloutier est mort à la suite d’un accident de vélo angle des boulevards Charest et Langelier. Le Journal de Québec (28 août) consacre le tiers de sa première page et la page 3 à la nouvelle. Les deux manchettes diffèrent. À la page 3, on note que le vélo n’avait pas de «phare»; en page couverture, on précise plutôt qu’il n’avait pas de «lumière». C’est dire que le titreur aurait glissé du mot correct, «phare», à l’anglicisme sémantique, «lumière». La dérive n’est pas nouvelle. Gaston Dulong l’a notée en 1968 dans Dictionnaire correctif du français. Gilles Colpron fait de même par la suite et particulièrement en 1994 (Le nouveau dictionnaire des anglicismes). En 2021, le Multi dictionnaire précise encore : «lumière. Anglicisme au sens de ‘phare’». Espérons que les correcteurs du quotidien éviteront le dérapage à l’avenir.

Chez (?) Postes Canada (2025)

2025.08. 29. Un courriel daté du 28 août et provenant de Desjardins Sécurité financière porte en objet : «Conflit de travail chez Postes Canada». La préposition «chez» est-elle bien à sa place ? Le Multi dictionnaire précise : «on emploie normalement ‘chez’ devant un nom de profession, un patronyme et ‘à’ devant un nom de lieu, de chose»… chez Gauthier… à l’épicerie». Le professeur Bernard Cerquiglini donne un avis semblable : «Avec les établissements, les boutiques, on utilise les prépositions de lieu ordinaires ‘à’ ou ‘dans’ : ‘on va à la poste, on passe à la boulangerie, on se rend dans un salon de coiffure'» (Merci professeurs! 2008). Le professeur explique que la préposition vient du latin «casa» et qu’elle signifie «maison». En somme, Desjardins devrait idéalement écrire : «À Postes Canada», puisqu’on a à l’esprit un service de l’État et non une maison.

 

Scoop (2025)

2025.08.29. Le Journal de Québec et le Journal de Montréal font leur propre publicité : «Utilisez la force du Journal pour faire bouger les choses / SCOOP / Consultez-nous […]» (Le Journal de Québec, 29 août, p. 😎. Si on prend le mot «scoop» comme substantif, cela voudrait dire : primeur ou exclusivité. En elle-même l’expression n’implique pas que le recours à la publicité achetée de Québecormédia influencera les entreprises. Il y a quelques mois, un sondage a révélé que les Québécois n’appréciaient pas la publicité en anglais. Il est fort possible que l’emploi du mot «scoop» inspire une réaction semblable. Il est vrai qu’il a envahi le français il y a belle lurette : Victor Barbeau l’a relevé entre la fin des années 1930 et 1970 (Le français du Canada). Sa brièveté rend difficile son remplacement. Mais le Journal de Québec ne devrait pas baisser pavillon pour autant.

Un article en vente (2025)

 2025.08.30.  On lit dans Le français au bureau (7e éd., 2014) sous la colonne ‘À éviter’ : ‘acheter un article en vente’ et sous sa voisine ‘À retenir’ : ‘acheter un article en solde, en réclame, en promotion, au rabais’. Les publicitaires devraient faire noter l’observation, car on n’en tient pas toujours compte. Ce fut le cas il y a peu. Tanguay l’entrepôt publie une page publicitaire dans le Journal de Québec (29 août, p. 9) et on y lit «Méga vente en magasin». Impropriété ou anglicisme? Le Multidictionnaire (2021) en fait une forme fautive. Le grammairien Gérard Dagenais écrit à son propos en 1967 : «… n’a jamais eu le sens de ‘mise en vente de marchandises au rabais’, qui est l’une des significations du mot anglais ‘sale’. C’est commettre un anglicisme que de prêter cette acception à ‘vente’». La ‘méga vente’ de Tanguay pourrait-elle devenir un «méga solde» ou un «solde monstre»?

Tournures: Se mettre la tête dans le sable (2025)

 2025.08.31.  Professeur à l’université Bishop’s, Michel Parmentier a publié un excellent répertoire d’expressions adaptées de l’anglais. Il en dresse une liste de 700 tournures employées ici et mal traduites. On y trouve «La tête dans le sable» (Le Journal de Québec, 30-31 août, p. 6) amputée du verbe « mettre » qui la complète habituellement. L’article du professeur est bref: «(se) mettre la tête dans le sable / to put one’s head in the sand / faire l’autruche, pratiquer la politique de l’autruche » (Dictionnaire des expressions et tournures calquées... ; 2006). Donc, dans l’ordre : l’anglicisme, l’expression anglaise de départ et celle recommandée. Veut-on d’autres synonymes ? un détour par le Dictionnaire québécois-français de Lionel Meney s’impose. On y présente au moins six équivalents.

Mourir ou décéder ? (2025)

2025.08.01. Si l’on se donne la peine d’ouvrir un dictionnaire avant de faire un choix entre les mots «mort» et «décès», on apprendra qu’ils...