2025-10-01. «Un policier en service a été frappé de plein fouet par une voiture…» (Le Soleil, 30 septembre, 21 h 3). C’est donc dire que la voiture a frappé (sic) le policier. Il est vrai qu’on améliore constamment les véhicules. Dans le passé et jusqu’à maintenant, leurs compétences (!) se limitaient à heurter, à renverser ou à écraser des passants. Elles n’allaient pas jusqu’à pouvoir les frapper. L’illusion de ce pouvoir imaginé vient de la mal traduction et de l’influence du verbe anglais «to hit» que l’on peut rendre à la fois par «frapper» ou « heurter ». Mais frapper suppose que l’on multiplie les coups. Pour l’heure, les voitures ne sont pas encore assez « intelligentes » et ainsi parvenir à assener des coups à des promeneurs.
dimanche 2 novembre 2025
Cold case (2025)
2025-10-01. Ni la journaliste Marianne Lafleur, ni l’ex-sergent détective André Gélinas, ni les metteurs en page ne parviennent à dénicher un équivalent à «cold case» (Le J. de Montréal, 1er octobre). Ils ne sont pas les premiers à déclarer forfait. On contourne la difficulté dans la manchette : on écrit «Trois énigmes policières…». La journaliste, pour sa part, fait fond sur l’expression «cold case». C’est compréhensible, car elle est courte par rapport aux solutions du Grand dictionnaire terminologique ou de Termium. En vrac : affaire non résolue, dossier non résolu, cas non résolu, affaire gelée, affaire dormante. Des correspondants du blogue Au cœur du français proposent «affaires classées» ou «affaires non résolues ». Ces tournures n’ont pas le punch de l'expression anglaise, mais elles en constituent des variations correctes.
Dès (2025)
2025-10-02. La préposition « dès » aurait-elle perdu sa nuance de précocité ? Bernard Cerquiglini présente deux phrases : «Il a neigé à partir du 15 novembre» et «Il a neigé dès le 15 novembre» . La dernière laisse entendre que la neige, au 15 novembre, est inhabituelle… le linguiste donne un autre exemple : «La réunion commencera dès 10 heures», lequel permet de supposer que les réunions débutaient généralement plus tard. La nuance évoquée est ignorée par les dictionnaires correctifs. Le phénomène est présent en sol québécois. On trouve le titre suivant dans le Journal de Québec : « Le vouvoiement imposé aux élèves dès janvier…» (2 octobre, p. 3). La préposition laisse croire que le vouvoiement devait, au départ, être mis en vigueur à une date ultérieure. La tournure « à partir de janvier » aurait été plus neutre.
Tournures: C'est le fun (2025)
2025-10-03 Si un étudiant ou un élève avait donné à sa rédaction le titre : «Le CH a bien du fun à Québec », le professeur ou l’instituteur lui aurait sans doute recommandé de trouver un équivalent au mot anglais «fun» et peut-être lui aurait-il conseillé d’employer une graphie française. Le mot est un exemple de mot aux multiples sens, un mot passe-partout pourrait-on dire. Si quelqu’un dit « C’est le fonne», ou «c’est le fun» , cela pourrait dire amusant, beau, drôle, léger, original, roboratif… Comme la manchette citée est celle du Journal de Québec (3 octobre, 1e p.), les titreurs auraient pu choisir un équivalent français au substantif «fun» ou «fonne». Et écrire : Le CH a bien du plaisir à Québec, le CH s’amuse bien… , le CH se plait bien …, le CH apprécie sa visite, etc. Mais le mot est un anglicisme classique, bien installé ici : il y serait depuis le XIXe siècle.
Médecin de famille (2025)
2025-10-04. Le Soleil pose la question suivante à ses lecteurs : «…craignez-vous de perdre votre médecin de famille? » (4 octobre, 6 h 6). Un tel médecin prendrait en charge tous les membres d’une même famille, père, mère, enfants et peut-être le grand-père et la grand-mère. La question essentielle porte sur l’existence du phénomène en sol laurentien. Y a-t-il ici beaucoup de familles qui ont un seul médecin pour le père, la mère et les enfants? Le docteur Serge Quérin écrit sur le sujet : «… les médecins (soignent) rarement des familles entières, mais plutôt des individus (y compris d’ailleurs des célibataires). Ces médecins sont en fait des ‘omnipraticiens’ ou des ‘médecins généralistes’ » (Dictionnaire des difficultés du français médical; 2006). Il affirme même que le titre de ‘médecin de famille’ serait un calque de l’anglais. Pour l’heure, le Multi dictionnaire ne corrobore pas cet avis.
Les séries éliminatoires (2025)
2025-10-05. Le Journal de Québec présente, à la Une, la manchette : «Le CH en route vers les séries» (4-5 octobre). Séries? Serait-il préférable d’écrire les «séries éliminatoires» ou, tout simplement, «les éliminatoires »? Lionel Meney juge que l’expression est un calque de l’anglais (Dictionnaire québécois-français; 1999). De son côté, Pierre Dallaire, auteur du Lexique de termes de hockey (1983), consacre une entrée à «séries de la fin de saison», mais uniquement pour orienter les lecteurs vers l’article intitulé «éliminatoires». On peut supposer que le renvoi constitue à la fois une préférence et une recommandation. Au demeurant, Paul Roux critique l’expression «faire les séries» mais propose «participer aux séries». C’est dire que le mot «séries» est accepté.
Une avancée? (2025)
2025-10-06. Le substantif « avancée » est épinglé, mieux: présent, dans l’usuel dont le titre est Petit dictionnaire des québécismes; anglicismes… et l’auteur, F. D’Apollonia (Éditions de l’Homme, 2010). On le considère comme un québécisme. Ce qui n’est pas nécessairement rédhibitoire. Par exemple, dans la manchette : «Appareils auditifs : plusieurs avancées technologiques » (Le Soleil, 6 octobre). À brûle-pourpoint, on pourrait y remplacer le mot «avancées» par «percées», «progrès», «améliorations», etc. Mais il n’y a pas obligation ou conseil de le faire. La plupart des répertoires correctifs imprimés (Multi dictionnaire, Usito…) ou numériques (Banque de dépannage, Termium…) ignorent ce tout petit problème. Reste que le doute et la vérification sont habituellement de mise.
Décéder ou mourir ? (2025)
2025-10-07. Les langues comportent souvent des règles ou des pratiques qu’on peut juger excessives ou tatillonnes à vue de nez. Jean Darbelnet note par exemple que le verbe «décéder» ne se dit pas d’une mort violente ou accidentelle . Le Multi dictionnaire fait état de la même remarque : «Décéder… n’est généralement pas employé lorsqu’il s’agit d’une mort accidentelle ou violente». Pourtant, on lit dans le Soleil : «Un motocycliste est décédé dans une collision…sur la rue Saint-Paul … » (7 octobre, 15 h 33). Si on se réclame des deux usuels correctifs évoqués, il est clair qu’il aurait fallu écrire : «… est mort». Mais l’expression apparaît peut-être trop brutale pour un lectorat sensible. Dès lors, il devient prudent de se servir de l’euphémisme : « … est décédé », expression réservée par le passé aux morts «dans leur sommeil » ou «dans leur chaise berçante ».
Une bonne opportunité! (2025)
2025-10-08. Sophie Durocher rapporte un propos de Louis C.K. au sujet de prestations à venir en Arabie saoudite. L’artiste aurait déclaré : « Quand j’ai appris que le pays s’ouvrait, je me suis dit : ‘C’est vraiment une bonne opportunité’ » (Le Journal de Québec, 8 octobre, p. 45). On ne peut pas reprocher à la chroniqueuse de citer fidèlement le comédien. Cela ouvre la porte à l’inspection de l’expression « bonne opportunité ». En français, il n’y a pas lieu de qualifier ainsi le dernier mot de la phrase. Une opportunité est de soi toujours une circonstance favorable. La solution de rechange idéale aurait été, si Louis C.K tenait mordicus au qualificatif, « une bonne occasion ». Mais on peut subodorer qu’il aurait évité cette « mauvaise opportunité! »
Dès (2025)
2025-10-09. Lecteur préoccupé de la qualité du français («immense programme» aurait-dit De Gaulle), je relève quatre expressions propres à justifier une remarque (paver la voie, timing, bonne opportunité, dès 18 h). Je laisse les habitués de la page se pencher sur les trois premières. Voyons «dès 18 h». Une page publicitaire de TVA sports annonce une émission avant-match :«en semaine 17 h» et le match lui-même : «dès 18 h» (Le Journal de Québec, 8 octobre, p. 57). Pourquoi, dans le premier cas, écrit-on «17 h» et dans le second, «dès 18 h»? La précision «en semaine 17 h» signifie que l’émission commence à 17 h. Parfait. Toutefois, annoncer «dès 18 h» devrait signifier qu’il y a un changement aux horaires. Si c’est le cas, la préposition est justifiée. Mais si les matches commencent toujours à 18 h, il n’y a pas lieu d’utiliser la préposition : 18 h suffit. Voudrait-on combler un vide? Préciser : «À compter de…).
Chilleur (2025)
2025-10-10. Le Dictionnaire du chilleur de Jérôme 50 (alias Jérôme Charrette-Pépin) est paru l’an dernier (Le Robert Québec; 444 p.). Le mot «chilleur» est un néologisme québécois! Il dérive cependant de l’anglais et non du français. On écrit dans Défense de la langue française (no 297, 3e trimestre 2025) : «… ce sont nos amis québécois qui ont introduit l’expression [chiller] à partir de l’anglais ‘take a chill pill’, signifiant ‘prendre une pilule glacée pour retrouver son sang-froid’, c’est-à-dire prendre un calmant permettant de ‘se détendre’. […] la sémantique du verte ‘to chill’ a évolué vers l’idée de ne rien faire, de se reposer» . En somme, en français, «chiller», c’est fainéanter, glander, glandouiller, lézarder, musarder, paresser, se prélasser. Quelques substantifs suivent naturellement : branleur, fainéant, glandeur, paresseux, roger-bontemps… Mais, «chilleur», le calque de l’anglais, s’impose.
Dépanneur (2025)
2025-10-11. Un certain nombre de lecteurs parmi les milliers qui fréquentent le Journal de Québec se sera probablement interrogé en lisant le mot «dépanneur» même s’il fait partie du décor québécois. D’abord, « La fillette a ensuite été aperçue … dans un dépanneur ». Puis : « C’était à 750 m du dépanneur» (Le J.Q., 11-12 octobre, p. 4, 2e col.). Posons brutalement la question. Ne faudrait-il pas dire: « ... dans une dépannerie »? Mutatis mutandis, tous disent « dans une épicerie, dans une pharmacie, dans une pâtisserie. Et jamais : dans un épicier, dans un pharmacien ni dans un pâtissier. Il est fort possible que l’Office ait quelque peu déraillé devant les ravages de « convenience store ». Et le déraillement a été couronné de succès : le dépanneur est le propriétaire du dépanneur !
Mansplaining (2025)
2025-10-12. Jackie Smith, en lice pour la mairie de Québec, a profité d’une déclaration du maire actuel pour « déplorer le ‘mansplaining’ » de Stéphane Lachance, lui aussi candidat au poste dans la présente course. Comment peut-on rendre le verbe «to mansplain»? Le dictionnaire fédéral Termium propose «mecspliquer» en français et «machoexplicar en espagnol. Fundéu, la Fondation de l’espagnol urgent (si l’on veut), note que le néologisme ‘machoexplicar’ est un équivalent correct du verbe anglais. Ces pratiques recommandées sont tout à fait valables. Aussi, la candidate à la mairie de la capitale pourrait logiquement déplorer les «mecsplications» ou les biais machos qu’elle décèle. Et ainsi proposer un mot français.
Toponyme: Venezuela (2025)
2025-10-14. Voici une manchette du Journal de Québec : «Le Venezuela ferme son ambassade en Norvège» (14 octobre, p. 25). On met un accent au politonyme «Norvège» et on ne le fait pas pour « Venezuela». On justifiera les pratiques différentes par le fait que Norvège est une traduction du toponyme alors que Venezuela est le toponyme original en espagnol. Ne faudrait-il pas l’accentuer quand on l’écrit dans un texte français? Un collaborateur habituel de Défense de la langue française propose l’accentuation des toponymes dont les adjectifs le sont : « nigérian », «libérien», guatémaltèque, vénézuélien, etc. Donc : Nigéria, Libéria, Guatémala, Vénézuéla. Mais il a un flottement. Jean-Pierre Colignon écrit : « Il n’y a pas d’accent dans ‘Venezuela’, n. p. étranger. En revanche, le gentilé est un vocable français ». Mais si on en met trois, il deviendra un mot intégrable sans restriction.
Académique (2025)
2025-10-14. Ce n’est pas tous les jours que l’on peut s’arrêter à un double anglicisme. En voici un : «… à Rosemère, une controverse émerge autour des qualifications académiques du maire sortant…» (Vos infos à la source, Quebecormédia, 14 octobre 2025). D’abord, «qualification». Le Multi dictionnaire met les scripteurs en garde : «Forme fautive. Qualifications. Anglicisme au sens de ‘formation’, ‘compétence’». Et ensuite, «académique». Le même répertoire correctif précise : «formation académique. Calque de ‘academic training’ pour ‘formation scolaire, universitaire’». En somme, les «qualifications académiques» du candidat en lice sont tout simplement sa formation scolaire ou universitaire. Il est à espérer qu’on se méfiera de la chausse-trappe à l’avenir.
Passif anglais (2025)
2025-10-15. En 1967, le grammairien Gérard Dagenais (1913-1981) écrivit : «Le français au Canada souffre de l’influence du passif anglais, qui fausse ses perspectives. Il importe de s’appliquer à s’exprimer le plus possible par la voix active. On cherchera le plus possible à éviter le passif (Dictionnaire des difficultés de la langue française au Canada, p. 474). Le conseil, le moins que l’on puisse dire, n’est pas toujours suivi. Le lectorat du Journal de Québec a sous les yeux la phrase « Le compagnon de la victime a été rencontré par les enquêteurs … » (15 octobre, p. 20). Si les rédacteurs de la nouvelle avaient suivi les conseils de Gérard Dagenais, ils auraient écrit : « Les enquêteurs ont rencontré le compagnon de la victime ». L’anglicisme de syntaxe illustré par l’extrait marque la profondeur de l’anglicisation furtive du français québécois.
Collège des médecins (2025)
2025-10-16. Le prétendu «’collège’ des médecins» fait la manchette. La raison sociale est reproduite à plusieurs reprises dans le Journal de Québec (16 octobre, p. 6 et 7). On voudrait destituer le président du «Collège…». Le problème évoqué est de la compétence interne de l’Ordre et le nom de l’organisme également. Mais ce dernier est un anglicisme qu’il faudrait corriger à la première occasion. Comme on le sait, ou comme on le rappelle à l’occasion, l’appellation «collège des médecins» est une traduction approximative et malhabile de «College of physicians». Le regroupement n’a rien d’un collège. Aussi, l’Association pour le soutien et l’usage de la langue française (Asulf) tient-elle toujours à une résolution adoptée en juin 2022 : «que le regroupement des médecins favorise […] l’appellation correcte en français, Ordre des médecins »
Napperon
2025-10-17. «Le gouvernement du Québec émet une directive interdisant l’utilisation du terme «napperon». Telle est la manchette de l’édition numérique du Journal de Québec (17 octobre, 5 h). L’important à noter est la précision relative à la signification du mot «napperon» : «feuille sur laquelle sont présentés les projets importants ». C’est une révélation (!) que les dictionnaires négligent. Ils s’en tiennent à la définition «Petite nappe individuelle placée sur … un meuble pour le protéger » (Le Multi dictionnaire …; 2021). On peut subodorer que les répertoires correctifs se plieront au desiderata de l’État : «… ne plus utiliser le mot «napperon» et … le remplacer par ‘feuillet d’information’» (le Journal…). Le succès de l’opération est assuré même si la confusion ‘napperon et manuscrit de projet ‘ n’en est qu’à ses balbutiements!
Joke (2025)
2025-10-19. Le romancier québécois Daniel Grenier ne parvient pas à traduire le mot anglais ‘joke’. La collaboratrice du Devoir tient pour acquis qu’il s’en contente. Elle observe : «Un roman qu’il voit un peu comme une ‘joke’» (Le Magazine; Le Devoir, 18-19 octobre, p. 33). Ce faisant, le romancier et la journaliste entérinent un mot anglais qui a des titres de noblesse! En 1968, Gaston Dulong l’a inscrit dans son Dictionnaire correctif du français. Il est également présent dans le Dictionnaire québécois d’aujourd’hui (1992). Cela ne signifie pas cependant qu’il faille l’utiliser. Camil Chouinard, ancien correcteur à la Presse note :«Joke. On peut très bien éviter le mot […]’. On rira autant d’une plaisanterie ou d’une blague» . Lionel Meney aligne sept solutions de rechange : blague, histoire drôle, plaisanterie, boutade, vanne, craque, bien bonne » (Dict. qcois-français; 1999). En somme, les synonymes français sont à portée de clavier!
Historiqiue (manchette)
2025-10-20. On peut s’attendre à ce que le Soleil. le quotidien, offre un jour à ses lecteurs le titre suivant sur quatre colonnes : «Une manchette historique fera la Une d’ici à 24 heures ». Pour le moment, on leur offre celle-ci: « Une foule historique dans les rues de Québec» (18 octobre, 18 h 25). La foule devient historique en un tournemain. L’adjectif, bien utilisé, signifie mémorable, célèbre et donc, en principe, qui sera signalé dans les éphémérides. L’Académie française juge qu’il est une fâcheuse tendance à accorder illico au mot le sens d’important, d’inégalé et de sans précédent. C’est aller vite en affaire que d’en qualifier automatiquement le moindre fait ou la moindre activité. L’objectif des médias est compréhensible : attirer l’attention et pour cela créer des titres flamboyants. «Foule nombreuse» n’aurait pas suffi!
Pitch (2025)
2025-10-20. Le chroniqueur Richard Martineau, à l’occasion de son billet du jour, ne parvient pas à déceler un équivalent au mot « pitch ». Il écrit : « … les souverainistes devront faire un maudit bon pitch […] Eh bien voici mon ‘pitch’… » (Le J. de Qc, 20 oct., p. 10). Que voulait-il dire et qu’aurait-il pu écrire? Lionel Meney propose les équivalents « boniment, baratin, laïus, salade ». On pourrait mettre d’autres candidats en lice (slogan, sésame, …). Le mot anglais, il faut le noter, a de nombreux sens : l’Oxford English Dictionary lui en reconnaît dix-sept. C’est dire que les souverainistes auront la lourde tâche de sélectionner le slogan qui fera mouche.
Toponymie: Cap-Diamant (2025)
2025-10-21. La journaliste Karine Gagnon s’en tient à l’anglicisme toponymique «Cap Diamant». Elle écrit «… la Citadelle, trésor d’histoire [… ] situé au sommet du Cap Diamant…» (Le Journal de Québec, 21 octobre, p. 12). Mais ne faudrait-il pas écrire Cap-aux-Diamants? Si l’on pose la question à l’Intelligent artificiel (!), il répondra : « … Cap-aux-Diamants provient de la croyance des premiers explorateurs… qu'il y avait des diamants dans les roches … de la falaise. Bien que les pierres se soient révélées être du quartz, le nom … est devenu la traduction littérale de « Cape Diamond » en anglais, nom lui-même tiré du nom français original ‘Cap-aux-Diamants’» (réponse reçue à 21 h 35). Il semble donc que le toponyme exact est toujours ce dernier (et non Cap Diamant).
Twister un questionnaire (2025)
2025-10-22. Le français offre-t-il une faille ou une lacune qui conduit Richard Martineau à écrire : « L’art de twister un questionnaire »? Et qui, par la suite, amène l’équipe du journal à imposer la manchette « Quand les syndicats twistent la réalité »? (Le J. de Qc, 22 oct., p. 6). Le verbe franglais « twister » est fort important! Jean Forest le traduit par une dizaine d’équivalents (Grand glossaire des anglicismes…, 2008). Près de trois décennies plus tôt, Léandre Bergeron l’insérait dans son Dictionnaire de la langue québécoise et, ce faisant, l’officialisait comme synonyme de « tordre ». Y aurait-t-il une autre voie de contournement de ce verbe à la forme franglaise? Aurait-on pu écrire « masque, déforme, torture »… la réalité?
Attaquer sur qqn (2025)
2025-10-23. La préposition «sur» donne lieu à près de cent anglicismes selon la liste qu’en donne Jean Forest dans le Grand glossaire des anglicismes... (2008). Aussi est-il compréhensible que tinte une clochette intérieure à la lecture de la manchette «… prison pour une attaque sur un avocat» (Le J. de M., la Une du soir, 23 oct.). «… sur un avocat» ? Jean Forest note des exemples semblables. Retenons «garder un œil sur Untel» et «se fier sur Untel» qu’il corrige par «tenir Untel à l’œil» et «se fier à Untel». L’expression «l'attaque sur Untel» peut être redressée par «l’attaque d’un avocat». Guy Bertrand note à propos de l’emploi de la préposition : «C’est souvent sous l’influence de l’anglais qu’on utilise ‘sur’ dans des locutions qui devraient normalement se construire avec d’autres prépositions » (400 capsules linguistiques, 1999).
Monoparental (2025)
2025-10-25. Peut-on parler de mère et de père «monoparentaux? Des lecteurs du Journal de Québec auront sans doute lu dans le quotidien : « Depuis sa disparition, la mère monoparentale… » et « Les dernières années ont été difficiles pour la mère monoparentale…» (25-26 octobre, p. 3). La question se pose, dira-t-on, puisque le Multi dictionnaire définit ainsi le mot «Où il n’y a qu’un seul des deux parents » et qu’on y précise par la suite : « une personne ne peut être monoparentale; une famille ou un ménage peuvent l’être ». En somme, il n’existerait pas telle chose qu’un père ou une mère monoparentale. Mais va pour une famille, va pour un homme ou pour une femme. Que peut-on dire alors? ‘Une mère chef de famille, une mère seule, un père célibataire, etc.
Province (2025)
2025-10-26. On peut très bien quitter Québec sans quitter le Québec. C’est le cas lorsqu’un Québécois de la capitale déménage à Sept-Îles. Mais un Québécois peut aussi quitter le Québec, c’est-à-dire la province. Suffit alors de dire «quitter le Québec». Il est toujours possible d’écrire, comme on le voit dans la page publicitaire des Cliniques médicales Lacroix publiée dans le Devoir (25-26 octobre, p. A2) : « Vous envisagez […] de quitter la province de Québec?» . Le grammairien Gérard Dagenais s’appliquait à rappeler qu’une province, en français, est une division territoriale dont l’autorité est exercée par un délégué du pouvoir central. Or les pouvoirs des provinces canadiennes sont souverains dans leurs champs de compétence. De fait, le Québec, comme le Saskatchewan ou l’Ontario, est un État souverain (presque) à l’égal de l’État fédéral. Le mot «province» est ou serait fautif.
Dernier droit (2025)
2025-10-27. Autrefois, on disait «Y a-t-il un pilote dans l’avion? ». Aujourd’hui, à la lecture d’un placard publicitaire de TVA Nouvelles, on peut se demander s’il y a des correcteurs à TVA. On lit : « Le débat qui lance le dernier droit » (Le J. de Qc, 27 oct., p. 19). Le «dernier droit»? On ne dirait pas «le dernier courbe» et pourtant il existe telle chose qu’une courbe. Mais le substantif «droit» n’existe pas au sens de droite. D’où vient le barbarisme? L’Asulf écrit : «… ‘dernier droit ‘, attestée au Québec […] est probablement une traduction littérale de l’anglais (last straight)» et on termine la note par « … cet emploi n’est attesté nulle part ailleurs dans la francophonie, où l’on privilégie plutôt l’expression ‘dernière ligne droite’. Selon le contexte, il est donc préférable d’utiliser celle-ci ou une autre semblable comme ‘ dernière étape ‘, ‘ sprint final ‘, etc.». (https://asulf.org/dernier-droit/ ). Bref`: dernière ligne droite, dernière étape ou sprint final.
Référer (2025)
2025-10-28. Les moyens modernes de communication font en sorte que les anglicismes, les impropriétés, les erreurs et les contresens sont reproduits tels quels dans les médias. Si quelqu’un dit « c’est le fonne» ou « c’est le fun», on n’osera pas traduire ou même essayer de traduire! Voici la citation d’une informatrice, citation tirée du Journal de Québec : « …. elle aurait été accueillie, dirigée et référée vers la bonne ressource ». Un relecteur vigilant n’aurait pas laissé passer : « … dirigée et référée vers…» (20 octobre, p. 4). On « dirige une personne vers quelqu’un » et, c’est discutable, « on réfère une personne à quelqu’un ». Pourquoi discutable? Parce que les deux verbes sont synonymes dans le contexte. Il y aurait lieu de dire ou d’écrire « dirigée vers… ou référée à….». Ce sont des détails… amusants et passionnants.
Tournures Prendre pour acquis (2025)
2025-10-29. Il est inhabituel qu’un juge corrige la langue d’un enquêteur. Le Journal de Québec rappelle une remarque du juge Jacques Delisle à Dave Dufour, l’enquêteur chargé d’investiguer sur la mort de la femme du juge. La journaliste K. Lamontagne note que l’enquêteur trouvait curieux d’avoir à préciser ses droits à l’accusé, avocat lui aussi et donc au fait des règles idoines. Il aurait utilisé l’expression qu’il « prenait pour acquis » que le juge les connaissait. C’est alors que l’accusé intervint et fit remarquer que l’expression « prendre pour acquis » est un calque de l’anglais. La journaliste écrit : «Jacques Delisle l’interrompt alors et le reprend sur le verbe choisi : ‘on tient pour acquis’» (J.de Qc, 29 octobre, p. 4). La remarque était de mise, mais le moment était exceptionnel.
Frappé par une voiture (2025)
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